Plan directeur 2005 du lieu historique national du Manoir-Papineau

Lieu historique national du Manoir-Papineau

Table des matières

Page couverture du plan directeur du lieu historique national du Manoir Papineau 

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le plan directeur ou des questions connexes concernant le lieu historique national du Manoir-Papineau :

Adresse postale :
   Adresse postale : Lieu historique national du Manoir-Papineau
     500, rue Notre-Dame
     Montebello (Québec) Canada
     J0V 1L0

Téléphone :
   Téléphone : 418-572-6151

Téléscripteur (ATS) :
   Téléscripteur (ATS) : 1-866-787-6221



Avant propos

Stéphane Dion
L’honorable Stéphane Dion, Ministre de l’environnement

Les lieux historiques nationaux, les parcs nationaux et les aires marines nationales de conservation du Canada incarnent l’essence même de notre pays. Ils participent à définir qui nous sommes et ce que nous sommes. Ce sont des endroits magiques, merveilleux et indissociables de notre patrimoine. Chacun d’eux a sa propre histoire à nous raconter. Mais, ensemble, ils conjuguent les richesses du passé aux promesses de l’avenir et rassemblent les Canadiens et Canadiennes.

Notre vision consiste à ce que chacun des lieux historiques nationaux du Canada, qu’il soit de propriété fédérale ou non, présente une bonne santé commémorative et à ce que notre réseau de lieux nationaux continue à évoluer au rythme de l’évolution du pays. Nos lieux historiques nationaux seront pour tous les Canadiens et Canadiennes des lieux d’expérience et d’apprentissage. Ils aideront nos collectivités à être dynamiques et créatives, tout en contribuant à nos efforts visant à revitaliser les villes du Canada. Ensemble, comme fiduciaires, nous allons conserver ces endroits au profit de l’actuelle génération et de celles qui suivront, tout en veillant à ce qu’ils contribuent à une plus grande viabilité économique et une meilleure santé écologique dans tout le Canada.

Notre vision consiste également à représenter chacune des régions naturelles terrestres et marines du Canada par au moins un parc national ou une aire marine nationale de conservation; à maintenir tous les parcs nationaux en bonne santé écologique; à ce que chaque aire marine nationale de conservation fasse la promotion d’une utilisation viable et saine de nos ressources marines du point de vue de l’écologie, d’une manière qui harmonise les pratiques de conservation aux activités humaines; et à ce que tant les parcs nationaux que les aires marines nationales de conservation soient des endroits offrant à tous les Canadiens et Canadiennes la chance d’en vivre l’expérience et d’en profiter.

Ces principes constituent le fondement du nouveau plan directeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. Vous me permettrez de témoigner ma plus sincère appréciation aux nombreux Canadiens et Canadiennes qui ont participé par leur réflexion à l’élaboration de ce plan. Je voudrais remercier en particulier l’équipe très dévouée de Parcs Canada de même que tous les particuliers et les organisations locales qui ont contribué à ce document, pour leur détermination, leur travail soutenu, leur esprit de collaboration et leur extraordinaire sens de la gestion du patrimoine.

Dans ce même esprit de partenariat et de responsabilité, j’ai le plaisir d’approuver le plan directeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau.

L’original a été signé par :

Stéphane Dion
Ministre de l’environnement

Recommandations

Approbation recommandée par :

Alan Latourelle

Directeur général
Parcs Canada

Francine Émond

Directrice Unité de gestion de l’Ouest du Québec
Parcs Canada


Introduction

Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau est situé à Montebello, municipalité sise sur la rive québécoise de l’Outaouais, à mi-chemin entre Ottawa/ Gatineau et Montréal. Déclaré d’importance architecturale nationale en 1986, le manoir – ainsi qu’une partie de l’ancien domaine seigneurial des Papineau – a été transféré à Parcs Canada en 1993 en vertu d’une entente conclue entre le gouvernement canadien et la Corporation hôtelière Canadien Pacifique Footnote 1, aujourd’hui la corporation Fairmont.

L’entente épouse la forme d’un bail emphytéotique d’une durée de 42 ans. Il est précisé que « l’Emphytéote s’engage à transformer à ses frais l’Ensemble immobilier en lieu historique national pour informer le public en rappelant la vie de Louis-Joseph Papineau et de sa famille, selon les thèmes et objectifs de l’Ensemble immobilier » (article 3.5) et à cette fin, « s’engage à faire dans un délai raisonnable, à ses frais, les Améliorations... » Footnote 2 (article 3.1).

Conformément à l’une des clauses de l’accord, un comité consultatif composé d’intervenants du milieu Footnote 3 a été mis sur pied dans les mois qui ont suivi la signature de l’entente. Considéré comme un interlocuteur privilégié auprès de Parcs Canada, le comité a essentiellement pour mandat d’informer les responsables du projet des préoccupations et des attentes du milieu et de prodiguer des recommandations et des conseils relatifs aux orientations proposées pour assurer l’intégrité commémorative du lieu et en favoriser l’intégration au sein de sa région d’appartenance.

Le processus de planification du lieu a franchi une première étape clé en 1996 avec le dépôt initial d’un énoncé d’intégrité commémorative Footnote 4 élaboré à partir des recommandations de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada et d’un document d’orientation Footnote 5.

À l’automne 1997, un document d’information exhaustif Footnote 6 était diffusé dans le but de faire connaître à la population l’approche proposée par Parcs Canada pour préserver et mettre en valeur le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. Une présentation formelle au comité consultatif ainsi qu’une soirée « portes ouvertes » destinée à la population ont permis aux personnes intéressées d’obtenir des éclaircissements sur les orientations proposées et de faire part de leurs préoccupations, de leurs idées et suggestions. Un compte rendu des points de vue exprimés dans le cadre de l’exercice de consultation a été produit en mars 1998 Footnote 7.

Le plan directeur

Le plan directeur d’un lieu historique national a essentiellement pour but d’assurer l’intégrité commémorative du lieu ainsi que l’application des principes et de la pratique de la gestion des ressources culturelles.

Le plan directeur exprime à l’échelle d’un lieu en particulier les politiques générales de Parcs Canada et tient également compte des commentaires et des suggestions du public. Les orientations exposées dans le plan sont directement reliées aux responsabilités essentielles qui incombent à Parcs Canada, c’est-à-dire d’assurer l’intégrité commémorative du lieu, d’offrir des services de qualité aux visiteurs et, enfin, de faire un usage judicieux des fonds publics. En somme, c’est à travers la mise en application des orientations des plans directeurs que Parcs Canada s’acquitte de ses devoirs en-vers les Canadiens.

Conformément aux dispositions de la Loi créant l’Agence Parcs Canada, les plans directeurs doivent faire l’objet d’une révision aux cinq ans. On doit donc s’attendre à ce que ce plan, le premier à être produit pour le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, soit révisé et mis à jour en 2010.

Outre un bref rappel du rôle joué par Louis-Joseph Papineau dans l’histoire du Canada en tant que seigneur de la Petite-Nation et concepteur du domaine et du manoir seigneurial de « Monte-Bello », la première section présente la notion d’intégrité commémorative ainsi que des extraits de l’énoncé qui en découle pour le lieu. La deuxième section instruit le lecteur de la situation actuelle, brossant un tableau succinct de l’état du lieu au regard de son intégrité commémorative et fournissant des informations factuelles relatives au statut juridique du lieu, à son utilisation, aux ententes de collaboration existantes, au cadre touristique régional... La troisième section du plan expose le concept de conservation et de mise en valeur proposé pour répondre aux objectifs poursuivis, ex-prime une vision du lieu sur un horizon d’une quinzaine d’années et, enfin, définit une série d’orientations stratégiques qui guideront les actions et les décisions futures de Parcs Canada touchant le lieu historique. Un résumé de l’évaluation environnementale du projet est présenté à la fin du document.

Carte 1 : Manoir Papineau - Situation

Situation/Location 
Carte 1 : Manoir Papineau - Situation — Version texte

Cette carte montre l'emplacement du lieu historique national du Manoir Papineau, près de Montebello, au Québec, à environ 80 km au nord-est d'Ottawa (Ontario) et à 110 km au nord-ouest de Montréal (Québec).


1.0 L’intégrité commémorative du lieu

À titre d’organisme du gouvernement fédéral responsable de préserver et de mettre en valeur le patrimoine historique et culturel du pays, Parcs Canada a notamment pour mission :

  • de favoriser la connaissance et l’appréciation de l’histoire du Canada grâce à un programme national de commémoration;
  • d’assurer l’intégrité commémorative8 des lieux historiques nationaux qu’il administre et, à cette fin, de les protéger et de les mettre en valeur pour le bénéfice, l’éducation et la jouissance des générations actuelles et futures, avec tous les égards que mérite l’héritage précieux et irremplaçable que représentent ces lieux et leurs ressources;
  • d’encourager et d’appuyer les initiatives qui visent à assurer la protection et la mise en valeur des lieux d’importance historique ou architecturale nationale non administrés par Parcs Canada.

Par ailleurs, afin de concrétiser son mandat, Parcs Canada a adopté une série d’objectifs stratégiques qui orienteront ses activités au cours des cinq à dix prochaines années. Parmi ces objectifs stratégiques, on note les suivants :

  • assurer l’intégrité commémorative des lieux historiques nationaux;
  • renseigner les Canadiens et les visiteurs internationaux sur le patrimoine canadien, expliquer l’intégrité commémorative et amener les Canadiens à apprécier davantage les réseaux des lieux historiques (incluant les canaux historiques), des parcs nationaux et des aires marines de conservation;
  • fournir aux visiteurs des services appropriés afin qu’ils profitent des aires patrimoniales protégées et les apprécient, et veiller à minimiser les impacts négatifs.

Le respect de l’intégrité commémorative des lieux reconnus d’importance historique nationale figure donc parmi les objectifs fondamentaux de Parcs Canada. L’énoncé d’intégrité commémorative sert de guide pour la planification et la gestion de ces lieux. L’énoncé précise l’objectif de commémoration du lieu, décrit les ressources culturelles en présence, leur attribue une valeur et identifie les messages rattachés à l’importance historique nationale du lieu qui doivent être communiqués au public. L’énoncé d’intégrité commémorative fixe également des objectifs à atteindre en matière de protection des ressources culturelles et de communication des messages associés à l’importance historique nationale du lieu. En somme, l’énoncé d’intégrité commémorative constitue un cadre de référence qui établit l’état désiré pour le lieu; l’écart constaté entre cet état souhaité et la situation existante permet de définir des mesures de gestion spécifiques pour la conservation et la mise en valeur du lieu.

Louis-Joseph Papineau, Seigneur de la Petite-Nation (1817-1871)

Fils d’un notaire montréalais, homme politique et aussi seigneur, Louis-Joseph Papineau marcha sur les traces de son père. Avocat et homme politique, il partagea, au point même de les incarner, les aspirations de toute une classe de la société canadienne-française d’alors, celle des membres des professions libérales.

Dès 1815, Papineau accède au poste d’Orateur de la Chambre d’Assemblée du Bas-Canada puis il préside simultanément aux destinées du Parti canadien, qui deviendra le Parti patriote en 1826. C’est comme chef de ce parti que Papineau fera sa marque dans l’histoire politiquecanadienne. À ce titre, il orchestre les stratégies susceptibles de procurer à la classe à laquelle il s’identifie le leadership social de la nation canadienne-française. Entre 1827 et 1837, Papineau devient la figure de proue de la Chambre d’assemblée du Bas-Canada et le leader national des Canadiens français dont il incarne le désir d’émancipation politique. Le refus des autorités coloniales et métropolitaines de satisfaire aux demandes de réformes revendiquées par les Patriotes conduira aux troubles de 1837-1838 dont l’issue entraînera l’exil de Papineau auxÉtats-Unis puis en France jusqu’en 1845.

La pensée politique de Louis-Joseph Papineau, nourrie par une grande curiosité intellectuelle, subit l’influence des philosophes du Siècle des Lumières et souscrit, au plan politique, au libéralisme. Au plan économique et social, en revanche, l’ambivalence de son discours laisse croire qu’il était plutôt conservateur.

Comme « chef national », Papineau diffusera une conception idéalisée de la tenure seigneuriale. D’une part, il considère cette institution comme étant plus propre que le capitalisme à assurer une répartition égale de la propriété foncière entre les individus. Partant, il est porté à exagérer le rôle de son principal agent, le seigneur, en faisant de ce dernier le gardien de l’égalité sociale. D’autre part, Papineau ne peut dissocier le « seigneurialisme » du nationalisme canadien-français. Les deux idéologies lui apparaissent à ce point indissociables qu’il lui faut rationaliser les contradictions qu’elles engendrent, notamment au plan des réformes sociales. Aussi ne pourra-t-il envisager, avec réalisme, l’abolition de cette institution sans y voir une sérieuse menace à l’existence même de la nation canadienne-française dont il incarne alors les aspirations.

En 1817, Louis-Joseph Papineau achète de son père la seigneurie de la Petite-Nation dont il demeurera propriétaire jusqu’à sa mort, en 1871. D’abord trop accaparé par sa carrière politique, il ne peut assurer lui-même la gestion de sa seigneurie et, comme son père, il la confie à son frère, Denis-Benjamin. En 1845, cependant, au retour de son exil européen, Louis-Joseph Papineau écrit « qu’il est de son devoir, comme grand propriétaire, de vivre au milieu des colons ». Dès octobre, lors d’une visite de reconnaissance pour déterminer le futur emplacement de son manoir, il choisit le cap Bonsecours, un site central sur le front de sa seigneurie, à partir duquel il planifie l’aménagement du domaine seigneurial qu’il nomme « Monte-Bello ». En 1848, Papineau entreprend la construction d’un superbe manoir dans lequel il emménage avec sa famille à la fin de l’année 1850.

Papineau consacra les quelque vingt dernières années de sa vie à sa famille, à la lecture, à l’administration de sa seigneurie ainsi qu’à l’aménagement de son domaine. Après sa mort, ses descendants vécurent au manoir jusqu’en 1929.


1.1 L’objectif de commémoration

On entend par objectif de commémoration d’un lieu historique ce qui doit être spécifiquement commémoré en ce lieu. L’objectif de commémoration d’un lieu est étroitement lié aux particularités qui lui ont permis d’être reconnu d’importance nationale et qui justifient, en somme, sa raison d’être au sein du réseau des lieux historiques nationaux. C’est essentiellement à partir des recommandations de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada, approuvées par le ministre, que l’objet de commémoration d’un lieu peut être défini.

La Commission des lieux et monuments historiques du Canada s’est prononcée plusieurs fois sur le manoir Papineau. En 1920, lors d’une annonce de mise en vente du « château », elle émet l’avis que le site n’est que d’importance locale et n’a pas une grande valeur en tant que lieu de commémoration puisqu’il ne fut témoin d’aucun événement historique en soi. Pour bien comprendre les commentaires et les recommandations de la Commission au sujet du manoir, il faut toutefois se référer aux déclarations de la Commission relatives à Louis-Joseph Papineau lui-même.

La Commission a considéré l’importance nationale de Louis-Joseph Papineau à quelques reprises, tantôt en tant qu’homme politique, tantôt en tant que seigneur et « paterfamilias » de la famille Papineau, tantôt, enfin, en association avec ses lieux de résidence (le manoir seigneurial de Montebello et sa maison de la rue Bonsecours, à Montréal).

En 1937, Papineau est inscrit sur une liste « d’importants personnages » de l’histoire du Canada (« outstanding characters in Canadian History »). On recommande l’érection d’une « plaque secondaire » en son honneur à son lieu de naissance, Montréal. L’année suivante, le texte de la plaque est approuvé. Papineau est désigné comme « orateur et chef politique ».

Papineau revient à l’ordre du jour en 1966 dans le cadre de l’évaluation de l’importance nationale de sa maison, rue Bonsecours à Montréal. En 1968, cet édifice est déclaré d’importance nationale « historique et architecturale » et la Commission recommande au ministre de l’acquérir. Dès lors, les déclarations de la Commission au sujet de Papineau seront partagées entre le manoir de Montebello et la maison de la rue Bonsecours.

En 1974, la Commission recommande de commémorer le « personnage » de Louis-Joseph Papineau par le biais d’une plaque apposée sur son manoir, à Montebello. Quant à la maison de la rue Bonsecours, son importance nationale est attribuée plutôt pour des raisons architecturales. La Commission suggère cependant de bien établir le lien entre Papineau et sa maison dans le texte de la plaque. De fait, l’inscription pour la maison montréalaise, telle qu’approuvée en novembre 1982, fait surtout état de ses qualités architecturales tout en signalant son occupation par Papineau, homme politique « chef du parti canadien et l’une des figures marquantes des événements de 1837 ».

La Commission revient sur la question de la commémoration de Papineau et de ses résidences en juin 1986. Elle reconnaît alors que le manoir Papineau est un bon exemple, quoique inhabituel, de domaine rural (« country estate ») au XIXe siècle. Plus particulièrement, la Commission observe que les qualités architecturales du manoir, qui traduisent plusieurs styles, reflètent « les ambitions sociales, les goûts et la personnalité de son propriétaire – Louis-Joseph Papineau – du-rant les dernières années de sa vie ». Elle émet alors l’avis que « le manoir Papineau a une importance architecturale nationale et devrait faire l’objet d’une plaque commémorative, laquelle – sans négliger la famille Papineau – devrait surtout porter sur le reflet que constitue ce bâtiment de la personnalité de Louis-Joseph Papineau ».

À la même réunion de juin 1986, la Commission fait le point sur ses recommandations antérieures relatives à Papineau et à la résidence de la rue Bonsecours (dite « maison Papineau »). Elle recommande alors la pose de deux plaques commémoratives à la maison Papineau : l’une portant sur la valeur architecturale de la maison et l’autre sur l’homme politique, sa vie et son oeuvre, en raison des « rapports étroits qui existent entre cette dernière (maison Papineau) et la période la plus active et la plus importante de la vie de Papineau ».

Enfin, l’inscription d’une plaque commémorative portant sur le manoir Papineau est approuvée en 1989. Tout en évoquant la carrière politique de Papineau, le texte fait surtout état des dernières années de sa vie alors que « voyant dans le régime seigneurial un rem-part contre l’assimilation », il quitte la politique pour se consacrer à sa seigneurie de la Petite-Nation. Le texte établit en outre une association entre l’homme cultivé qui s’inspira de divers styles architecturaux dans la conception du manoir et le penseur qui aménagea ses terres familiales « à l’image qu’il se faisait d’un domaine idéal ».

