Les mystères du rift mi-continental
Aire marine nationale de conservation du Lac-Supérieur
Par Sahand Farivar Pendant l’été 2023, j’ai eu le privilège d’accompagner une équipe de géologues qui s’est aventurée dans l’aire marine nationale de conservation du lac Supérieur pour prélever des échantillons sur place. Dans le but d’acquérir des connaissances dans le cadre d’un programme de géologie, j’ai enfilé ma casquette de journaliste pour les accompagner. Nous avons descendu la baie Nipigon, en direction de l’île St.-Ignace, et avons passé la journée à faire des arrêts sur différents rivages et différentes îles. Tout au long du voyage, chacun des trois experts a donné son avis sur ce que nous recherchions exactement. Sur le chemin des îles, j’ai posé l’une de mes questions toutes faites : comment les géologues transforment-ils des observations directes faites sur le terrain en un récit décrivant des événements qui se sont produits il y a des millions, voire des milliards d’années? La réponse que j’ai reçue était beaucoup plus compliquée que je ne l’avais prévu. En bref, c’est cette traduction exacte d’observations directes en un récit géologique qui représente tout l’enjeu. Nous cherchions à connaître l’histoire du rift mi-continental, l’événement volcanique qui s’est produit il y a 1,1 milliard d’années et qui a créé l’énorme bassin du lac Supérieur. À l’aide d’observations sur le terrain de certaines formations rocheuses (le type de roche, les caractéristiques des roches comme les stries ou les intrusions et la manière dont certaines structures rocheuses en recouvrent d’autres) et de techniques d’identification et de datation en laboratoire, dont certaines exigent l’utilisation des avancées scientifiques les plus récentes des XXe et XXIe siècles, nous avions pour mission de créer une image plus complète, sous forme de carte géologique, de la manière dont le rift mi-continental s’est probablement formé. Mais dès que nous avons posé le pied sur les rives d’Agate Point, il est devenu évident que de nombreux mystères entouraient encore l’histoire du grand rift. Nous avons observé des œufs de tonnerre qui sont de petites inclusions rocheuses en forme d’œufs qui ponctuent la rhyolite côtière (une roche volcanique riche en silice). Dans un premier temps, on a expliqué que les stries dans la rhyolite signifiaient que ces œufs s’étaient inclus dans la roche après que celle-ci était remontée à la surface. J’ai ensuite entendu une autre théorie, selon laquelle les œufs eux-mêmes étaient étirés par endroits et qu’ils devaient donc être inclus dans le magma avant son refroidissement pour devenir de la roche. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de la manière dont les observations sur le terrain ont donné lieu à différents récits théoriques sur les origines du rift, la vérité se trouvant quelque part entre les deux. Et pourtant, les certitudes ne manquaient pas, comme la formation de ces falaises géantes typiques des roches élevées de cette région. Il s’agit de colonnades basaltiques, des coulées de lave qui se sont refroidies à la surface de la Terre et qui, en se solidifiant, se sont contractées en colonnes à la manière d’un accordéon géant. Cela a été pour moi comme une révélation : ces colonnes de 30 à 40 pieds sont de la lave datant d’un milliard d’années. Ce grand mystère, le rift mi-continental lui-même, est juste là, sous nos yeux.
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