Il ressort donc de cette nomenclature un voeu bien arrêté de la part de la Commission de commémorer le personnage de Louis-Joseph Papineau et ses lieux de résidence (pour leurs qualités architecturales respectives) à deux endroits : « Monte-Bello » Footnote 9 et la maison de la rue Bonsecours à Montréal. Les précisions apportées par la Commission en 1986 permettent de mieux comprendre la situation. D’une part, l’importance nationale de la maison montréalaise repose sur le rapport à l’homme politique alors au faîte de sa carrière (avant 1837); d’autre part, « Monte-Bello » est affilié au seigneur, au penseur et à l’homme cultivé suite à sa décision de s’installer sur sa seigneurie (1846).

En fonction de ce qui précède, l’objectif de commémoration du lieu a été défini comme suit :

Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau commémore principalement Louis-Joseph Papineau et l’importance architecturale de son ma-noir, reflet de ses ambitions sociales, de ses goûts et de sa personnalité.

Le lieu témoigne également de l’homme qui, après avoir quitté l’avantscène politique, se consacre tout entier à l’aménagement d’un domaine idéal et à la gestion de sa seigneurie de la Petite-Nation.

Le lieu rappelle enfin le rôle de la fa-mille Papineau dans la constitution du domaine.


1.2 Les ressources qui symbolisent ou caractérisent l’importance nationale du lieu

De nos jours, ce qu’il est convenu d’appeler le « domaine Papineau » n’est en réalité qu’une toute petite parcelle du domaine seigneurial originel Footnote 10. Le centre d’accueil touristique de Montebello (bâtiment relocalisé de l’ancienne gare ferroviaire) et la halte routière adjacente voisinent la propriété sur toute sa limite orientale; à l’ouest se retrouvent les terrains ainsi que les équipements hôteliers du Château Montebello.

Le manoir et quelques dépendances occupent le cap Bonsecours, point le plus élevé de la portion habitée du domaine. Les terres avoisinantes, où se situent d’autres dépendances, dont la maison du jardinier et la chapelle funéraire, sont traversées par le ruisseau Papineau et un petit affluent, le ruisseau Pesant. Le lieu historique national est recouvert sur la moitié de sa superficie par une forêt d’une diversité exceptionnelle qui comprend plusieurs éléments originaux et qui faisait partie de la vision de Papineau pour l’aménagement de son domaine.

Les ressources dont il sera ici question ont été reconnues comme symbolisant ou caractérisant l’importance historique nationale du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. En référence à la Politique sur la gestion des ressources culturelles de Parcs Canada, elles sont considérées de « niveau 1 ».

Certaines des ressources culturelles rattachées à l’objectif de commémoration se retrouvent à l’extérieur de la propriété transférée à Parcs Canada en 1993; ces ressources sont indiquées par un astérisque.

Site et paysages culturels

Sur la portion du domaine seigneurial occupée par le lieu historique national Footnote 11, le concept d’organisation de l’espace imaginé par Louis-Joseph Papineau et son fils Amédée se lit encore facilement. On y perçoit tout à la fois les goûts et les aspirations sociales du seigneur de la Petite-Nation.

Le cap Bonsecours et ses abords firent l’objet d’un aménagement paysager d’envergure intercalant des espaces ouverts au sein d’un boisé traversé par des sentiers sinueux. À l’évidence, Louis-Joseph Papineau (à travers son fils Amédée, qui était un fervent adepte d’Andrew Jackson Downing) Footnote 12, s’est largement inspiré des jardins « à l’anglaise » pour imprimer ce caractère à cette partie du domaine. La recherche de l’effet pittoresque a conduit Papineau à exploiter toutes les possibilités du site. Le manoir surplombe le cap; ce promontoire commande des vues lointaines tant en direction de l’est que vers l’ouest, sans compter le balayage visuel sur la rive droite de l’Outaouais. Les alentours immédiats du manoir ont également conservé trace de massifs floraux hérités de l’époque des Papineau. Le versant sud du cap Bonsecours abrite pour sa part les vestiges de plates bandes en escalier, d’allées et d’aires de repos aménagées au temps des Papineau. Du côté de l’entrée principale du manoir, donc en direction du nord, Papineau avait fait dégager des prairies en contrebas du cap. Symboliquement, le monde agricole allait côtoyer le parc de loisir, de délassement et de rêverie...

Encore de nos jours, le vaste parc boisé avoisinant le cap Bonsecours est traversé par l’ancienne allée seigneuriale, au parcours légèrement ondulé, ainsi que par le ruisseau Papineau et son affluent, le ruisseau Pesant. Les divers sentiers que les Papineau, père et fils, avaient planifiés dans le parc, sur le cap et en contrebas de ce dernier restent en bonne partie perceptibles.

L’entrée au domaine habité est soulignée par un portail* qui marque le début de l’allée seigneuriale. Aménagé par le Seigniory Club, le portail actuel en pierre et en fer forgé est flanqué d’une guérite; il remplace aujourd’hui l’ancienne barrière de l’époque des Papineau. Près du portail, la maison du jardinier*, où résidait le gardien du domaine, est contemporaine du manoir.

Le réseau des chemins du domaine à l’époque des Papineau était simple et il existe toujours. Il se compose de trois tronçons qui se rejoignent : l’allée seigneuriale, qui relie l’extrémité est du cap Bonsecours au chemin public (aujourd’hui la route 148), le chemin du cap, qui traverse le cap d’est en ouest et s’aboute au chemin vert*, dont la fonction était d’établir la liaison entre la zone des dépendances agricoles, au pied de l’extrémité ouest du cap, et le chemin public. Le chemin vert était clos d’une barrière à sa rencontre avec le chemin public, à l’instar de l’allée seigneuriale, afin d’assurer au seigneur le respect de l’intimité de sa vie familiale. De nos jours, le chemin vert a perdu son gabarit ancien sur la majeure partie de son parcours et a été asphalté.

L’allée seigneuriale, véritable trouée à travers la futaie, mène au manoir. Elle conserve à la fois son tracé et son gabarit ancien et son revêtement est toujours de gravier. L’allée descend d’abord vers un large pont de bois, de construction récente, qui enjambe le ruisseau Papineau; le pont originel était fait de bois rond. Près du pont, le parcours paresseux du ruisseau est animé par une petite cascade créée à l’époque des Papineau. L’allée seigneuriale remonte puis débouche sur une petite clairière; on aperçoit alors la chapelle funéraire* familiale et le cimetière attenant*, ceint d’une clôture de fer forgé*. Gagnant au sud, l’allée gravit le flanc du cap Bonsecours. Le tracé étudié de l’allée met judicieusement à profit la topographie de telle sorte que le manoir se dérobe encore au regard. Ce n’est qu’après avoir parcouru une centaine de mètres qu’on peut enfin apercevoir l’angle nord-est du bâtiment. Sur le cap, l’allée seigneuriale s’aboute au chemin du cap dont la trajectoire longe la façade du manoir et son mur de croupe de l’ouest, avant de se diriger vers le hangar à grains et l’écurie* pour rejoindre le chemin vert. Le chemin du cap a été asphalté et son tracé a été modifié à l’ouest du manoir.

De vastes pelouses entourent le manoir. Celle qui s’étend devant la façade met en valeur un chêne rouge plus que centenaire, contemporain de Papineau. De grands pins forment l’arrière-plan du paysage. Au nord-est de la pelouse, au bout d’un sentier dallé, un kiosque (campanile) en bois rond d’allure rustique se blottit dans un épais bosquet. Au sud du manoir, une autre pelouse ornée de grands peupliers et de thuyas s’étend vers la rivière des Outaouais. Un rideau d’érables, de lilas et de chèvrefeuilles entoure la pelouse à l’est et au sud. Le regard se porte aussi sur un pin blanc géant, jadis entouré d’un belvédère circulaire en bois; Papineau y montait pour voir arriver ou s’éloigner ses proches et ses invités lors de séjours au manoir. Une autre vaste pelouse ponctuée de grands arbres flanque le manoir du côté ouest. En direction de l’est, la pelouse est plus restreinte en raison de l’empiétement du salon hors-œuvre.

Au sud du chemin du cap, une pelouse en pente douce remplace l’ancien potager. Une haie de symphorines ainsi que des plantations de conifères séparent cette zone de la route. Des marches en pierre calcaire, larges et irrégulières, colorées de buissons de pivoines et d’hortensias, relient le chemin au potager.

Au sud du potager s’étendent les terrasses, autrefois nommées « coteau sud », sur lesquelles on fit jadis planter vignes et arbres fruitiers. Ce verger disparu est maintenant peuplé d’une grande variété d’espèces végétales. Les vestiges des murs de pierre, des marches, des aires de repos permettent encore d’en imaginer l’apparence antérieure.

La façade du pavillon de thé est adossée à la rivière. Un treillis de bois accolé au solage en maçonnerie rappelle qu’on y cultivait autrefois la vigne. Du côté ouest, un mur de pierre s’incurve pour rejoindre un escalier de pierre plus ancien qui mène à des terrasses. Le décor d’époque reste encore perceptible à travers une végétation envahissante.

Les prairies* intégrées au domaine par les Papineau étaient au nombre de quatre, bien qu’aucune ne fasse aujourd’hui partie du lieu historique national. Deux d’entre elles sont partiellement oblitérées par des réaménagements modernes : l’ancien pacage des chevaux* est occupé par le centre d’accueil touristique; le Château Montebello et ses dépendances occupent le site de la prairie de l’anse aux Vaches*. En revanche, la prairie de la maison du jardinier* et la prairie de la grange* (aujourd’hui partiellement occupée par des courts de tennis) témoignent encore de l’organisation du domaine au temps des Papineau.

En somme, comme le site le reflète toujours, Louis-Joseph Papineau et son fils ont divisé le vaste terrain de la partie habitée du domaine entre le parc, les pelouses, le jardin et les prairies, créant à leur manière le « paradis environnemental » rêvé par Papineau. Suivant le concept initial, le parc consistait en cette grande partie du terroir où la forêt déjà présente devait être conservée tout en étant, bien sûr, entretenue et ponctuellement enrichie de certaines essences. Le parc comprenait le parcours de l’allée seigneuriale, une petite cascade aménagée sur le ruisseau Papineau et une deuxième route d’accès, le chemin vert, qui, parallèle à l’allée seigneuriale, reliait la zone des bâtiments agricoles au chemin public. Les pelouses étaient de grandes étendues gazonnées qui environnaient la maison seigneuriale. On y trouvait des plates-bandes de fleurs, certains arbres, des arbustes, des meubles d’extérieur. Le jardin était combiné à un potager, en une savante association de fleurs et de légumes; il occupait tout un pan incliné vers le sud du cap Bonsecours. Quant aux prairies, il s’agissait d’espaces réservés à la culture de graminées (prairie de la grange) ou de plantes maraîchères (prairie de la maison du jardinier) ou, encore, dévolus au pâturage (la prairie de l’anse aux Vaches et le pacage des chevaux).

Le patrimoine bâti

Le manoir

Clef de voûte du grandiose projet de domaine idéal imaginé par Louis-Joseph Papineau, le manoir seigneurial est un vaste bâtiment rectangulaire en pierre qui devait être flanqué à l’origine de quatre tours. Deux d’entre elles furent effectivement érigées à la fin de la campagne de construction intensive du manoir, de 1848 à 1850. Au sud-ouest, une autre petite tour logeant les latrines est contemporaine des tours sur l’angle dont elle partage le plan octogonal. Papineau fit ériger une autre tour hors-oeuvre, de plan carré cette fois, pour tenir lieu de bibliothèque; elle date de 1856, mais on lui ajouta un étage en 1880. L’année suivante, soit en 1881, Amédée Papineau, héritier du domaine après le décès de son père, fit construire une allonge au grand salon, qu’on nomma « le salon bleu »; elle est à cinq pans hors-oeuvre. Depuis lors, le manoir n’a pas connu de transformation radicale au dehors, si ce n’est qu’un incendie détruisit le toit octogonal d’une des tours en 1892, lequel laissa place au toit conique que nous lui connaissons aujourd’hui.

L’édifice témoigne du mouvement « pittoresque » par l’éclectisme de sa composition. La façade donnant sur la rivière, de l’aveu même du fils aîné de Papineau, ressemble à « un manoir de Normandie ». Les murs de croupe et la façade principale sont de la famille des grandes maisons de l’époque Regency, avec la longue galerie protégée par un avant-toit en porte-à-faux. Un belvédère d’observation placé au sommet du toit à terrasse faîtière témoigne par ailleurs de l’influence déterminante du mouvement « pittoresque ». Le fenêtrage de la façade principale reste résolument classique, l’étage-noble y étant désigné sans équivoque par la forte dimension des baies à ce niveau.

La porte d’entrée néo-classique s’ouvre sur un intérieur dont le plan à vestibule central est classique. Le niveau du soubassement était réservé aux pièces de service avec sa cuisine, son garde-manger, sa cave à vin et ses chambres de domestiques... Des chambres pour les domestiques se trouvaient également dans les combles, alors que les chambres de la famille occupaient l’étage.

L’un des traits particuliers de cette grande demeure tient sûrement à la présence des tours : l’une d’elles servait exclusivement à loger un escalier tournant à droite en porte-à-faux et assurant la communication à tous les étages. L’autre tour logea, dès les premières années, une serre sur ses deux niveaux inférieurs avant qu’une nouvelle serre ne soit aménagée en 1881 au soubassement du « salon bleu ».

Le rôle de Louis-Joseph Papineau, en tant que concepteur, ressort de différentes façons : le nombre de fenêtres, la présence des tours ou les grands axes du fractionnement de l’espace. Ce rôle se précise davantage lorsqu’on considère son concept initial, car Papineau voulait donner à son manoir l’image d’un « château féodal » flanqué de quatre tours, sorte de nid d’aigle dont le sommet aurait fourni tous azimuts des points de vue exceptionnels. Son projet fut transformé en cours de chantier. Toutefois, quand, en 1856, il en vint à la construction de son édifice fétiche, la bibliothèque, c’est au vocabulaire néo-gothique qu’il fit appel pour couronner sa tour qu’Amédée Papineau se plaisait à nommer « le donjon ». Ce caractère de féodalité fut encore renforcé, côté rivière, par un poulailler-colombier se dressant au haut de l’escarpement, là où s’élève aujourd’hui le pavillon de thé; le colombier avait été, dans la jurisprudence féodale, un attribut du seigneur. La bibliothèque fut conçue pour protéger l’importante collection de livres de Papineau et pour y loger un bureau destiné à la sauvegarde des archives de la seigneurie et à la réception des censitaires.

La personnalité de Louis-Joseph Papineau transparaît encore en ce qu’il créa « Monte-Bello », moins pour lui-même que pour ses descendants. À cet égard, il apparaît ouvert à des suggestions : l’angle du toit du manoir, sa terrasse faîtière, la galerie unique ou le programme iconographique du balcon du mur gouttereau du sud proviennent des remarques décidément capitales de son fils Amédée. Soulignons spécifiquement le recours qu’ont eu les Papineau, père et fils, aux emblèmes nationaux pour en faire des motifs décoratifs, soit le castor et la couronne de feuilles d’érable.


Les dépendances

Outre le manoir, le domaine seigneurial comptait un certain nombre de dépendances dont plusieurs subsistent toujours; toutes érigées au XIXe siècle, elles évoquent, avec beaucoup de caractère, diverses tranches de vie de l’ancien domaine des Papineau.

Construit en 1855, le hangar à grains fut d’abord destiné à servir d’entrepôt pour les grains des censitaires qui payaient leurs redevances en nature. L’édifice est commodément situé sur le domaine, près de la barrière du chemin du cap qui constituait la voie de service du manoir. Il s’agit d’un édifice de briques sur carré de pierre, coiffé d’un toit à deux versants, supporté par des consoles dans le goût néo-gothique. En façade, le toit porte un petit pigeonnier sous une flèche à la pointe de laquelle culmine une girouette.

L’espace intérieur comprend un soubassement accessible uniquement de l’extérieur, un rez-de-chaussée ainsi qu’un espace logeable sous les combles qu’on atteint par un escalier intérieur. Le gendre de Louis-Joseph Papineau, le peintre Napoléon Bourassa, eut son atelier à l’étage du hangar entre 1858 et 1871. Cette pièce est d’un intérêt capital puisque ses murs et son plafond conservent des épures peintes à la fresque.

En 1880, à l’instigation d’Amédée Papineau, un bâtiment fut édifié à proximité du manoir pour servir de musée familial. Le volume rectangulaire de l’édifice est d’esprit néo-classique et il portait un toit à deux versants dont la corniche, à chaque mur pignon, se résolvait en un retour interrompu. Composée de fermes portant pannes, la charpente comprend des jambes de force en croix de Saint-André qui permettent de libérer le volume intérieur. À l’exception de la façade qui est en pierre, les trois autres murs du carré sont en brique. La façade intègre deux éléments d’esprit néoroman, soit une baie de porte à arc en plein cintre que surmonte une curieuse baie de fenêtre tripartite ornée de colonnettes.

À compter de 1920 environ, les Papineau vidèrent le musée des souvenirs accumulés, dont témoignent d’éloquentes photographies d’époque. L’ancien musée aurait alors servi de gymnase. En 1935, l’édifice du musée fut affecté au culte religieux anglican et, sous l’appellation de Christ Church, il continue de remplir cette fonction.

Le pavillon de thé est associé aux Papineau tant par ses fondations qui remontent à Louis-Joseph Papineau, que par son carré en bois qui date de l’époque d’Amédée. En 1860, Louis-Joseph Papineau fit ériger un poulailler colombier dont la base était un carré maçonné. En 1887, une serre succéda à ce bâtiment, élevée sur les mêmes fondations. Vers 1913, on démolit la partie supérieure de la serre. La partie résiduelle devint le pavillon de thé. Le bâtiment fut maintes fois réparé par la suite. Son carré en bois excède de trois côtés la base maçonnée qui le supporte. Le pavillon, qui évoque la partie haute d’une tour à l’italienne, se présente aujourd’hui de la manière qui suit : un bahut lambrissé supportant un jeu de châssis vitrés logés entre des poteaux de coin et des poteaux intermédiaires – traités en pilastres – et ce, sur les quatre faces; au sommet, il y a un auvent de pour tour qui, jusqu’à une récente dépose, était dominé par une balustrade de couronnement. À l’intérieur, le plafond est fait de planchettes. Le carré maçonné renferme l’émergence d’un rocher. Le pavillon de thé témoigne de toutes les phases marquantes de l’occupation des Papineau et, notamment, celle qui précéda la vente du domaine alors qu’il servait de lieu de détente où on prenait le thé durant la belle saison.

Gustave Papineau, l’un des fils de Louis-Joseph, décéda au manoir en décembre 1851 et fut inhumé dans l’église paroissiale. Ce deuil fit germer dans l’esprit de Louis-Joseph et d’Amédée Papineau l’idée d’un mausolée familial, l’actuelle chapelle funéraire*. Celle-ci fut construite en pierre en 1853-1854, dans un style alors qualifié de « gothique rustique ». En témoignent les contreforts d’angle qui flanquent la façade, la baie de porte en arc brisé de même que la conception de la charpente qui intègre soit l’arc brisé, soit la fausse clé pendante, ainsi que la facture du décor plâtré qui est omniprésent (culs-de-lampe, consoles, statuettes, tableaux en relief, colonnes, etc.). Le chantier de construction de la chapelle a été supervisé alternativement par Louis-Joseph Papineau et son fils Amédée, d’après les plans de ce dernier.

Les membres de six générations de Papineau ont été inhumés soit dans la crypte, soit dans le cimetière extérieur. Les divers travaux d’entretien réalisés au XXe siècle n’ont pas entamé l’intégrité de cette construction exceptionnelle. La chapelle funéraire traduit concrètement une symbiose entre le concept de famille seigneuriale et celui de la seigneurie, une symbiose telle que la dépouille de Joseph Papineau, celui grâce à qui la Petite-Nation avait commencé d’exister, y fut transportée depuis Montréal, là où les Papineau avaient pourtant pris racine, pour soutenir la symbolique de la « famille fondatrice » de la dynastie des seigneurs.

L’édifice a conservé intact tout son mobilier meublant : un autel néo-gothique et ses accessoires, un grand nombre de statues majoritairement en plâtre, des compositions en plâtre en haut-relief et des plaques funéraires. Confiée en 1974 aux soins d’Héritage Canada, la chapelle funéraire a été classée bien culturel l’année suivante. Un organisme du milieu, la Société historique Louis-Joseph-Papineau, a charge de l’édifice et l’ouvre aux visiteurs.

Le kiosque (ancien campanile), dont la structure, la forme et même la fonction proviennent directement des ouvrages d’Andrew Jackson Downing, date de 1880. C’est à l’instigation d’Amédée Papineau qu’il fut d’abord érigé dans le voisinage immédiat du manoir, à l’angle nordest, mais en tant que campanile pour loger la cloche de la première église offerte à la fabrique par Louis-Joseph et Julie Papineau en 1821. Ce campanile et sa cloche scandèrent la vie du manoir jusqu’en 1903 au moins, c’est-à-dire jusqu’à la mort d’Amédée Papineau. Le campanile fut déménagé à l’angle nord-est de la pelouse frontale du manoir en 1929-1930. On lui a adjoint un banc rustique, lui attribuant ainsi une fonction de kiosque.

Près de l’actuel portail d’entrée nord-est qui donne accès au domaine, la maison du jardinier* – cette « chaumière gothique », comme se plaisait à l’appeler le fils aîné de Papineau – fut édifiée en brique, en 1855, pour servir de logis au jardinier qui contrôlait l’accès au domaine. Elle revêt l’allure d’un cottage anglais, tel qu’il était de bon ton d’en construire à l’époque.

Louis-Joseph Papineau s’était intéressé dès 1852 à sa construction pour en faire peut-être, une maison de location. Il se ravisa pour fournir plutôt un logis au jardinier tout en situant cette demeure à l’entrée du parc pour contrôler l’accès au domaine. À cette époque, il avait déjà arrêté son choix quant au type de fenêtre qu’aurait la maison : des châssis vitrés à résille de petits bois en oblique pour enchâsser des verres en losange, à l’instar de ce qu’il avait vu en Angleterre. Au dehors, le carré de la maison a peu changé. Certains membres de la famille Papineau yont vécu de manière sporadique. À compter de 1930, l’intérieur du bâtiment fut réhabilité par le Seigniory Club pour y loger le directeur général du club privé et sa famille, et une cuisine fut ajoutée en annexe. Cet usage s’est perpétué jusqu’à nos jours, ce qui explique que la maison n’a pas été incluse dans le transfert de propriété intervenu en 1993.

L’écurie* actuelle est une construction postérieure à 1963, dont seul le carré maçonné inférieur remonte au temps des Papineau. Ce niveau inférieur servait d’étable pour les bêtes à cornes. L’écurie actuelle serait la troisième à avoir été édifiée sur le même emplacement.

Les ressources archéologiques

Les ressources archéologiques du lieu étayent concrètement les temps forts de l’objectif de commémoration. Ainsi, l’évolution architecturale du manoir au temps de Louis-Joseph Papineau est documentée au plan archéologique par des éléments de l’infrastructure du bâtiment, de même que par des contextes stratigraphiques et des artefacts situés à proximité (dépotoir et autres sites).

De nombreux indices archéologiques subsistent encore dans le périmètre du lieu historique national et ses environs, qui attestent la conception que le seigneur Louis-Joseph Papineau se faisait de son domaine. Les vestiges de l’évolution et de l’utilisation du hangar à grains, de la maison du jardinier* et de sa remise*, de la chapelle funéraire* (avec son cimetière*) ou de la construction de bâtiments aujourd’hui disparus, tels la maison du meunier*, un moulin*, la maison de ferme* située près de l’entrée du pacage des chevaux*, une cabane à sucre*, des granges*... témoignent de cet aspect.

La serre construite par Louis-Joseph Papineau sur le mur sud du manoir témoigne pour sa part de l’intérêt qu’il portait à l’horticulture et, par ricochet, de l’importance qu’il accordait à l’aménagement paysager de son domaine.

D’ailleurs, de nombreuses ressources archéologiques relèvent de l’aménagement paysager du site (vestiges de chemins, d’allées, de sentiers, d’escaliers; vestiges de ponts et de ponceaux*, de prairies*, de clôtures* et de portails*; vestiges de jardins, de plates-bandes, d’un jet d’eau, d’une « grotte », de bassins à castors et à poissons, d’une digue et d’une cascade, de systèmes de drainage, etc.).

Enfin, d’autres ressources archéologiques révèlent certains aspects de la vie de la famille Papineau au domaine. Les recherches réalisées à ce jour indiquent que le site a fait l’objet d’un entretien minutieux par la famille Papineau dans la seconde moitié du XIXe siècle. Cela dénote sans doute le souci de projeter une « image de marque » aux visiteurs tout comme aux habitants de la seigneurie et de la région. On peut donc présumer qu’il existait sur le domaine plusieurs dépotoirs où l’on disposait des déchets et des rebuts. Par ailleurs, plusieurs fosses* réparties dans le boisé au nord-est du manoir pourraient avoir servi de lieux d’enfouissement pour le contenu des latrines qui étaient vidangées régulièrement avant l’installation des toilettes à eau à la fin du XIXe siècle.

Des vestiges architecturaux et stratigraphiques sont également témoins de certains aspects du mode de vie aisé, antérieur à l’apparition des « commodités » modernes, et de fonctions essentielles à la vie quotidienne. On peut citer en exemple les imposantes ruines de maçonnerie de la glacière située au nord-est du manoir. On doit également penser aux ressources associées à l’utilisation, après la mort de Louis-Joseph Papineau, des bâtiments et des aménagements existants, ainsi qu’aux constructions (musée, pavillon de thé, campanile/kiosque, annexe au manoir) et aménagements (sentiers, plantations, fontaine) qui s’ajoutent alors, notamment sous l’impulsion d’Amédée Papineau. Enfin, les ressources liées au chauffage, à l’éclairage, à l’approvisionnement en eau et aux égouts, tous des services essentiels à la vie au ma-noir, ne doivent pas être négligées.

La collection archéologique comprend pour sa part des matériaux de construction, dont certains, altérés par le feu, témoigneraient de l’incendie de 1892, des pièces de quincaillerie, des objets et matériaux associés à l’alimentation (vaisselle, contenants en terre cuite et en grès, bouteilles...), à l’horticulture (pots, échantillons de terre et de végétaux), à l’hygiène et aux loisirs. Certains éléments de la collection documentent les abords du manoir : la serre adossée à son mur sud, la glacière, le jardin situé au sud du chemin du cap et la zone qui sépare le manoir du hangar à grains.


Le patrimoine ethnologique

On a identifié d’importantes collections d’objets et d’archives qui ont marqué la vie au manoir à l’époque de Louis-Joseph Papineau et surtout aux confins des XIXe et XXe siècles. Bon nombre de ces objets, toujours propriété de descendants de la famille Papineau, de collectionneurs et d’antiquaires, ont été offerts à Parcs Canada pour acquisition. Par ailleurs, plusieurs objets provenant du manoir se retrouvent dans des institutions ou des musées et sont disponibles pour des fins d’emprunt ou de reproduction.

Jusqu’à ce jour, plus de 800 objets provenant de ces diverses collections ont été inventoriés. Ces objets permettent de recréer le contexte d’une vie de famille dans un manoir seigneurial. Les artefacts nous aident à comprendre le contexte mobilier de l’ensemble du rez-de-chaussée et d’une partie de l’étage, avec maints détails des accessoires (tableaux, argenterie, verrerie, objets personnels) de cette résidence bourgeoise.

D’autres pièces sont répertoriées à divers endroits dans l’hôtel Château Montebello, notamment deux statues (un « Indien » et une « Diane ») qui ornaient jadis la porte d’entrée du Musée et faisaient partie de l’aménagement paysager du site. On compte également 33 objets qui appartiennent ou sont déposés à la Société historique Louis-Joseph-Papineau à Montebello.

La collection de Parcs Canada est composée, pour sa part, de mobilier, d’accessoires, d’éléments décoratifs et de pièces vestimentaires provenant du lieu. La collection compte en outre certains documents (affiches, cartes, cadastres) qui témoignent, entre autres, de la gestion de la seigneurie. Présentement, la collection compte 74 objets associés à l’objectif de commémoration. Un lot de 482 objets (pièces de mobilier, luminaires, oeuvres picturales, tapis, draperies, miroirs, bibelots, articles reliés à la lecture, l’écriture, les travaux manuels), ne peut être associé, pour le moment, à l’objectif de commémoration et est identifié comme un ensemble de biens ayant appartenu au Seigniory Club. La valeur de cet ensemble reste à déterminer.


1.3 Les messages d’importance historique nationale (niveau 1)

Au lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, les messages d’importance historique nationale s’articuleront autour de cinq volets fondamentaux qui découlent directement de l’objectif de commémoration énoncé précédemment. Ces messages, d’ordre général, s’adresseront d’abord au grand public et s’expriment comme suit :

  • La vie et l’oeuvre de Louis-Joseph Papineau, après qu’il eut quitté l’avantscène politique, s’inscrivent dans la poursuite de ses idéaux, de sa pensée et de ses goûts.
  • L’architecture du manoir Papineau est le reflet des ambitions sociales, des goûts et de la personnalité de Louis-Joseph Papineau.
  • Le domaine de « Monte-Bello » a été conçu et développé par Louis-Joseph Papineau à l’image d’un domaine idéal.
  • Louis-Joseph Papineau voyait dans le régime seigneurial l’un des fondements de l’identité canadienne-française.
  • La famille Papineau a joué un rôle significatif dans la constitution du domaine.

Pour mieux faire comprendre aux visiteurs du lieu les messages d’importance historique nationale énoncés précédemment, ces derniers seront développés en fonction des éléments suivants :

  • Le rôle de Louis-Joseph Papineau en tant que défenseur de la culture et des institutions canadiennes-françaises.
  • La valeur symbolique du manoir et de ses dépendances en rapport avec la tenure seigneuriale.
  • Les idées de Papineau sur le régime seigneurial.
  • Le contexte de l’abolition du régime seigneurial.
  • Louis-Joseph Papineau, penseur et homme cultivé du XIXe siècle, tel que le reflète l’importance et la diversité de sa bibliothèque.
  • Louis-Joseph Papineau et la localisation du domaine.
  • Les principes d’aménagement paysager de l’époque qui ont inspiré Papineau.
  • La valeur esthétique attribuée au milieu physique du domaine par Papineau; les caractéristiques stylistiques et fonctionnelles des différentes composantes du domaine.
  • Le concept architectural du manoir : l’unicité de cette composition pittoresque; les caractéristiques stylistiques du manoir et l’organisation des espaces intérieurs.
  • L’exploitation de la seigneurie de la Petite-Nation par Papineau.
  • Les rapports entre Papineau et sa famille immédiate dans l’aménagement du domaine.
  • La transmission du domaine par Papineau.

Carte 2 : Manoir Papineau - Repère des principales ressources culturelles

Location of the Main Cultural Resources
Carte 2 : Manoir Papineau - Repère des principales ressources culturelles — Version texte

Cette carte indique l'emplacement des ressources culturelles du lieu historique national du manoir Papineau. Les ressources répertoriées comprennent des sites archéologiques, des dépendances et le manoir.

Les défis de communication

La communication des valeurs patrimoniales du lieu au moyen d’un programme d’interprétation et de diffusion externe axé autour de thèmes spécifiques est au coeur de la problématique du projet de mise en valeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. En effet, la notoriété de Louis-Joseph Papineau – on le connaît d’abord comme chef des Patriotes et homme politique, et, dans une moindre mesure, comme seigneur de la Petite-Nation – tend à imprégner l’histoire du lieu.

Les recommandations de la Commission des lieux et monuments historiques du Canada indiquent clairement que la carrière politique de Papineau devrait être commémorée sur l’emplacement de sa maison, rue Bonsecours à Montréal, alors que la vie de Papineau après qu’il ait quitté l’avant-scène politique serait présentée à Montebello. Il n’en demeure pas moins que Papineau, après 1846, est toujours le même homme et qu’il a conservé ses idéaux politiques et sociaux. Pour le grand public comme pour le visiteur, il est fondamental de saisir cette continuité sans toutefois s’y attarder.

Le message à l’égard de l’architecture est relativement complexe. Ce sera un défi de taille de faire comprendre en quoi l’architecture du manoir est le reflet des ambitions sociales, des goûts et de la personnalité de Papineau sans pour autant occulter le rôle de la famille ou encore négliger l’influence de Papineau et de la famille dans la constitution du domaine.

Une difficulté majeure au manoir Papineau consistera, par ailleurs, à faire ressortir les multiples facettes de cet homme qui s’est illustré dans des domaines aussi diversifiés : architecte d’un manoir de grande envergure, concepteur d’un domaine idéal, homme de culture, grand défenseur du système seigneurial et de la nation canadienne-française, père d’une famille éminente...

Enfin, il faudra initier le visiteur aux concepts de « domaine seigneurial » et de « seigneurie » et établir leur rapport avec le site actuel qui constitue aujourd’hui le lieu historique national.

En somme, la problématique de la présentation de l’histoire du lieu réside, pour une large part, dans le recours à une approche de communication qui respecte l’esprit du lieu tout en répondant aux principales attentes des visiteurs.


1.4 Les autres valeurs patrimoniales du lieu (niveau 2)

Plusieurs ressources et autres valeurs patrimoniales, bien que n’étant pas reconnues d’importance historique ou architecturale nationale, n’en revêtent pas moins une signification importante pour le lieu; ces ressources et ces valeurs sont dites de « niveau 2 ». Seules sont comprises dans cette énumération les ressources situées en par-tie ou totalement sur le territoire cédé à bail à Parcs Canada.

L’histoire récente du site : l’ère du Seigniory Club

L’ancien domaine seigneurial, hormis la chapelle funéraire et son enclos, fut l’objet d’une vente à l’encan en septembre 1929. L’acquéreur revendit le tout à « Lucerne-in-Québec Community Association Limited ». C’est désormais dans le contexte d’un complexe de villégiature à caractère privé que le ma-noir et ses dépendances allaient continuer leur évolution. L’établissement prit le nom de « Seigniory Club Community Association Limited » dès 1933. Le Canadien Pacifique se porta acquéreur du complexe en 1949.

L’intervention du Seigniory Club, à compter de 1929-1930, a modelé le domaine de Monte-Bello de manière significative par la construction de l’hôtel en bois rond, le « Log Château », et de ses dépendances, ainsi que par l’aménagement d’une cité-jardin dans l’ancienne portion non habitée du domaine. S’inscrivant dans le contexte du développement de la villégiature au Canada, la présence de l’hôtel favorisa l’essor de l’industrie touristique dans la région.

Les éléments les plus significatifs qui témoignent de la présence du Seigniory Club sont situés hors des limites du lieu historique national puisqu’il s’agit de l’hôtel « Le Château Montebello » et de ses principales dépendances. Sur le site, seuls les aménagements paysagers que le Seigniory Club a créés sont évalués de niveau 2, en raison surtout de leurs valeurs historiques associatives et physiques. En effet, le Seigniory Club a conservé en grande partie l’aménagement hérité des Papineau, comme en témoignent de nombreux vestiges archéologiques; l’ensemble fut cependant banalisé par la transformation extensive du jardin potager en pelouse et par un décor floral moins varié que celui qui prévalait jusque-là.

Sur le cap, les interventions du Seigniory Club sont perceptibles dans le fait qu’on y a dallé des sentiers ou qu’on en a créé de nouveaux. Dans les escarpements du cap, ceux du sud surtout, le Seigniory Club a procédé à la mise en place de murs de soutènement pour aménager des terrasses et des sentiers ou, plus simplement, pour stabiliser des terrasses et des sentiers déjà existants. Au pied du cap et dans le parc, on a tracé des chemins de promenade et des pistes équestres. Dans la zone limitrophe du lieu historique, la période du Seigniory Club se traduit par la présence des portails et de leur poste de contrôle, soit à l’entrée de l’allée seigneuriale, soit à l’extrémité ouest du chemin du cap.

Le Seigniory Club modifia également l’architecture interne du manoir. De résidence familiale, le manoir devint un bâtiment de loisir et d’agrément pour les nouveaux châtelains, les membres du club. C’est au plan de l’aménagement de l’espace intérieur et de la décoration que le manoir témoigne de l’époque du Seigniory Club : les pièces du rez-de-chaussée furent ornées de frises, de moulures et coupoles, créant ainsi une atmosphère de luxe qui détonnait avec celle, plus austère, voulue par Papineau; à l’étage, une salle de bal a remplacé la plupart des chambres; au soubassement, une salle de billard et une fausse taverne élisabéthaine ont fait disparaître les chambres des domestiques et une partie de la cuisine et des pièces de service.

Les ressources culturelles associées à la paléohistoire

La présence d’Amérindiens sur le lieu à l’époque paléohistorique a été confirmée dans au moins deux emplacements distincts (83G1B et 83G1C). La présence d’artefacts Footnote 13 laisse entrevoir la possibilité qu’on y ait façonné des objets lithiques.

Ces indices soulignent la possibilité que d’autres secteurs du lieu historique national puissent comporter des vestiges d’une telle occupation.

Les liens avec la collectivité régionale et locale

Depuis 1935, l’ancien musée familial des Papineau a été converti en lieu de culte anglican. La chapelle Christ Church se joint ainsi aux églises St-Mathew’s et Holy Trinity au sein de la paroisse anglicane de Grenville-Calumet-Montebello.

Par ailleurs, le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau entretient des liens de collaboration avec de nombreux individus et organismes dont plusieurs ont jusqu’ici joué un rôle appréciable dans la promotion, la protection et la mise en valeur du lieu.

Le principal partenaire de Parcs Canada est l’hôtel Fairmont – Le Château Montebello avec lequel l’agence partage des activités de protection des ressources. Héritage Canada, propriétaire de la Chapelle funéraire, confie la gestion du lieu à la Société historique Louis-Joseph-Papineau. La municipalité de Montebello, via la Corporation de la Gare de Montebello, participe à la promotion et à la commercialisation du site. L’Association touristique de l’Outaouais agit également en tant que partenaire dans la promotion du lieu. En-fin, les descendants de la famille Papineau (Mmes Renée et Jacqueline Papineau de même que Mme Anne Bourassa) se sont avérés de précieux collaborateurs dans l’acquisition de connaissances sur la famille Papineau. L’apport et le rôle de chacun de ces partenaires contribuent à nourrir le sentiment d’appartenance de la communauté au lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau.

Autre commémoration

Le manoir Papineau et la chapelle funéraire sont, depuis 1975, des biens culturels classés sous l’égide de la Loi sur les biens culturels du Québec.

Les réseaux national et régional

Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau fait partie intégrante du réseau des lieux historiques nationaux, d’où sa valeur comme élément commémoratif des volets du patrimoine associés aux grands hommes politiques canadiens.

Le lieu s’intègre par ailleurs à un ensemble de ressources patrimoniales régionales, dont le Château Montebello (Réseau des hôtels du patrimoine), la Gare de Montebello, la maison d’Henri Bourassa, l’église et le presbytère de Montebello, le parc de Plaisance (gouvernement du Québec), le site historique des chutes de Plaisance ainsi que le centre d’interprétation du patrimoine de Plaisance.

En raison de différents aspects de sa thématique, le lieu historique national est en outre associé à d’autres sites historiques. On peut citer, entre autres, pour la thématique du régime seigneurial, le lieu historique national du Canada du Manoir-Mauvide-Genest, sur l’île d’Orléans, le moulin de l’île Perrot, le manoir Dionne de Saint-Roch-des-Aulnaies, le manoir Joly-De Lotbinière, le manoir Rouville-Campbell de Mont-Saint-Hilaire et le manoir Hazen, d’Iberville. La résidence montréalaise de Papineau, rue Bonsecours (lieu historique national du Canada Louis-Joseph-Papineau), ainsi que la « Maison nationale des Patriotes », à Saint-Denis, concourent au thème de l’homme politique. Au plan de l’aménagement paysager, il convient de souligner les domaines Cataraqui et Bois-de-Coulonge à Sillery de même que le domaine du Château Dundurn (lieu historique national) à Hamilton.


2.0 Analyse de l’état actuel

2.1 État de propriété

Dans la foulée de l’entente intervenue entre Parcs Canada et la Corporation hôtelière Canadien Pacifique (Fairmont – Le Château Montebello) en 1993, les terrains englobant le cap Bonsecours ainsi que des parcelles situées de part et d’autre de l’allée seigneuriale et du chemin du cap ont été cédés à Parcs Canada sous emphytéose jusqu’en 2035. La chapelle funéraire et le cimetière attenant sont demeurés sous la juridiction d’Héritage Canada alors que Fairmont – Le Château Montebello a conservé la maison du jardinier de même que certaines parcelles de terrain jugées nécessaires à la poursuite de ses opérations. Quelques bâtiments anciens, tout comme certains secteurs à fort potentiel archéologique, échappent donc à la juridiction de Parcs Canada.


2.2 État de l’intégrité commémorative du lieu

Comme il a été défini au chapitre précédent, l’un des objectifs fondamentaux inhérents au concept d’intégrité commémorative est atteint lorsque les ressources qui symbolisent ou caractérisent l’importance historique nationale d’un lieu ne sont ni détériorées ni menacées. Les pages qui suivent dressent sommairement un portrait de la situation actuelle en ce qui a trait aux ressources et aux paysages culturels liés à l’objectif de commémoration du lieu ainsi qu’à la communication des messages d’importance historique nationale.

État du paysage et des ressources culturels de niveau 1

Le paysage culturel

Le paysage culturel du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau est fondé sur une organisation spatiale datant de l’époque des Papineau, sur un style d’aménagement « pittoresque » et sur une relation étroite entre ces aménagements et la géographie du lieu.

De nos jours, le paysage a conservé son armature d’origine; cependant, plusieurs composantes de poids sont situées à l’extérieur de la propriété transférée à Parcs Canada, notamment l’entrée du domaine, la maison du jardinier, la chapelle funéraire, l’écurie, la prairie de la grange et le rivage. Sur le cap Bonsecours, la nature a progressivement reconquis ses droits, une végétation de plus en plus envahissante obstruant aujourd’hui les points de vue vers la rivière des Outaouais et la prairie de la grange. Certaines interventions postérieures à l’occupation par les Papineau ont par ailleurs altéré le paysage; l’asphaltage et le réalignement du chemin du cap, l’élimination de la haie et du chemin au sud du manoir, l’aménagement de courts de tennis dans l’espace occupé jadis par la prairie de la grange, en sont des exemples. Bien que de nombreux grands arbres continuent de projeter leur ombre sur les pelouses, les riches plates-bandes de fleurs ainsi que les jardins potagers qui longeaient le chemin du cap, du côté de la rivière, ne sont plus qu’un souvenir et, dans l’ensemble, le domaine, dépouillé de tout son mobilier et de ses ornements extérieurs, a perdu le charme rustique et pittoresque perceptible sur les photographies anciennes.


Le patrimoine bâti

L’état dans lequel le manoir et ses dépendances nous sont parvenus résulte de plusieurs transformations apportées au fil des utilisations, sans, toutefois, que ces modifications en aient gravement compromis l’intégrité. Physiquement parlant, l’état de conservation des bâtiments varie : le manoir, suite aux récents travaux de conservation/restauration, est en bon état, le hangar à grains nécessite des travaux de conservation, le musée doit être reconverti quant à son usage tandis que la survie du pavillon de thé est menacée. Somme toute, d’importants travaux s’impo-sent encore pour permettre une remise en état complète du lieu et pour atteindre l’intégrité commémorative.

Le manoir seigneurial a conservé sa morphologie originelle, mais son apparence extérieure a été altérée suite à diverses réparations. En 1979, la toiture principale a été renouvelée, le revêtement des tours octogonales remplacé et le carré principal, avec sa tour carrée, a été recouvert de crépi puis peint de couleur. Exécutés en situation d’urgence, ces travaux ont remédié à certains problèmes d’infiltration d’eau, mais parce qu’ils étaient fondés sur des connaissances historiques insuffisantes, ils ont été réalisés sans respecter entièrement l’intégrité du bâtiment.

Avant que les premiers travaux de conservation/restauration ne soient entrepris, en 1999, le manoir seigneurial présentait d’importantes déficiences techniques. Essentiellement, on constatait que :

  • Les fondations de maçonnerie de pierres devaient être restaurées et qu’il était impératif d’effectuer un drainage périmétrique, les infiltrations d’eau à ce niveau ayant endommagé la structure du plancher du soubassement. Les huisseries et boiseries extérieures des fenêtres, surtout du côté sud et sur les tours d’angle, étaient en très mauvais état. La tour de l’est accusait un déversement important en raison des modifications apportées à la structure, en 1930. La tour des latrines montrait aussi une propension au déversement et sa toiture devait être refaite. Le salon hors-oeuvre de 1880 présentait des défaillances sérieuses au niveau de sa toiture, de ses murs de brique recouverts de crépi et de ses menuiseries. L’eau avait gravement endommagé les souches des cheminées ainsi que les cheminées elles-mêmes. La véranda, avec son escalier et son garde-corps, portait des marques de détérioration importantes.
  • À l’intérieur, on notait que les espaces de service du soubassement avaient été complètement transformés; un dallage avait remplacé les planchers de bois et une chaufferie occupait une partie de l’espace originel de la cuisine. Le rezde-chaussée avait été « redécoré » avec l’ajout de quelques plafonds, d’un nouveau plancher de bois, de cabinets de chauffage architecturaux et de moulures; mais, hormis les papiers peints, presque entièrement disparus, l’aménagement des espaces et leur ornementation avaient été conservés en grande partie.
  • L’installation des systèmes électromécaniques en 1930 avait endommagé plusieurs pièces de charpente dans tout le bâtiment. Ces systèmes ne répondaient pas aux normes en vigueur en matière de sécurité et de confort.

Les travaux exécutés depuis lors ont permis de corriger en bonne partie toutes ces déficiences (voir La conservation et la mise en valeur du lieu). Par contre, à l’étage des chambres, non touché par les travaux de 1999, la configuration du plan originel a été grandement modifiée quand, en 1930, une partie du long hall-corridor et plusieurs chambres ont été remplacées par une salle de bal. Toutes les menuiseries d’origine, incluant le plancher, ont aussi été renouvelées. En ce qui concerne le toit, la charpente, altérée par l’aménagement de la salle de bal, doit être consolidée.

Le hangar à grains a fait l’objet de travaux d’urgence en 1998. La conservation des épures à la fresque peintes sur les murs et plafond constitue un problème délicat; des travaux de stabilisation ont été effectués pour limiter leur détérioration, mais une restauration complète reste à entreprendre. La toiture métallique, fortement détériorée, permettait les infiltrations d’eau; elle a dû être temporairement recouverte d’une membrane d’étanchéité.

La construction en maçonnerie de briques sur fondation de pierre est en général bien conservée; des réparations sont toutefois requises. En façade, l’escalier d’entrée et le petit balcon de l’étage sont en mauvais état tan-dis que l’escalier de bois qui courait le long du mur pignon nord est disparu.

Le musée familial est un bâtiment en très bon état, hormis la façade de pierre qui se détache du mur gouttereau de brique. La toiture surhaussée et les travaux de rénovation intérieurs ont cependant altéré l’intégrité de l’édifice.

De toutes les constructions qui subsistent, le pavillon de thé, dans un état de dégradation avancé, est de loin le plus menacé; il demeure jusqu’à maintenant récupérable, mais les infiltrations d’eau continuent d’endommager tout le mur extérieur en bois, du côté de la rivière; des travaux sont nécessaires avant que tout le pan de mur soit emporté.

Enfin, soulignons que la structure du kiosque (ancien campanile) ainsi que sa toiture en bardeau présentent des signes de pourriture.


Les ressources archéologiques

De façon générale, les ressources archéologiques sont dans un bon état de conservation, particulièrement les anciens aménagements paysagers (1850-1930) localisés autour du manoir (chemin du cap, allée seigneuriale, chemin de ceinture, allée gravillonnée entre le manoir et le hangar à grains, allée menant au campanile, anciennes fontaines, système d’alimentation en eau et de drainage, etc.). Cette situation s’explique par le fait que le Seigniory Club, propriétaire des lieux à compter de 1930, ne les a pas détruits, mais plutôt recouverts d’une couche de sol sur laquelle les nouveaux aménagements ont été réalisés.

L’érosion naturelle a toutefois considérablement détérioré le secteur sis à l’ouest du pavillon de thé actuel, où l’on avait aménagé une aire de repos dans la seconde décennie du XXe siècle (la terrasse du cadran solaire et le sentier d’origine, situés à la base de l’escalier permettant d’accéder à l’aire de repos,ont en effet entièrement disparu). À l’ouest de l’aire de repos, des traces du sentier gravillonné menant au jardin ont néanmoins relativement bien résisté aux outrages combinés du temps et de la nature. Tout ce secteur a cependant été envahi par une végétation luxuriante au cours des dernières années, occultant les anciens aménagements.

Les vestiges imposants et relativement bien conservés de la glacière en pierre construite au nord de l’allée seigneuriale, dans la dernière courbe avant d’arriver au manoir, sont envahis par les racines de plusieurs arbres ayant poussé le long des murs et à l’intérieur même de l’ouvrage, racines qui menacent de disloquer la maçonnerie. Mentionnons, enfin, que la portion nord du jardin des Papineau, au sud-ouest du manoir, a été en grande par-tie détruite lors d’aménagements paysagers réalisés par le Seigniory Club.

La collection archéologique se compose pour sa part de quelque 4 000 objets et écofacts divers récupérés lors des fouilles et autres interventions menées par Parcs Canada. Tous les traitements préliminaires ont été effectués (enregistrement, nettoyage, étiquetage et numérotage) et l’inventaire sommaire est complété. L’analyse de ce matériel reste toutefois à entreprendre.


La collection ethnologique

La collection ethnologique se compose de 800 objets ayant appartenu à la famille Papineau. Tous les objets ont reçu un traitement de base (catalogage et étiquetage) et l’inventaire a été complété. Cependant, 256 objets restent cependant à documenter.

L’état physique de cette collection va de « très bon » à « passable ». Des soins particuliers d’entreposage et de monitoring s’avèrent nécessaires pour leur préservation, étant donné les matériaux qui les composent (meubles de placage, textiles, oeuvres sur toiles, sur papier, sur papier argentique, objets de métal, etc.). Une grande partie de ces objets, en particulier les meubles, ont été ou seront l’objet d’une restauration dans un avenir rapproché compte tenu de leur valeur de commémoration.

Carte 3 : Manoir Papineau - État actuel

Current Status 
Carte 3 : Manoir Papineau - État actuel — Version texte

Cette carte montre l'état actuel des ressources culturelles de niveau 1 du site.


Communication des messages d’importance historique nationale

Après avoir été fermé au public au cours de la saison 2000, en raison des travaux de conservation/restauration, le manoir Papineau a rouvert ses portes à l’été 2001. Jusqu’à présent, les efforts de mise en valeur ont surtout porté sur l’évocation du milieu de vie des Papineau par le biais de la décoration et l’ameublement du « noble étage ». Les visiteurs peuvent présentement effectuer une visite guidée du manoir (rez-de-chaussée seulement) où l’accent est mis sur l’historique de l’édifice et de son occupation ainsi que sur la vie quotidienne au temps des Papineau.

Une petite exposition thématique provisoire portant sur la seigneurie de Montebello a par ailleurs été aménagée au rez-de-chaussée du hangar à grains; pour des raisons de sécurité, l’ancien atelier de Napoléon Bourassa n’est toujours pas accessible au public. Si la chapelle funéraire peut être visitée en compagnie des guides de la société d’histoire Louis-Joseph-Papineau, le pavillon de thé, lui, n’est pas ouvert aux visiteurs. L’ancien musée familial, principalement réservé au culte, est accessible au public lors des présentations-causeries organisées par les guides-interprètes de Parcs Canada. En somme, les installations et les services d’interprétation in situ demeurent encore limités et incomplets Footnote 14.

Il est à noter, par ailleurs, que les changements d’utilisation survenus dans le cas du musée familial et du hangar à grains, conjugués aux modifications profondes qu’ont subi les aménagements paysagers, font en sorte que ces ressources ont perdu leur signification en tant qu’ensemble cohérent et qu’elles ne réussissent pas à appuyer comme elles le devraient la communication de la thématique de commémoration.

Enfin, soulignons que les efforts de diffusion externe se sont essentiellement opérés jusqu’à présent via la mise en ligne, en 1999, d’un site Internet.


2.3 État de l’environnement

Un inventaire biophysique du domaine Papineau a été réalisé en 1994, qui décrit l’environnement naturel de la propriété et formule des recommandations quant à sa protection. L’inventaire fait ressortir que le lieu historique est situé dans une région dont le climat de type tempéré est le plus clément du Québec. Le domaine bioclimatique est celui de l’érablière à tilleul et de l’érablière à caryer.

Après la fonte des derniers glaciers, l’Outaouais constituait un puissant cours d’eau qui a joué un rôle déterminant dans le façonnement du paysage. Comme elle est demeurée une rivière au lit étendu et de fort débit, elle a érodé les formes qu’elle avait précédemment édifiées de telle sorte que, sur la rive nord, on retrouve de nos jours un paysage étagé : d’abord les rives sablonneuses et peu accentuées qui accompagnent le cours d’eau, puis les reliefs précambriens qui flanquent la vallée à l’ouest et qui débutent à quelques centaines de mètres de la rive.

L’assise rocheuse du site fait partie d’une formation protérozoïque composée de marbre et de roche calcosilicatée. Cette roche affleure sur le cap Bonsecours qui est partiellement couvert de till glaciaire. Autour du cap, les dépôts se composent de sables charriés par la rivière actuelle, d’argile marine et de sables provenant d’un delta fluvio-glaciaire situé à proximité du village de Montebello. Seuls des régosols peu fertiles ont réussi à se développer sur ces dépôts relativement récents. Le site est traversé par le ruisseau Papineau dont l’embouchure se situe à l’extrémité est.

La forêt occupe plus de la moitié de la superficie du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. Elle présente une diversité exceptionnelle si l’on considère que, sur quelques centaines de mètres, on y rencontre quatre érablières, une prucheraie, une pinède ainsi que deux communautés de feuillus variés. Le boisé qui enserre le cap Bonsecours est dominé par des peuplements d’âges inégaux. Bien que cette forêt soit naturelle, elle n’a pas atteint un équilibre au terme d’une série évolutive. Elle résulte plutôt de perturbations naturelles et anthropiques qui ont affecté le site il y a plus d’un siècle.

On ne retrouve aucune espèce arborescente rare sur le site et, à cet égard, les arbres du lieu historique national sont représentatifs de la région écologique. Sur le plan individuel, plusieurs spécimens de chênes rouges, de peupliers deltoïdes et d’érables argentés ont atteint un âge et des dimensions respectables. Leur état de santé est excellent; toutefois, le verglas de janvier 1998 a affecté, à des niveaux variables, près de 80 pour cent des arbres. Malgré tout, seuls quelques arbres ont dû être éliminés en raison de la sévérité des dommages. Un inventaire des espèces de plantes en péril a été réalisé en 2002 au lieu historique national. L’inventaire a permis de déceler, à proximité de la chapelle funéraire, la présence d’une espèce figurant sur la liste des espèces susceptibles d’être désignées « menacée ou vulnérable » par le ministère de l’Environnement du Québec; il s’agit de la goodyérie pubescente (Goodyera pubescens), une orchidée typique des habitats de bois sec. Deux autres plantes, le carex de Gray et le carex massette, ont également été répertoriées; ces espèces ne sont pas présentement considérées comme vulnérables ou menacées au Québec, mais elles demeurent peu communes.

Pour leur part, les perturbations anthropiques se limitent aux aménagements paysagers avoisinant le manoir ainsi qu’à l’allée seigneuriale et aux sentiers qui parcourent le lieu.

La faune n’est pas très abondante sur le site. La position méridionale du lieu favorise l’abondance des espèces animales, mais l’ouverture des boisés restreint la qualité et le nombre des habitats. Il n’en demeure pas moins que plusieurs espèces d’oiseaux peuvent être observées ainsi que quelques petits mammifères comme le tamia rayé et l’écureuil gris. Le ruisseau Papineau constitue par ailleurs un habitat potentiel pour plusieurs espèces de poissons, d’amphibiens et de petits reptiles.


2.4 Fréquentation et utilisation par le public

La clientèle actuelle

Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau a accueilli en 2004 15 463 visiteurs. La dernière enquête effectuée auprès des visiteurs remonte à 1994, antérieurement à la restauration du manoir. À cette époque, près de sept visiteurs sur dix (68 %) étaient domiciliés au Québec. De ce nombre, 40 % demeuraient dans la région de Montréal et 16 % étaient originaires de l’Outaouais québécois. Les visiteurs en provenance de l’extérieur du Québec formaient donc 32 % de la clientèle. Celle-ci était composée en grande majorité d’adultes (78 %) plus scolarisés que la moyenne. Reflétant leur provenance, les visiteurs étaient francophones dans une proportion de 75 %.

La prochaine enquête auprès des visiteurs est prévue en 2005 et les résultats seront pris en compte lors de la prochaine révision du plan directeur.


L’offre de service actuelle

Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau est ouvert sur une base saisonnière, de mai à octobre. Un prix d’entrée est exigé des visiteurs; les clients séjournant au Château Montebello bénéficient cependant de la gratuité d’accès aux terrains en vertu d’une disposition du bail emphytéotique qui stipule que la clientèle de l’hôtel peut accéder gratuitement au site pour y pratiquer des activités de plein air Footnote 15.

Depuis sa prise en charge par Parcs Canada, en avril 1993, le lieu a fait l’objet d’améliorations ponctuelles ayant pour but d’offrir un minimum de confort aux visiteurs, d’assurer la sécurité du public, de fournir au personnel en place des conditions de travail acceptables et d’améliorer la qualité du séjour des visiteurs. Du point de vue du fonctionnement et des opérations, plusieurs ajustements ont été effectués : point de vente des billets, horaires et durée des visites, amélioration du contenu des messages communiqués au fil des progrès de la recherche historique et ethnographique, etc. Divers travaux de nature temporaire ont également été entrepris, tel l’aménagement de billetteries à la Gare de Montebello Footnote 16 et dans le hangar à grains ainsi que la construction d’un sentier reliant la gare à l’allée seigneuriale.

La capacité d’accueil du site dépend beau-coup, pour le moment, de la capacité d’accueil du manoir lui-même, qui constitue le coeur de la visite; le manoir agit à cet égard comme un goulot d’étranglement. Pour des motifs de sécurité, la capacité d’accueil du manoir est présentement limitée à 60 personnes simultanément à l’intérieur.

La localisation particulière du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, enclavé à l’intérieur des propriétés de Fairmont – Le Château Montebello et de la municipalité de Montebello, a constitué jusqu’à présent une contrainte majeure à l’accès et à la visibilité du site. L’accès traditionnel au manoir Papineau par le portail principal et l’allée seigneuriale est actuellement impossible du fait que les terrains sont clôturés et qu’ils sont situés en dehors des limites du lieu historique national; c’est d’ailleurs ce qui explique que l’accès au lieu a dû jusqu’ici s’effectuer à partir de deux points d’entrée localisés hors de la propriété de Parcs Canada.


L’accès par la Gare de Montebello

La Gare de Montebello sert de lieu d’accueil pour les visiteurs; de la gare, un sentier re-joint l’allée seigneuriale. Il est à noter que la Gare de Montebello joue également le rôle de centre d’informations touristiques pour l’association touristique de l’Outaouais. L’aire de stationnement est actuellement insuffisante à la Gare de Montebello et il n’y a pas de case réservée exclusivement aux visiteurs du lieu historique national. Par ailleurs, la distance qui sépare la gare du manoir couvre près d’un demi-kilomètre et aucun service de navette n’existe présentement.


L’accès par l’entrée du Château Montebello

Il est également possible d’accéder au lieu historique par le chemin asphalté (l’ancien chemin du cap) qui relie le complexe hôtelier au manoir. Cet accès est en principe réservé aux clients de l’hôtel, qui peuvent évidemment stationner leur véhicule sur les aires de stationnement du Château Montebello. Même si cet accès mentionne la présence du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, c’est par hasard que les promeneurs découvrent le site la plupart du temps.

Coopération

L’établissement d’ententes de coopération constitue l’une des stratégies de gestion prioritaires à Parcs Canada. Au lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, la coopération avec des organismes publics, privés ou à but non lucratif est une composante de la gestion du lieu qui s’est jusqu’à présent concrétisée sous diverses formes.


L’hôtel Fairmont – Le Château Montebello

L’hôtel Fairmont – Le Château Montebello constitue le premier interlocuteur de Parcs Canada à Montebello. Le bail emphytéotique qui lie Parcs Canada à l’hôtel détermine au plan juridique les rapports qu’entretiennent les deux organismes en termes de propriété, d’accès et de circulation des visiteurs. Un contrat de service a par ailleurs été négocié en vertu duquel le Château Montebello veille à l’entretien des terrains entourant le manoir et assure la surveillance des lieux.


La Société historique Louis-Joseph Papineau

La Société historique Louis-Joseph Papineau est également un associé de premier plan; la collaboration entre les deux organismes se situe au niveau de l’offre de services aux visiteurs de la chapelle funéraire et dans le partage de données historiques. Parcs Canada accorde au besoin un appui logistique à la société historique dans l’organisation de ses activités.


L’Association touristique régionale de l’Outaouais

L’Association touristique régionale de l’Outaouais (ATO) a conclu un protocole d’entente avec Parcs Canada et assure les services d’accueil et de billetterie pour le lieu historique dans ses locaux de la Gare de Montebello, où elle tient un bureau d’information touristique desservant plus particulièrement la sous-région « La Lièvre et la Petite-Nation ». Ce protocole aura cours tant et aussi longtemps que ces services pourront être dispensés par l’ATO.


La Municipalité du village de Montebello

La Municipalité du village de Montebello représente un précieux partenaire avec qui Parcs Canada échange des services au niveau de la prise en charge des visiteurs. C’est en effet sur les terrains de la municipalité que le stationnement temporaire du lieu historique est situé. Il en va de même pour la signalisation du site. Parcs Canada a apporté son soutien à la municipalité, plus spécifiquement à Corporation de la Gare de Montebello, dans l’aménagement de l’aire d’accueil des visiteurs à l’intérieur de la gare.


2.5 Le cadre touristique régional et le positionnement du lieu

Au coeur de la région touristique de « La Lièvre et la Petite-Nation », le tourisme, notamment le tourisme de villégiature de haut de gamme, et, grâce à la présence du Château Montebello, le tourisme d’affaires et de congrès, occupe le second rang dans l’activité économique, après l’industrie forestière.

À l’instar du Château Montebello, la région véhicule l’image d’une destination de nature et de repos, complétée par la pratique de diverses activités de plein air. On y distingue deux types d’offres de services touristiques : une première, dans la région immédiate de Montebello, où l’on retrouve hébergement et restauration haut de gamme, destinée à une clientèle de touristes plus fortunés; une seconde, dans l’arrière-pays de la Petite-Nation, où l’offre est plus diversifiée et intégrée à la grande nature (campings, gîtes du passant, etc.).

Le profil des touristes de la Petite-Nation n’est pas le même que celui de l’Outaouais en général; sans doute en raison de la présence du Château Montebello, qui totalise annuellement quelque 80 000 nuitées, on remarque une plus forte proportion de villégiateurs ainsi que la fréquentation d’hébergements commerciaux de luxe. Il n’y a donc pas « d’intégration » de la clientèle touristique de la Petite-Nation avec celle de la région de l’Outaouais.

Montebello jouit d’une bonne notoriété; le poids que représente l’hôtel de villégiature réputé du Château Montebello conjugué à la présence, depuis quelques années, d’un centre d’information touristique confèrent à Montebello le statut de « porte d’entrée de l’Outaouais », notamment pour le marché montréalais. Le bureau d’information touristique, opéré par l’Association touristique de l’Outaouais, reçoit quelque 50 000 personnes annuellement.

De son côté, le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau se positionne comme le seul lieu culturel et patrimonial digne de mention dans la région de « La Lièvre et La Petite-Nation » et on ne lui connaît aucun « site-concurrent » dans son créneau. Avec le Musée des civilisations de Gatineau et le domaine Mackenzie-King, le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau constitue l’un des principaux biens patrimoniaux de l’Outaouais.

La visite des lieux et les activités d’interprétation représentent une expérience significative capable de justifier qu’on y consacre une demi-journée dans un périple touristique ou excursionniste; combinées à la visite d’un attrait naturel, c’est une journée complète qui devra être prévue au programme des visiteurs. Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, le Château Montebello et la gare de Montebello forment, en somme, un pôle d’attraction touristique majeur à l’entrée de la région de l’Outaouais.

Comme dans plusieurs autres régions, l’industrie touristique a été identifiée ici comme étant l’un des secteurs économiques moteurs à privilégier. La région souhaite attirer plus de touristes « de destination » en élargissant l’éventail de ses produits et services touristiques et en dotant la région de la Petite-Nation d’une image de marque. Plusieurs intervenants s’intéressent de près au développement du tourisme régional, notamment :

  • la Municipalité régionale de comté (MRC) de Papineau via son schéma d’aménagement dans lequel le tourisme culturel tient une place de premier plan;
  • la Corporation de la Gare de Montebello, dont l’un des mandats est l’organisation d’événements touristiques;
  • l’Association touristique de l’Outaouais (ATO) qui a réalisé une refonte du plan de développement touristique de l’Outaouais;
  • le Centre local de développement Footnote 17, qui a participé à la réalisation d’outils de diffusion de l’information touristique régionale;
  • la Chambre de commerce « Vallée de la Petite-Nation » qui oeuvre à constituer un véhicule régional de concertation et de développement;
  • le Château Montebello, chef de file du tourisme de villégiature dans l’Outaouais;
  • la Société historique Louis-Joseph-Papineau qui gère la chapelle funéraire et oeuvre à la conservation et à la mise en valeur du patrimoine régional.

La conjoncture semble propice à l’amorce d’une concertation régionale pour le développement du produit touristique de la Petite-Nation.


3.0 La conservation et la mise en valeur du lieu

Bien que le site du manoir Papineau et de ses dépendances – à l’exception du pavillon de thé – soit dans un état de conservation acceptable et que l’intégrité de ces bâtiments ne soit pas gravement compromise, des travaux s’imposaient afin d’enrayer les processus de dégradation. Il aura également fallu intervenir pour réaménager le manoir, d’édifice résidentiel qu’il était, en édifice public, de façon à ce que le bâtiment puisse répondre à des normes rigoureuses en matière de protection incendie et de sécurité publique tout en satisfaisant aux exigences fonctionnelles de sa nouvelle vocation. La conversion du manoir et, pourrions-nous dire, du site dans son ensemble, avait déjà été entreprise par le Seigniory Club. Comme il a été souligné, certaines de ces interventions ont eu pour effet d’altérer l’intégrité du ma-noir tel qu’il apparaissait à la fin de sa période d’occupation par les Papineau.

Par ailleurs, même si le lieu fait déjà l’objet de quelque 15 463 visites annuelles (2004), des améliorations et des aménagements seront nécessaires pour exploiter le potentiel considérable qu’il recèle, de façon à ce que les visiteurs puissent en apprécier davantage la valeur patrimoniale et bénéficier ainsi d’une expérience plus enrichissante.

Compte tenu de l’importance patrimoniale du lieu, de l’ampleur et de la complexité du pro-jet, le parachèvement de la mise en valeur requerra des investissements substantiels. L’enveloppe budgétaire allouée originellement au projet étant insuffisante pour couvrir tous les coûts anticipés, il faut s’attendre à ce que le projet soit réalisé par phases sur un certain nombre d’années, au fur et à mesure que le financement requis sera disponible.


3.1 Concept de conservation et de mise en valeur

Le concept de conservation et de mise en valeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau ainsi que les orientations de gestion qui en découlent ont été arrêtés suivant les principes adoptés par Parcs Canada en matière de planification des aires patrimoniales.

Fondamentalement, la conservation et la mise en valeur s’articulent autour de l’objectif de commémoration défini pour le lieu, créant le lien entre les ressources qui caractérisent son importance historique nationale et les messages qui communiquent cette importance.

Le concept préconise que la mise en valeur du lieu soit réalisée en fonction d’une expérience globale de visite et qu’elle repose sur les caractéristiques fondamentales qui donnent au lieu son identité. C’est pourquoi le concept retenu exploite abondamment la notion « d’esprit du lieu », c’est-à-dire les impressions de grandeur et de dépaysement que le site évoque encore de nos jours ainsi que la présence toujours sentie de son créateur, Louis-Joseph Papineau, dont il veut révéler la mémoire.

Ce lieu, à l’abri des regards et dont les pierres gardent la mémoire des Papineau, a beaucoup à raconter. L’endroit est imprégné du souvenir de Louis-Joseph Papineau, seigneur-bâtisseur, « chef de colonie », père de famille, homme d’une grande culture. Il témoigne de ses goûts, de ses projets et porte encore, au-delà des ans, la marque de ses ambitions et de son désir d’implanter en ces lieux une véritable dynastie seigneuriale.

L’objectif de commémoration du lieu place donc d’emblée Louis-Joseph Papineau au coeur du projet de mise en valeur.

Par ailleurs, la mise en valeur du domaine Papineau veut raviver une activité touristique régionale traditionnelle, contribuant ainsi à raffermir la vocation de véritable lieu de destination de la région de la Petite-Nation.


3.2 Orientations et lignes directrices de gestion

Orientations visant à assurer l’intégrité commémorative du lieu

Les orientations qui suivent guideront les actions et les décisions stratégiques de Parcs Canada en matière de gestion des ressources culturelles de niveau 1 et de communication des valeurs patrimoniales, plus particulièrement en ce qui regarde les messages qui sont associés à l’objectif de commémoration du lieu.

Les orientations qui apparaissent en caractères gras sont considérées comme des indicateurs de l’état d’intégrité commémorative du lieu et figurent en tant qu’objectif à atteindre dans l’énoncé d’intégrité commémorative.


Le patrimoine bâti

Parcs Canada entend respecter les aménagements, les équipements et les bâtiments d’origine du domaine et assurer une forme de continuité historique dans l’organisation spatiale et dans l’attribution de nouvelles fonctions à ces éléments. Il compte en même temps assurer la conservation de l’ensemble des ouvrages historiques et maintenir leur intégrité architecturale en tenant compte, le cas échéant, des apports significatifs qui ont ponctué leur évolution.

Enfin, Parcs Canada entend mettre aux normes et rendre accessibles aux visiteurs les bâtiments et les espaces intérieurs essentiels à la bonne marche du programme d’interprétation. Bien que plusieurs interventions aient pu être réalisées dans le cadre d’une première phase de travaux, en 1999-2000, d’autres interventions ne pourront être entreprises que lorsque leur financement aura été acquis.


Le manoir

L’architecture du manoir – son caractère distinctif et unique ainsi que son pouvoir évocateur des goûts, des valeurs et des aspirations de Louis-Joseph Papineau – est étroitement liée à l’objectif de commémoration du lieu. Les qualités architecturales de l’édifice seront donc préservées et mises en évidence par des interventions appropriées de conservation et de restauration. Ces interventions veilleront avant tout à répondre aux objectifs poursuivis en matière d’intégrité commémorative. Ces objectifs sont au nombre de quatre :

  • protéger la structure et les caractéristiques externes de l’édifice qui traduisent différents apports stylistiques;
  • protéger le détail et la cohérence du fractionnement spatial, du décor menuisé et plâtré intérieur mis en place par les Papineau;
  • protéger et révéler l’arrangement spatial significatif de la tour de la bibliothèque;
  • protéger la relation visuelle et organique entre le manoir et le paysage qui l’entoure.

En accord avec l’énoncé d’intégrité commémorative, le concept de conservation et de restauration du manoir propose de rétablir l’intégrité historique de l’enveloppe, particulièrement en ce qui concerne les matériaux et les couleurs ainsi que les intérieurs, de manière à témoigner du projet de Louis-Joseph et d’Amédée Papineau et de l’occupation du manoir par la famille.

Entièrement accessible aux visiteurs, le rez-de-chaussée – « le bel étage » – principal lieu de séjour de la famille, a déjà retrouvé en grande partie son cachet et son apparence du temps de Louis-Joseph et d’Amédée Papineau; les quelques éléments décoratifs ajoutés par le Seigniory Club et considérés comme non significatifs de l’histoire du bâtiment ont été supprimés. Dans un premier temps, la salle à manger, la chambre de Louis-Joseph Papineau, le « petit salon », les deux chambres des filles, le hall d’entrée ainsi que le « salon jaune » ont été décorés et remeublés à l’aide de la collection actuelle et grâce aux acquisitions réalisées auprès de la famille Papineau. Pour sa part, le « salon bleu » sera remeublé ultérieurement en s’inspirant des interventions apportées par Amédée Papineau. Enfin, la salle de lecture de Papineau, qui communique avec la bibliothèque au niveau de l’étage des chambres, sera accessible à un petit groupe de visiteurs à la fois, de façon à respecter les normes de sécurité publique en vigueur.

Pour redonner au bâtiment toute son intégrité architecturale, Parcs Canada souhaite compléter la décoration et l’ameublement d’époque de toutes les pièces habitées et significatives du manoir. Ce projet ne pourra cependant être concrétisé que lorsque les ressources financières disponibles le permettront. Ainsi, au cours d’une phase ultérieure de travaux, l’étage pourrait être restauré de façon à retrouver l’ordonnancement du plan d’origine et son décor sobre de la période d’occupation par la famille Papineau Footnote 18. Quant au soubassement, qui logeait jadis les pièces de service (cuisine, caves, chambres de domestiques et serre), il serait souhaitable qu’il retrouve également son intégrité et soit mis en valeur pour être présenté aux visiteurs. Une étude de faisabilité sera entreprise à ce sujet et les résultats seront pris en compte lors de la prochaine révision du plan directeur. D’ici là, le soubassement logera les locaux administratifs ainsi que certains services à la clientèle, comme les toilettes publiques.

Les lignes qui suivent exposent les principaux travaux de restauration prévus ou envisagés. Les travaux déjà réalisés sont indiqués en caractères italiques.

  • La restauration complète de l’enveloppe, c’est-à-dire : la restauration des murs de fondation de maçonnerie, le retour à la pierre apparente des murs du manoir et de la tour de la bibliothèque; la restauration de toutes les portes et fenêtres, de leurs huisseries et de leurs vantaux; la consolidation des tours et un retour à leur revêtement original de planches verticales; la réparation des murs et la réfection de la toiture de l’annexe; la restauration du fini de toutes les toitures Footnote 19; la reconstitution des gouttières et tuyaux de descente; la restauration du balcon du mur sud ainsi que de la véranda; la reconstruction de toutes les souches de cheminée.
  • L’aménagement au soubassement des services administratifs et la réhabilitation du volume originel et des finis de la cuisine d’époque. Les travaux impliqueront la construction d’un nouveau plancher au-dessus d’un vide sanitaire, la conservation des cloisonnements originaux existants côté sud, l’aménagement d’une salle du personnel et la construction de services sanitaires pour le public.
  • La restauration et l’aménagement du « bel étage » en vue de l’installation d’une décoration et d’un mobilier d’époque, c’est-à-dire : l’enlèvement des plafonds en fausses coupoles et du décor de moulures formant panneaux sur les murs Footnote 20; le rétablissement du cabinet de toilette, de la paneterie et du portemanteau, des planchers de la serre et du vestibule; la restauration des finis plâtrés des murs et, éventuellement, la restitution des papiers peints; le rétablissement des manteaux de cheminée en bois; les planchers de bois, à moyen terme, devront être remplacés. Le grand escalier intérieur retrouvera son fini teint et verni, tandis que les couleurs d’origine seront redonnées à toutes les boiseries de l’étage.
  • La révision et la mise aux normes du bâtiment, relativement au confort, à la sécurité et à l’accessibilité; c’est-à-dire : l’isolation du plancher des combles et la transformation de ce niveau en entretoit ventilé, la révision complète des systèmes de chauffage et de protection incendie; la réfection de tout le système électrique et l’installation d’un montepersonne dans la tour des privés, permettant l’accès universel jusqu’au rez-de-chaussée. L’étage des chambres ne sera pas accessible universellement, mais il pourra être visité lorsqu’une deuxième issue aura été construite.
  • La restauration et l’aménagement éventuels de l’étage des chambres, c’est-à-dire : la reconstitution du grand passage sur toute la largeur du bâtiment, redonnant ainsi au plan originel toute sa signification, puisque cette large circulation était superposée orthogonalement à celle du dessous; la restitution des menuiseries et planchers de bois, fidèles à la simplicité du décor d’origine Footnote 21.

Les dépendances

Les travaux de conservation/restauration projetés en ce qui concerne les dépendances seront moins ambitieux, mais compte tenu des fonds disponibles présentement, seuls certains travaux pourront être réalisés à court terme. Outre la mise aux normes, il s’agira de :

  • Protéger les caractéristiques de l’enveloppe et de l’intérieur du hangar à grains par le remplacement de la toiture actuelle par une toiture en tôle « à la canadienne », le rétablissement de la toiture de la flèche du pigeonnier et de l’ancien escalier extérieur ainsi que la réhabilitation du rez-de-chaussée en fonction des exigences de sa nouvelle fonction muséale. Le local de l’atelier du peintre Napoléon Bourassa et les épures peintes à la fresque seront en outre protégés.
  • Restaurer les caractéristiques de l’enveloppe et de l’intérieur de l’ancien musée familial en stabilisant le processus de décollement de la façade des murs gouttereaux, en remplaçant la toiture récente surhaussée par une couverture de tôle à baguette, comme à l’origine, et en restaurant ou réhabilitant l’intérieur en fonction de sa vocation retrouvée d’espace muséal.
  • Protéger les caractéristiques du kiosque (ancien campanile) et d’en révéler la fonction, notamment en rétablissant le toit et la structure du kiosque et en le relocalisant à son emplacement initial.
  • Protéger les caractéristiques de l’enveloppe et de l’intérieur du pavillon de thé en restaurant le bâtiment sur ses fondations d’origine.

Les paysages culturels

On sait que l’aménagement paysager planifié par les Papineau a été conservé dans ses grandes lignes. De façon générale, Parcs Canada vise à conserver cet aménagement et à retoucher certaines interventions récentes qui contrastent avec l’esprit du lieu. En accord avec l’énoncé d’intégrité commémorative, le concept de valorisation du paysage propose de rétablir l’intégrité des abords du manoir seigneurial de manière à évoquer les aménagements jadis réalisés par Louis-Joseph Papineau et son fils Amédée tout en respectant l’organisation spatiale définie. Selon cette approche, les interventions seront surtout concentrées dans la zone du cap Bonsecours, tenant compte que l’objectif de commémoration est axé sur le personnage de Louis-Joseph Papineau et sur l’architecture de son manoir. Le concept retenu a également pour but d’illustrer la passion qu’entretenaient Louis-Joseph et Amédée Papineau pour l’horticulture.

Bien que les interventions les plus significatives seront entreprises dans la zone entourant le manoir, d’autres mesures de valorisation pourraient être apportées dans d’autres secteurs de la propriété transférée à Parcs Canada par bail Footnote 22.


Les environs du manoir

L’énoncé d’intégrité commémorative identifie les objectifs suivants en ce qui regarde le pay-sage culturel entourant le manoir seigneurial :

  • protéger certains éléments majeurs de l’aménagement, dont deux arbres vétérans : le grand pin autour duquel un belvédère avait été élevé ainsi que le chêne qui ombrage la pelouse s’étendant devant le manoir;
  • protéger et rétablir des percées visuelles entretenues par les Papineau;
  • protéger les vestiges des accessoires de l’aménagement paysager (urnes, escaliers, cascade artificielle, etc.);
  • protéger le tracé pittoresque et le gabarit du chemin du cap ainsi que les terrasses aménagées dans l’escarpement du cap Bonsecours.

Une première étude Footnote 23 a déjà permis de cerner les principales interventions préconisées pour répondre à ces objectifs. Outre la restructuration du paysage aux abords du manoir; le plan favorise des opérations d’élagage pour retrouver les percées visuelles sur la rivière. L’étude propose également la réfection du chemin du cap en matériau granulaire, le rétablissement de la boucle qui le prolongeait au sud du manoir et l’élimination de celle qui fut ajoutée à l’ouest; enfin, on souhaite pouvoir amorcer la restitution des anciens jardins (potagers et plates-bandes de fleurs) et de rétablir le cadran solaire jadis aménagé près du pavillon de thé.

Un plan de protection et de valorisation des paysages culturels du lieu précisera les interventions à mettre en oeuvre dans le secteur environnant le manoir. Compte tenu de l’insuffisance du budget d’investissement disponible présentement, les interventions envisagées ne pourront être réalisées qu’à plus long terme, lorsque le financement sera acquis.


Les autres secteurs

L’énoncé d’intégrité commémorative identifie les objectifs suivants en ce qui regarde le paysage culturel des autres secteurs de la propriété :

  • protéger le tracé pittoresque et le gabarit de l’allée seigneuriale et du réseau des sentiers qui jalonnent le domaine;
  • protéger la diversité des peuplements végétaux.

Sous réserve d’une entente à venir, le boisé du domaine, dont l’état de santé est satisfaisant, sera entretenu de concert avec le Château Montebello, dans l’optique d’y maintenir une utilisation extensive. Les arbres vétérans feront l’objet d’un suivi particulier; on assurera leur survie dans la mesure du possible et on prévoira leur remplacement éventuel. On s’efforcera en outre de respecter la diversité écologique des milieux naturels du domaine et, le cas échéant, on procédera aux travaux sylvicoles nécessaires pour assurer la diversité actuelle du boisé et favoriser la croissance d’espèces désirables. Un plan de gestion des ressources naturelles, mis à jour périodiquement pour refléter l’évolution des conditions environnementales, précisera la nature des interventions qui seront entreprises à cet égard.

La nature et l’envergure des interventions à mettre en oeuvre dans les divers secteurs du domaine seront précisées dans le plan de protection et de valorisation des paysages.

De façon générale, les interventions proposées dans le plan devront être respectueuses de l’esprit et de l’intégrité du lieu de même que de son caractère patrimonial et devront tenir compte des mesures qui auront été arrêtées pour assurer la protection des ressources archéologiques.

La politique sur la gestion des ressources culturelles stipule clairement que Parcs Canada protégera, dans les lieux historiques nationaux, les éléments significatifs des écosystèmes, au même titre que ceux retrouvés dans les parcs nationaux. Par conséquent, le plan de valorisation ne favorisera aucune intervention qui pourrait causer la détérioration de groupements végétaux d’intérêt, sauf si une telle intervention se révélait indispensable pour assurer la bonne gestion des ressources culturelles.


Les paysages culturels « hors-site »

En ce qui a trait aux paysages culturels « hors-site », c’est-à-dire ceux qui sont associés de près au domaine seigneurial, mais sur lesquels Parcs Canada n’a aucune juridiction, on cherchera à travailler en concertation étroite avec le Château Montebello ainsi que Héritage Canada pour assurer leur préservation, conformément aux objectifs qui figurent dans l’énoncé d’intégrité commémorative :

  • protéger le fractionnement quadripartite du domaine dans sa zone habitée (le parc boisé, le jardin, les pelouses, les prairies);
  • sensibiliser les partenaires et encourager leurs initiatives pour protéger les éléments significatifs du paysage situés sur leurs propriétés.

À cet égard, Parcs Canada cherchera à conclure une entente avec le Château Montebello aux fins de maintenir la « prairie de la grange », en partie oblitérée par des courts de tennis, ainsi que la « prairie de la maison du jardinier » libres de toute autre construction apparente.


Les vestiges archéologiques

Les vestiges archéologiques :

  • reflètent admirablement l’idéologie qui a nourri l’oeuvre des concepteurs du domaine seigneurial;
  • témoignent éloquemment de certains aspects d’un mode de vie aisé constamment en évolution, toujours à l’affût des commodités, particulièrement au regard des nécessités de la vie quotidienne d’un seigneur (les glacières, les serres, le four à pain, etc.);
  • constituent des attraits complémentaires au patrimoine bâti.

Outre une surveillance archéologique et d’autres interventions appropriées (fouilles exploratoires, fouilles de sauvetage, etc.) à l’occasion de tous les travaux d’excavation et de terrassement qui seront entrepris sur le site, les actions de Parcs Canada sur le plan de l’archéologie s’orienteront autour de cinq objectifs :

  • compléter l’inventaire archéologique du lieu et assurer la préservation des secteurs qui recèlent des vestiges;
  • repérer les vestiges sur le terrain et assurer leur intégrité physique. Sensibiliser les visiteurs à leur présence et à leur signification;
  • privilégier l’exploration archéologique dans les secteurs qui recèlent des vestiges reliés à l’objectif de commémoration du lieu, notamment dans le secteur de la glacière;
  • prendre les mesures appropriées pour assurer la protection et la conservation des sites paléohistoriques;
  • sensibiliser les différents propriétaires des terrains ayant jadis fait partie du domaine seigneurial à l’identification et à la protection des vestiges archéologiques situés sur leur propriété et encourager leurs initiatives en ce sens.

Considérant qu’une évaluation du potentiel archéologique a déjà été préparée et que diverses interventions archéologiques ont été réalisées préalablement aux travaux de mise en valeur, les prochaines actions concrètes, sous réserve de la disponibilité du financement requis, consisteront notamment à :

  • compléter, dans le cadre des travaux d’aménagement, le débroussaillage sélectif et effectuer de nouveaux sondages exploratoires dans les secteurs des chemins, sentiers, allées, ponts, escaliers et murs de soutènement visés par le programme de valorisation des paysages culturels;
  • poursuivre les mesures appropriées pour préserver les vestiges de la glacière;
  • compléter l’exploration des divers aménagements paysagers (jardin, massifs floraux, haies ornementales, etc.);
  • compléter les sondages exploratoires dans la zone comprise entre le manoir et le hangar à grains;
  • explorer, protéger et, au besoin, fouiller les sites riches en informations, tels les anciens dépotoirs;
  • communiquer avec les propriétaires des terrains situés dans les limites originelles du domaine seigneurial pour les sensibiliser à l’identification et à la protection des vestiges archéologiques qui s’y retrouvent.

La collection ethnologique

Suivant le concept de mise en valeur arrêté, les pièces du manoir accessibles au public ont été ou seront remeublées, dans la me-sure du possible, à l’aide de meubles et d’objets originaux provenant du manoir, qui ont ou seront acquis, par achat ou par voie de dons, de descendants de la famille Papineau ou d’autres sources. Dans la sélection des meubles et objets, les conservateurs doivent accorder la priorité à ceux qui apparaissent essentiels à la communication de l’objectif de commémoration du lieu. D’ici à ce que les meubles et objets soient acquis, Parcs Canada s’efforcera de sensibiliser leurs propriétaires actuels à l’importance de leur protection.

Parcs Canada fera en sorte que les collections d’objets soient conservées et entretenues dans des conditions favorables et sécuritaires afin d’en assurer la meilleure utilisation possible dans le cadre de l’expérience de visite proposée. Dans l’optique d’enrichir cette expérience, les visiteurs pourront pénétrer librement dans la plupart des pièces. Compte tenu de l’approche favorisée, les mesures d’atténuation suivantes seront adoptées :

  • des guides-interprètes accompagneront tous les visiteurs dans leur découverte du manoir et les sensibiliseront à la protection des meubles et objets;
  • des répliques des meubles et des ob-jets les plus fragiles seront fabriquées et installées aux endroits où la manipulation des objets sera autorisée;
  • l’ameublement et le décor seront intégrés à l’interprétation de la thématique historique.

La communication des messages associés à l’objectif de commémoration du lieu

La présentation envisagée de l’histoire du lieu au moyen de thèmes d’interprétation spécifiques est au coeur du projet de mise en valeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. Cette présentation s’articulera autour des cinq volets thématiques qui découlent directement des objectifs de commémoration (voir 1.3).

L’expérience que Parcs Canada se propose d’offrir aux visiteurs se fonde d’abord sur le respect et l’exploitation du caractère d’authenticité du lieu, sur le potentiel d’évocation de ses paysages et de ses bâtiments et, plus que tout, sur le concepteur et le créateur du domaine seigneurial, Louis-Joseph Papineau. En effet, que l’on aborde le lieu sous l’angle familial, architectural, domanial ou seigneurial, Louis-Joseph Papineau constitue le pivot autour duquel gravite le propos de l’expérience à offrir. Conséquemment, l’axe de communication peut être formulé comme suit :

« À LA DÉCOUVERTE DES FACETTES MÉCONNUES DE LOUIS-JOSEPH PAPINEAU »

À la découverte...

  • parce que le visiteur quitte l’univers familier du quotidien pour pénétrer dans le monde d’une autre époque;
  • parce que l’accès au lieu nécessite un parcours à pied qui met en éveil tous les sens, d’où une expérience physique d’exploration;
  • parce que différents indices jalonnent le parcours dont la signification demeure, au départ, difficile à saisir;

des facettes méconnues...

  • parce que le titre de « seigneur » de Louis-Joseph Papineau n’a pas la même notoriété que son rôle d’homme politique et représente une nouveauté pour la majorité des visiteurs;
  • parce que la notion de « seigneur » est en soi une réalité insolite pour les visiteurs de culture anglophone et un concept plus ou moins nébuleux chez les francophones;
  • parce que « l’homme cultivé », créateur d’une bibliothèque privée de grande envergure pour l’époque, apparaît comme une dimension nouvelle du personnage;
  • parce que la famille et le domaine familial sont si fortement ancrés dans le lieu qu’ils témoignent du père de famille et de l’importance accordée par l’homme à ses proches;
  • parce que les talents d’un Louis-Joseph Papineau comme concepteur d’un manoir hors du commun et architecte du paysage sont largement inconnus du public;

de Louis-Joseph Papineau...

  • parce que c’est l’homme et son oeuvre – Louis-Joseph Papineau, concepteur et maître d’oeuvre du domaine de « Monte-Bello » – qui constituent d’abord la raison d’être du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau.

L’ensemble des ressources du domaine seigneurial seront présentées comme faisant partie d’un tout cohérent et signifiant; elles seront mises en valeur dans le cadre d’une expérience patrimoniale qui culminera avec la visite du manoir. Adaptée aux intérêts et aux besoins des diverses clientèles (groupes scolaires, familles, touristes et villégiateurs saisonniers...), l’expérience qui sera offerte aux visiteurs sera conçue de manière à favoriser leur compréhension de la thématique de commémoration de même que leur appréciation des ressources patrimoniales en présence. On fera également en sorte que les messages élaborés dans la poursuite de l’objectif de commémoration facilitent la rencontre entre le visiteur et les ressources du lieu.

Parcs Canada favorisera une approche fondée sur une meilleure connaissance des multiples facettes de la personnalité de Louis-Joseph Papineau (seigneur, maître d’oeuvre et concepteur du domaine, homme cultivé, père de famille, etc.) afin de révéler le lieu dans toute son intégrité commémorative.

De même, on visera à assurer une continuité historique dans l’organisation spatiale ainsi que dans l’affectation de nouvelles fonctions aux aménagements, équipements et bâtiments anciens du domaine. Dans cette optique, Parcs Canada cherchera à conclure une entente avec les autorités ecclésiastiques anglicanes aux fins de permettre la mise en valeur de l’ancien musée familial et son insertion dans le circuit de découverte patrimoniale du lieu.

En ce qui concerne les moyens de communication, on recourra à des moyens qui respecteront l’intégrité et l’authenticité des aménagements, des équipements et des bâtiments anciens du domaine.

En termes plus concrets, les principales composantes envisagées en matière de présentation de l’histoire du lieu sont les suivantes :

  • Élaboration d’un circuit d’interprétation extérieur misant d’abord sur l’importance du patrimoine bâti et implanté entre le lieu d’accueil et le manoir, point culminant de la visite; ce circuit servira à baliser l’expérience de séjour et incitera les visiteurs à poursuivre leur réflexion à l’intérieur des divers bâtiments accessibles au public. Sous réserve d’une entente à venir avec Fairmont – Le Château Montebello (voir Orientations relatives à l’accès au lieu et à l’accueil des visiteurs), le circuit d’interprétation extérieur pourrait s’articuler en fonction du rétablissement de l’entrée traditionnelle au domaine; en empruntant successivement le portail d’entrée donnant sur la rue Notre-Dame, l’allée seigneuriale puis le chemin qui ceinture le manoir, les visiteurs pourraient obtenir une vue plus complète de l’organisation spatiale du domaine telle que conçue par Papineau. La remise en état des jardins et du potager ainsi que l’ajout de reproductions de mobilier extérieur et d’accessoires d’époque contribueront par ailleurs à évoquer l’oeuvre du concepteur du domaine.
  • Installation d’un ameublement d’époque dans le manoir seigneurial; dans un premier temps, l’intervention a porté sur les appartements du rez-de-chaussée, de la salle de lecture (1er étage) et du rez-de-chaussée de la tour de la bibliothèque; par la suite, suivant la disponibilité du financement, on remeublera l’ensemble du premier étage du manoir et, éventuellement, le soubassement, selon les conclusions de l’étude de faisabilité déjà mentionnée. Lors de sa découverte du manoir et de ses occupants, le visiteur sera accompagné d’un guide-interprète, complice indispensable dans sa compréhension du lieu.
  • Présentation, à l’intérieur du hangar à grains d’une exposition thématique portant sur la seigneurie de la Petite-Nation.
  • Présentation d’une exposition synthèse à l’intérieur de l’ancien musée familial24. Cette exposition fera ressortir les différentes facettes de la personnalité de Louis-Joseph Papineau, à la fois architecte, concepteur d’un domaine idéal, père de famille et seigneur; elle traitera également des aspects contextuels des messages rattachés à l’idéologie seigneuriale de Papineau ainsi que des grands courants d’idées ayant cours à cette époque en matière d’architecture et d’aménagement paysager.
  • Collaboration avec la Société historique Louis-Joseph-Papineau dans le but d’enrichir le contenu de la présentation à l’intérieur de la chapelle funéraire.
  • Élaboration d’une stratégie et d’un programme de diffusion externe visant à communiquer au public non-visiteur les messages rattachés à l’objectif de commémoration du lieu.

Orientations relatives à l’accès au lieu et à l’accueil des visiteurs

Parcs Canada et Fairmont – Le Château Montebello continuent leurs pourparlers en vue de conclure une entente à long terme visant à donner au lieu historique national « pignon sur rue ». Les discussions ont porté sur le transfert d’une parcelle de terrain comprise entre la gare et l’allée seigneuriale aux fins de permettre l’implantation d’une aire de stationnement destinée aux visiteurs du lieu. La Municipalité de Montebello, propriétaire de la gare voisine, participe également aux discussions, car la gare est envisagée pour servir de lieu d’accueil. Parcs Canada espère être en mesure de conclure, dans un proche avenir, une entente formelle avec toutes les parties concernées.

Sous réserve d’un accord, une partie de la gare de Montebello sera réaménagée pour les fins d’accueil, incluant de nouvelles installations sanitaires publiques. La signalisation ainsi que l’accès au sentier conduisant à l’allée seigneuriale seront également améliorés.

Dans l’optique de Parcs Canada, la conclusion d’une entente avec ses partenaires n’oblitère pas le projet à plus long terme d’intégrer au lieu historique national le portail d’entrée ainsi que la maison du jardinier. En temps opportun, Parcs Canada étudiera la faisabilité de ce projet avec Fairmont – Le Château Montebello.

Orientations relatives à l’intégration du lieu à sa région d’appartenance

Parcs Canada s’efforcera de tout mettre en oeuvre pour favoriser une intégration fonctionnelle et harmonieuse du lieu à sa région d’appartenance (la Petite-Nation), d’une part en établissant des relations suivies et constructives avec les principaux intervenants du milieu régional, notamment du domaine touristique et culturel et, d’autre part, en suscitant la participation de partenaires du milieu dans la conservation et la mise en valeur du lieu.

Parcs Canada reconnaît d’emblée que la mise en valeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau est perçue dans le milieu comme un atout majeur pour stimuler le tourisme régional. Dans ce contexte et dans la mesure de ses moyens, Parcs Canada souhaite :

  • participer au processus de réflexion amorcé sur le développement touristique régional et s’associer aux efforts des intervenants locaux et régionaux dans l’essor et la promotion du tourisme dans la région de la Petite-Nation;
  • contribuer à la valorisation du tourisme patrimonial de la région de la Petite-Nation;
  • s’assurer la collaboration étroite du Château Montebello dans l’offre d’un produit « nature-culture » de haute qualité.

Parcs Canada entend par ailleurs collaborer à l’émergence d’une collaboration régionale qui puisse, à moyen terme, assumer certains aspects de l’exploitation du lieu, suivant les principes de la gestion partagée Footnote 25. La gestion partagée se caractérise par la participation active et continue de deux ou de plusieurs partenaires dans l’exploitation d’un lieu historique, aux fins d’en assurer l’intégrité commémorative. Cette formule concourt à la mise en oeuvre d’une des principales orientations stratégiques de Parcs Canada, laquelle vise à faire participer plus activement les Canadiens à la prise de décision et à la mise en application des programmes dans les aires patrimoniales.

Les modalités de collaboration qui seront établies entre Parcs Canada et ses partenaires seront conformes au « Cadre de mise en oeuvre de la gestion partagée des lieux historiques nationaux » (novembre 1995) et à ses amendements subséquents.

Orientations relatives à la fréquentation et aux revenus du lieu

Divers facteurs influenceront vraisemblablement l’achalandage futur du lieu.

Le fait de ne pas avoir « pignon sur rue » a eu jusqu’à présent des conséquences sur la visibilité du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau. Cette situation a eu pour effet d’affaiblir les chances de rejoindre une portion de la clientèle potentielle en plus de semer une certaine confusion quant à la localisation précise du lieu historique, décourageant ainsi les visiteurs « moins motivés ». La conclusion d’une entente entre Parcs Canada, la Municipalité de Montebello et Fairmont – Le Château Montebello permettra, le cas échéant, d’améliorer considérablement les conditions actuelles d’accès au lieu.

La hausse de la fréquentation sera en partie tributaire d’interventions subséquentes qui auraient pour effet d’améliorer l’offre de serviceactuelle. À cet égard, l’accroissement et la diversification de l’offre de service actuelle passent par l’ajout d’espaces d’exposition et l’aménagement d’attraits complémentaires à l’extérieur du manoir. Dans ce contexte, la mise en valeur de l’ancien musée familial des Papineau (chapelle anglicane) et l’aménagement de jardins interprétés apparaissent comme des éléments essentiels de la diversification de l’expérience proposée aux visiteurs, sans compter qu’ils permettront de désencombrer le manoir lui-même.

Des droits d’entrée sont exigés pour la visite du manoir suivant la stratégie nationale de tarification de Parcs Canada. Ces droits d’entrée servent à recouvrir une partie des frais d’opération du site. Toutefois, la nature, l’envergure, la qualité de la mise en valeur du domaine Papineau et le positionnement du site par rapport à sa région touristique d’appartenance, permettent d’envisager une augmentation de la tarification, justifiée par l’augmentation des activités et des services. Pour que la hausse des tarifs n’entraîne pas de baisse de la fréquentation, il devra y avoir adéquation entre la durée et la qualité de l’expérience et le prix demandé.

D’autre part, dans une perspective où les jardins anciens pourraient être aménagés et interprétés et où ils deviendraient parties intégrantes de l’offre de service, il est évident que cette composante serait également sujette à tarification.


La mise en marché

Parce que le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau :

  • est situé à l’entrée d’une région touristique d’importance intercalée entre Montréal et Gatineau/Ottawa;
  • bénéficie ainsi du plus vaste bassin de population du Québec;
  • est situé dans un corridor touristique qui est déjà largement emprunté par une clientèle de transit;
  • jouit de la notoriété et de la capacité d’attraction du Château Montebello;
  • représente, avec le Musée des Civilisations de Gatineau et le domaine Mackenzie-King, l’un des principaux biens patrimoniaux de l’Outaouais;
  • offre, par sa découverte des ressources et ses activités d’interprétation, une expérience significative pour le visiteur; et considérant, par ailleurs, que la promotion est actuellement limitée, Parcs Canada en-tend élaborer et mettre en oeuvre, en collaboration avec les intervenants touristiques locaux et régionaux, une stratégie et un plan d’action marketing qui permettraient l’atteinte d’une fréquentation de l’ordre de 50 000 visiteurs annuellement. Dans cette optique, Parcs Canada, sous réserve de la disponibilité des ressources financières requises, exprime son intention d’ouvrir le lieu au public sur une base annuelle, selon un horaire assurant sa rentabilité.

Le texte suivant exprime en termes plus concrets la vision à long terme qu’entretient Parcs Canada à l’égard de la conservation, de la mise en valeur et de la gestion du lieu.

Un regard sur l’avenir : Le lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau

Protégé des regards, à l’ombre de ses grands arbres et dans la mémoire de ses pierres, ce lieu a beaucoup à raconter. Il évoque le souvenir de Louis-Joseph Papineau, figure de proue de l’histoire du Canada, bâtisseur, seigneur, père d’une famille illustre, homme de grande culture. Donner la parole au lieu, révéler la mémoire de ses bâtiments, de ses jardins, de ses futaies, faire plus ample connaissance avec le célèbre manoir seigneurial et ses illustres résidants, voilà pourquoi ce lieu a été mis en valeur. Dès son arrivée, le visiteur pressent que ce grand domaine n’est pas un foyer familial comme les autres. Il observe qu’un portail limite l’accès à la propriété tandis qu’une jolie maisonnette monte la garde à proximité de l’entrée. La maison principale, un authentique MANOIR, est blotti tout au bout du chemin, se dérobant à la vue. Pour l’atteindre, le visiteur devra parcourir cette longue allée dite SEIGNEURIALE; la découverte progressive d’autres signes tangibles de la singularité du lieu ponctuera sa marche. Mais laissons plutôt le visiteur déambuler sur le site et en apprécier toute la richesse!

Un portail en pierre marque de façon éloquente la limite de la partie habitée et privée que le seigneur s’était réservée. À l’image du censitaire ou de l’invité d’autrefois, le visiteur d’aujourd’hui accède à la maison du jardinier, là même où habitait jadis le gardien du domaine. Ce cottage de brique rouge campe le statut exceptionnel du lieu et la qualité de son architecture annonce un ensemble unique à découvrir.

Emprunter l’allée seigneuriale, c’est rompre avec le quotidien. Ce parcours permet au visiteur de se mettre à l’écoute d’une autre manière de penser, d’une autre façon de faire. Des indices semés le long de sa montée vers le manoir piquent sa curiosité et ponctuent sa découverte du paysage culturel tel que conçu et organisé par le maître des lieux. Qui a construit cette maison au style éclectique? Pourquoi une « allée seigneuriale »? Qu’est-ce donc qu’un « domaine habité »? La forêt que nous traversons estelle « naturelle »? Pourquoi tous ces sentiers qui se perdent dans les sous-bois... et ce ruisseau, qui coule sous le pont, où se jette-t-il? Le long du chemin sont installés des bancs d’aspect rustique qui permettent au visiteur de faire une courte pause et d’admirer le jeu de l’ombre et de la lumière dans les ramures des grands arbres.

La chapelle funéraire constitue le deuxième arrêt d’importance du circuit patrimonial. À cet endroit, le propos se fait plus intimiste, l’émotion est au rendez-vous. Dans la crypte reposent les restes de Louis- Joseph Papineau et de plusieurs de ses proches et de sa descendance : c’est dire toute l’importance que Papineau accordait à la famille. La création du mausolée familial témoigne en outre de ses aspirations sociales et de sa conception d’une dynastie seigneuriale enracinée dans son domaine. En compagnie d’un représentant de la société historique Louis-Joseph Papineau, partenaire de Parcs Canada, le visiteur est invité à retracer les grandes heures de l’illustre famille des Papineau. Au détour de l’allée seigneuriale, le visiteur longe les vestiges d’une ancienne glacière et une montée un peu plus abrupte l’amène au sommet du cap Bonsecours, où s’épanouit le splendide manoir construit par Papineau, avec vue sur la rivière des Outaouais. Le manoir restauré, qui a retrouvé son visage d’antan, constitue la pièce maîtresse de la visite. Ici vécut une famille, avec ses rêves, ses espoirs, ses chagrins et son quotidien. L’architecture de l’édifice reflète les aspirations sociales et la notoriété de ses hôtes. Armoiries dans le vestibule d’entrée, monogramme sur le balcon, initiales inscrites sur la toiture, autant de preuves tangibles de la détermination du maître d’oeuvre à vouloir marquer son rang aux yeux de tous. Une grande tournée des lieux en compagnie d’un guide-interprète permet aux visiteurs d’en palper l’ambiance feutrée, d’admirer la décoration et le mobilier qui s’est transmis de génération en génération, d’apprécier l’aménagement des pièces et de comprendre les motivations du concepteur. Tours et tourelles font partie des particularités architecturales de cette grande demeure. La tour carrée, à la fois bureau seigneurial et bibliothèque, devient l’espace pivot entre l’homme et le seigneur. C’est dans le bureau situé au rez-de-chaussée que Papineau établissait un contact privilégié avec ses censitaires. Cette construction, bâtie à toute épreuve, permettait également à Papineau de protéger son importante collection de livres, l’une des bibliothèques privées parmi les plus éminentes au Canada à cette époque.

À sa sortie du bureau seigneurial, le visiteur est convié à faire les honneurs de l’ancien musée familial, édifice pensé et construit par Louis-Joseph Amédée, fils aîné et héritier de Louis-Joseph. Prédestiné à recevoir des invités ou des visiteurs de passage, le musée présente aujourd’hui une expositionsynthèse illustrant les fondements idéologiques qui ont présidé au développement du manoir, du domaine et de la seigneurie. De mémoire vive de la famille, le musée devient mémoire vive de la richesse patrimoniale de ce lieu historique national.

Par la suite, le visiteur est incité à suivre les traces du Louis-Joseph Papineau, amant de la nature et jardinier à ses heures. Des aménagements paysagers développés sur le modèle inspiré d’Andrew Jackson Downing, l’invitent à la détente. Un arrêt au pavillon de thé lui permet de se désaltérer et de se reposer tout en profitant d’une vue imprenable sur l’Outaouais. Le visiteur est ensuite invité à déambuler dans les jardins de fleurs et le potager, tout en admirant quelques plantes exotiques mises en place et entretenues par des amateurs d’horticulture de la région.

Un dernier arrêt au hangar à grains, situé à l’extrémité ouest du domaine, permet au visiteur d’en apprendre un peu plus sur la seigneurie de la Petite-Nation. En effet, le hangar à grains, anciennement dépositaire des cens et rentes des censitaires, présente aujourd’hui quelques éléments d’exposition axés sur le développement de cette seigneurie.

Au retour, le visiteur est à même de reconstituer les grands traits du paysage culturel tel que pensé par Louis-Joseph Papineau et son fils Amédée. L’allée et les sentiers qui sillonnent le domaine, le parc boisé, les pelouses, les jardins, les prairies, autant de pièces qui recomposent le grand « puzzle » du domaine idéal imaginé par Louis-Joseph Papineau.

La découverte d’un lieu « grandeur nature » et d’un personnage aux multiples facettes nous interpelle dans nos valeurs les plus profondes. Une expérience qui nous fait réfléchir sur notre société actuelle dans laquelle la famille, la culture, la démocratie sont encore des valeurs qui nous imprègnent dans notre vie au quotidien. Cette rencontre entre le visiteur et les ressources du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau suscite et stimule, en somme, la réflexion sur une oeuvre collective à bâtir.


4.0 Résumé de l’évaluation environnementale

4.1 Contexte

Le plan directeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau a fait l’objet d’un examen environnemental stratégique en vertu du Processus d’évaluation environnementale des projets de politiques et de programmes qui découle d’une directive du Cabinet. Ce processus fédéral d’évaluation environnementale est un mécanisme d’autoévaluation utilisé par les ministères et les organismes fédéraux pour déterminer, évaluer et atténuer, à un niveau général, les répercussions sur l’environnement des aménagements et des activités qu’ils projettent. En vertu de la directive nationale de gestion 2.4.2 de Parcs Canada sur l’évaluation des impacts, la portée de ces évaluations environnementales est étendue aux ressources culturelles de manière à regrouper tous les éléments d’évaluation dans un seul rapport. L’évaluation environnementale de ce plan directeur est exposée dans un document distinct, intitulé Évaluation environnementale stratégique du plan directeur du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau, et un résumé est présenté ci-dessous.

La gestion du lieu historique national du Canada du Manoir-Papineau s’effectue dans un contexte particulier, car ce territoire est de superficie restreinte et il se retrouve enclavé entre la gare de Montebello et le Château Montebello, de telle sorte qu’il est difficile d’en contrôler l’accès. Les ressources forestières qu’on y retrouve constituent une partie d’un ensemble qui se prolonge à l’extérieur de la propriété.


4.2 Approche méthodologique

L’approche adoptée pour l’évaluation du plan directeur s’effectue en plusieurs étapes. Les orientations exposées dans le plan sont d’abord révisées pour vérifier leur conformité avec le mandat et les politiques de Parcs Canada. Par la suite, les aménagements et les activités qu’implique la mise en valeur du lieu sont examinés de manière à faire ressortir les sources de stress. Les impacts identifiés sont par la suite caractérisés en termes de durée (impact temporaire ou permanent) et d’intensité (impact nul, faible, atténuable, non atténuable, inconnu). Des mesures générales visant à amoindrir les impacts négatifs anticipés sont ensuite définies.


4.3 Portée de l’évaluation environnementale

Cette évaluation environnementale est fondée sur la documentation existante ainsi que sur les avis de divers spécialistes de la gestion des ressources naturelles et culturelles. Les ressources biophysiques (sols, air, eau, végétation et faune) et les ressources culturelles (paysages culturels, patrimoine bâti et res-sources archéologiques) sont considérées. Toutefois, l’examen des impacts cumulatifs se limite pour sa part aux éléments valorisés du milieu.


4.4 Conformité des orientations stratégiques du plan directeur

Les aménagements et les activités proposés dans ce plan directeur ne compromettent pas l’intégrité commémorative ni la connaissance et l’appréciation du patrimoine. Au contraire, ils fournissent dans l’ensemble un appui à ces composantes.

Les orientations stratégiques énoncées dans le plan relativement à la protection et à la mise en valeur des ressources naturelles sont relativement précises. Ces orientations sont assujetties à un éventuel plan de protection et de valorisation des paysages culturels. Les prescriptions de ce plan pourraient avoir une incidence sur la protection de ces ressources.


4.5 Identification des sources d’impacts et évaluation des préoccupations

L’analyse des impacts appréhendés sur les ressources naturelles révèle que la restauration des bâtiments, la valorisation des paysages et les visites autonomes soulèvent des préoccupations quant aux éventuels impacts négatifs que ces mesures pourraient susciter sur le milieu, tout particulièrement en ce qui a trait à la végétation. En effet, en raison de la superficie réduite du site, de la vocation touristique du secteur et de la difficulté d’en contrôler l’accès, l’utilisation du site en sera d’autant imprévisible et en période d’achalandage, les visiteurs seront plus difficiles à contenir dans les endroits aménagés. De plus, la faible épaisseur du till glaciaire sur laquelle se maintiennent les peuplements forestiers du cap Bonsecours confère à ce secteur une certaine fragilité, tout particulièrement en raison de sa susceptibilité aux érosions dans les pentes fortes.

Par ailleurs, il faut noter la présence d’herbe à la puce dans certains secteurs de la propriété, laquelle peut constituer un danger d’infection cutanée pour les personnes qui ont à effectuer des travaux de recherche et d’entretien ainsi que pour les visiteurs.

Les impacts appréhendés sur les ressources culturelles sont également préoccupants, mais ces impacts sont atténuants. Une préoccupation importante sous-tend les interventions proposées sur le paysage, qui a trait à la création d’un rapport de continuité entre le paysage culturel ancien et l’actuel processus de mise en valeur. Entre ces deux temps forts, s’est déroulé un scénario de dépérissement des ressources culturelles, y compris du paysage culturel. Dans ce contexte, il nous faudra voir, en nous appuyant sur des études ethnohistoriques, archéologiques et autres, à protéger et à rétablir ce qui fait l’esprit du lieu, par le renouvellement du dialogue entre le patrimoine bâti et son aménagement paysager propre.

Advenant que Parcs Canada puisse conclure un jour une entente qui lui permettrait d’aménager une aire de stationnement sur le terrain compris entre la gare de Montebello et l’allée seigneuriale, il va de soi qu’une telle implantation exercerait un impact sur ce milieu densément boisé. Une étude d’impacts environnementaux accompagnée de mesures d’atténuation devra être élaborée avant qu’interviennent les travaux de conception de ce stationnement.

Par ailleurs, les travaux de mise en valeur prévus pourraient avoir des effets secondaires négatifs sur les paysages culturels si les mesures appropriées n’étaient pas appliquées de façon stricte pour en protéger les éléments constitutifs lors des travaux (par exemple, en regard de la circulation de la machinerie lourde et de la disposition des déchets). Pour leur part, certaines ressources archéologiques pourraient, si on n’y porte pas une attention particulière, être menacées par la circulation de véhicules, l’envahissement de la végétation (la glacière, par exemple) de même que la réalisation de travaux à proximité et d’interventions sur le paysage. Les ressources archéologiques qui n’ont pas encore été repérées sont vulnérables par le fait qu’elles ne sont pas perceptibles en surface et qu’elles ne peuvent faire l’objet de la protection requise.

Les modalités du transport en commun éventuel (navette) pourraient avoir un impact négatif sur la protection et la mise en valeur du patrimoine culturel du site (érosion, conflit avec les piétons, stationnement, bruit, poussière, etc.), si elles ne sont pas établies avec soin.

Enfin, la conservation et la sécurité des meubles et objets originaux qui seront utilisés dans la mise en valeur du manoir constituent une préoccupation qui n’a pas été négligée. En effet, des mesures d’atténuation ont déjà été proposées, notamment l’accompagnement des visiteurs par des guides-interprètes.


4.6 Impacts cumulatifs

Dans le cadre de cette évaluation environnementale stratégique, seuls les impacts cumulatifs sur les éléments valorisés du milieu ont été examinés. En s’appuyant sur les connaissances actuelles du milieu ainsi que sur l’interaction de la proposition de mise en valeur avec son environnement, les composantes clés mentionnées ci-dessous ont été retenues, soit :

  • La végétation du site fait partie d’un massif forestier plus important dont la majeure partie échappe au contrôle de Parcs Canada. Ce massif forestier a déjà subi des stress à la suite de l’aménagement du site ainsi que du complexe hôtelier situé à proximité. D’autres stress viendront s’ajouter aux précédents, notamment lors de l’aménagement paysager et de la fréquentation accrue du site.
  • En ce qui a trait au patrimoine culturel, les effets combinés du temps, des travaux de restauration et d’aménagements successifs ainsi que la fréquentation du lieu par un nombre considérable de visiteurs constituent des facteurs importants de stress sur des ressources somme toute fragiles et non renouvelables. Sans une approche respectueuse du tissu patrimonial et un contrôle du développement des infrastructures d’accueil et de visite, la conservation de caractéristiques essentielles du lieu historique national pourrait s’en trouver menacée.

4.7 Stratégies d’atténuation

Pour contrer les effets négatifs probables de la mise en valeur du lieu, les stratégies suivantes devront être appliquées :

  • Lors des travaux de mise en valeur, des efforts seront consentis pour protéger les végétaux présents dans l’aire des travaux et à proximité.
  • Pour sa part, le plan de protection et de valorisation des paysages devra tenir compte de l’évolution des groupements végétaux et cherchera à maintenir leurs caractéristiques s’il était nécessaire de créer des ouvertures pour recréer des paysages culturels.
  • Pour prévenir les dangers d’infection cutanée reliés à la présence de l’herbe à la puce, un relevé périodique devra être effectué et sa présence sera signalée à l’aide de fiches d’identification. Lors de travaux de recherche ou d’aménagement, des vêtements et de l’équipement protecteur seront fournis aux employés. Au besoin, lorsque nécessaire, l’éradication ponctuelle et locale pourrait être envisagée.
  • Un programme de fouilles préventives et/ou de surveillance archéologique devra être mis en oeuvre lors de l’exécution de tous les travaux d’excavation et de terrassement associés à la construction, à la réfection ou à la mise en valeur des ouvrages et bâtiments ou, encore, à l’implantation des infrastructures de service. Le cas échéant, des mesures (fouilles de sauvetage ou stabilisation du site) devront être prises pour éviter la dégradation des vestiges mis au jour à des fins d’exposition permanente.

4.8 Conclusion

Les résultats de cette évaluation environnementale nous amènent à conclure que, sur la base des renseignements disponibles, le concept de mise en valeur retenu pour ce site est acceptable, tant sur le plan environnemental que patrimonial. Dans l’ensemble, les orientations stratégiques qui y sont présentées appuient le mandat et les politiques de gestion de Parcs Canada. Toutefois, cet examen a fait ressortir certaines préoccupations sur le plan de la protection des ressources culturelles et naturelles. Des conflits potentiels entre la préservation de l’intégrité commémorative et la protection du patrimoine naturel ont également été notés. Ces conflits seront solutionnés ou, du moins, réduits lors de la préparation des différents plans de gestion, comme le plan de protection et de valorisation des paysages culturels et le plan de gestion des ressources naturelles.

À ce niveau général, l’évaluation environnementale indique que les orientations relatives à la mise en valeur de ce lieu historique n’entraveront pas l’atteinte des objectifs de préservation de l’intégrité commémorative et de protection du patrimoine naturel. Les impacts potentiels négatifs les plus préoccupants pourront être atténués par l’application de mesures techniques connues ou d’autres moyens prouvés efficaces dans le passé. Conformément aux dispositions de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (LCÉE) ou des directives et des politiques du ministère de l’Environnement et de Parcs Canada, des évaluations environnementales plus approfondies devront être entreprises à une étape ultérieure de planification, lorsque les projets seront suffisamment définis.


5.0 Conclusion

Bien que les orientations les plus importantes contenues dans ce plan directeur aient pour but d’assurer à long terme l’intégrité commémorative du lieu, diverses mesures sont également envisagées pour offrir aux visiteurs des services appropriés à leur séjour sur le lieu, protéger et valoriser les composantes environnementales du domaine Papineau ou encore favoriser l’intégration harmonieuse du lieu à sa région d’appartenance.

Des crédits substantiels ont été investis jusqu’ici pour compléter une première phase de mise en valeur du lieu historique. La mise en oeuvre de l’ensemble des interventions identifiées dans le plan requerra un effort financier significatif, lequel ne peut toutefois être envisagé à court terme. Il faudra vraisemblablement compter encore quelques années avant que le lieu puisse bénéficier des crédits nécessaires au parachèvement de sa mise en valeur. En même temps qu’il se penchera sur la problématique du financement des initiatives proposées, Parcs Canada recherchera l’appui financier de partenaires et de collaborateurs qui partagent les valeurs de l’organisme.

Au cours des années qui viennent, l’unité de gestion de l’Ouest du Québec, dont le lieu relève au plan administratif, s’efforcera le plus possible, à partir de ses propres budgets ou encore par le biais d’ententes de partenariat, d’implanter un certain nombre de mesures jugées prioritaires, soit :

  • effectuer divers travaux appropriés aux fins d’assurer la conservation des principales dépendances du domaine;
  • prendre les mesures requises pour préserver les vestiges de la glacière;
  • sous réserve d’une entente avec les partenaires impliqués, aménager une aire de stationnement pour les visiteurs et installer des équipements d’accueil et de signalisation adéquats;
  • compléter les études de planification par la réalisation d’un plan de valorisation du paysage pour l’ensemble du lieu historique;
  • entreprendre la réalisation du circuit d’interprétation extérieur proposé;
  • conclure une entente avec le diocèse anglican de Montréal aux fins de permettre à Parcs Canada d’aménager l’ancien musée familial selon le concept de mise en valeur arrêté;
  • conclure un accord avec Fairmont Le château Montebello en vertu duquel les limites de l’immeuble baillé pourraient inclure le portail d’entrée de l’allée seigneuriale ainsi que la maison du jardinier.

La mise en oeuvre des autres projets doit présentement être envisagée à plus long terme, si les ressources financières sont disponibles. Cependant, il se pourrait que certains projets qui impliquent un financement partagé puissent éventuellement être devancés en fonction des occasions de partenariat qui pourraient s’offrir.

Conformément aux dispositions de la Loi créant l’Agence Parcs Canada, une mise à jour de ce plan directeur est prévue en 2010. Toutes les orientations et mesures qui n’auront pas été réalisées à cette date seront réexaminées dans le cadre de la révision du plan. Dans l’intermède, le public intéressé pourra consulter le Rapport sur l’état des aires patrimoniales protégées, publié tous les deux ans, pour connaître l’état du lieu au regard des mesures prises pour en assumer l’intégrité commémorative.


6.0 Études et rapports de recherche

BÉDARD, Michel. Louis-Joseph Papineau : synthèse préliminaire des connaissances sur l’homme politique et le seigneur, Québec, Parcs Canada, 1993, 359 pages.

BÉDARD, Michel. Le domaine Papineau de Monte-Bello : contexte de développement, évolution du paysage culturel et synthèse de la présence humaine (1805-1929), Québec, Parcs Canada, 1997.

BÉRARD, Luc, et John. E. ZVONAR. Étude préliminaire de l’aménagement paysager – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1995, 78 pages.

DESMEULES, Claire. LHN du Manoir-Papineau, Montebello, Plan d’aménagement, Parcs Canada, mars 1998, 61 pages + illustrations.

DESMEULES, Claire. LHN du Manoir-Papineau, Montebello, Plan d’éclairage des pièces visées par le réaménagement historique, Parcs Canada, novembre 1997, 7 pages.

DESMEULES, Claire. Recherche sur la désignation des pièces du manoir Papineau de Montebello, Parcs Canada, 1996, 7 pages.

DESMEULES, Claire, et Raynald BILODEAU. LHN du Manoir-Papineau, Montebello, Gamme chromatique pour l’intérieur du manoir, Parcs Canada, décembre 1997, 17 pages.

FORTIER, Yvan. Étude architecturale du manoir et des dépendances de « Monte-Bello », Québec, Parcs Canada, 1997, 270 pages.

GAUTHIER, Richard, et Claire DESMEULES. Inventaire et évaluation des objets historiques provenant du LHN du Manoir-Papineau, Parcs Canada, 1998, 864 pages.

GUIMONT, Jacques. Évaluation du potentiel archéologique du lieu historique national du Manoir-Papineau à Montebello, Montebello, Société historique Louis-Joseph-Papineau, 1994, 304 pages.

GUIMONT, Jacques. L.H.N. du Manoir-Papineau (Montebello) : Résultats de l’intervention archéologique réalisée du 4 août au 5 septembre 1997, Québec, Parcs Canada, 1998, 164 pages + annexe 4 : Monique ÉLIE. « Surveillance archéologique des travaux de curetage au manoir Papineau (25-27 juin 1997) », p. 165-190.

GUIMONT, Jacques. L.H.N. du Manoir-Papineau à Montebello : Résultats de l’intervention archéologique réalisée du 15 juin au 14 juillet 1998, Québec, Parcs Canada, 1998, 164 pages + annexe 3 : Paul-Gaston L’ANGLAIS. Lieu historique national du Manoir-Papineau à Montebello : Regard archéologique sur des débris de verre, octobre 1998, 65 pages; annexe 4 : Catherine FORTIN. Analyse paléoethnobotanique du site du Manoir-Papineau, Montebello (site 83G), mars 1998, 22 pages; et annexe 5 : Les béliers hydrauliques, extrait de Ludger ROBITAILLE et Louis-A. BÉLISLE, Hygiène et plomberie, p. 45-48.

LAFORTE, Esther. Inventaire des ressources archéologiques paléohistoriques du sentier d’accès temporaire au lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1994, 8 pages.

LAFORTE, Esther. Étude de potentiel et inventaire des ressources archéologiques paléohistoriques du lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1994, 41 pages.

L’ÉCART-TYPE. Étude socio-économique préalable au concept de mise en valeur – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Parcs Canada, Québec, 1994, 82 pages.

L’ÉCART-TYPE. Étude socio-économique préalable au concept de mise en valeur – Annexe bibliographique, Québec, Parcs Canada, 1994, 43 pages.

LOCUS LOISIR ET CULTURE INC. Analyse de marché et plan d’actions stratégiques – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, 1997, 29 pages.

MARTEL, Renée. Inventaire préliminaire du mobilier et des objets – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Environnement Canada, Service des parcs, 1991, 261 pages.

MUSÉO•STHAR. Concept d’expérience de visite Version révisée – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1996, 38 pages.

PATRIMOINE CANADIEN, Parcs Canada. Énoncé d’intégrité commémorative - LHN du Manoir-Papineau, mars 1997, 25 pages + annexe.

PATRIMOINE CANADIEN, Parcs Canada. Document d’orientation - LHN du Manoir-Papineau, juillet 1996, 23 pages.

PATRIMOINE CANADIEN, Parcs Canada. Proposition de mise en valeur - LHN du Manoir-Papineau, septembre 1997, 56 pages.

PATRIMOINE CANADIEN, Parcs Canada. Compte rendu du programme de participation du public - LHN du Manoir-Papineau, mars 1998, 43 pages.

PATRIMOINE CANADIEN, Parcs Canada. Évaluation préalable au lieu historique national du Manoir-Papineau - Rapport de résultats, Service du marketing et des affaires du programme, septembre 1997, 37 pages + annexe.

PRUD’HOMME, Chantal. Étude sur les jardins et le potager – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 1995, 69 pages.

SAINT-LOUIS, Denis. Étude de potentiel d’utilisation, manoir Papineau, Québec, ministère des Communications du Canada, 1986, 190 pages.

SAINT-LOUIS, Denis. Étude préliminaire à la mise en valeur du manoir Papineau, Montebello (Québec), Québec, Parcs Canada, 1995, 203 pages et 4 annexes.

SAINT-LOUIS, AMYOT, CÔTÉ, LEAHY ARCH., GROUPE CONSEIL GENIVAR INC. Chantal PRUD’HOMME, arch. paysagiste. Rapport d’études conceptuelles - Manoir Papineau, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, 1997, 36 pages + 2 annexes.

SYLVICO. Inventaire biophysique du lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1994, 70 pages.

URBANEX. Études sur la clientèle actuelle et d’éventuels partenaires – 1. Recherche de partenaires, Québec, Parcs Canada, 1994, 30 pages.

URBANEX et IMPACT-RECHERCHE. Étude sur la clientèle actuelle et d’éventuels partenaires – 2. Profil de la clientèle – Lieu historique national du Manoir-Papineau, Québec, Parcs Canada, 1994, 45 pages.

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