Le carcajou
Depuis longtemps, le carcajou constitue un symbole de nature sauvage, de détermination inébranlable et d'indépendance absolue. Toutefois, il ne reste que très peu d'individus de cette espèce dans les Rocheuses canadiennes, et leurs mœurs et leur habitat sont de plus en plus menacés. Le carcajou, qu'on trouve partout dans les forêts de haute altitude et dans une bonne partie des régions alpines les plus rudes, occupe un territoire d'une énorme superficie. Cependant, l'être humain empiète de plus en plus fréquemment sur son habitat et risque de mettre en péril cette espèce remarquable. Le carcajou recherche la solitude et l'isolement, exactement comme les visiteurs de l'arrière-pays. Les femelles qui viennent de mettre bas sont tout particulièrement susceptibles d'être dérangées par les skieurs et les randonneurs.
Bref aperçu
Poids : Jusqu’à 18 kg (mâles) et jusqu’à 12 kg (femelles)
Régime alimentaire : Si on a d'abord cru que le carcajou se nourrissait presque exclusivement de charognes, on sait aujourd'hui qu'il s'agit d'un prédateur accompli. Il peut tuer un caribou, animal beaucoup plus gros que lui. L'été, il se nourrit habituellement de marmottes et de petits mammifères, et en hiver, sa diète se compose surtout de gros mammifères tués par des loups ou morts dans des avalanches, comme des chèvres sauvages des montagnes Rocheuses, des orignaux et des caribous.
Situation : Espèce préoccupante (Loi sur les espèces en péril)
Biologie et écologie
Le carcajou est le plus gros animal terrestre de la famille de la belette (mustélidés), qui comprend également le vison, la martre, le pékan, le blaireau et la loutre. Espèce véritablement holarctique, il se trouve dans toute l'Amérique du Nord ainsi qu'en Scandinavie et en Russie.
On prend souvent le carcajou (en particulier le mâle, qui peut atteindre deux fois la taille de la femelle) pour un petit ours ou pour une grosse marmotte des Rocheuses. De la taille d'un chien moyen, le mâle peut peser jusqu'à 18 kg et la femelle, 12 kg. Sa fourrure riche est de couleur brun foncé et présente des rayures jaunes sur les flancs. Chaque individu possède des marques argentées au dessin unique sur la tête, qu'il a grande et large par rapport au reste du corps.
Si vous apercevez un carcajou, estimez-vous chanceux : il s'agit d'un animal extrêmement rare. Selon les chercheurs de la Colombie-Britannique et de l'Idaho, il n'y a qu'un seul individu par secteur de 150 à 300 km2. Le carcajou parcourt un immense territoire à la recherche de nourriture et d'une compagne ou d'un compagnon. Dans le Grand Nord, les mâles peuvent occuper un territoire de plus de 3000 km2, soit la même superficie que les parcs nationaux Kootenay et Yoho réunis.
Ici, dans les montagnes, leur domaine vital est plus petit : le territoire d'un mâle représente habituellement entre 600 et 1000 km2, ce qui n'en demeure pas moins impressionnant, compte tenu du terrain accidenté que rencontre l'animal. Les femelles, en particulier celles qui ont des petits, se limitent à un territoire beaucoup plus restreint, soit généralement moins de 300 à 400 km2.
L'appétit du carcajou est entré dans la légende. Son nom scientifique, Gulo, vient du mot latin signifiant glouton, qui est d'ailleurs un autre nom de ce mammifère. Mais en réalité il ne mange pas plus qu'un autre animal de même taille. Seulement, il n'est pas particulièrement difficile quand vient le temps de choisir sa nourriture. Il possède également une remarquable habileté pour se faufiler dans les caches pour nourriture et les chalets de l'arrière-pays, ce qui lui a valu, auprès des trappeurs, la réputation d'être une créature démoniaque.
À l'exception des femelles qui ont des petits, le carcajou est un animal solitaire. Sa vie consiste à errer dans les forêts de moyenne et de haute altitude et dans la toundra alpine, en quête continuelle de nourriture.
Le carcajou s'accouple en mai ou en juin, mais l'implantation de l'œuf est différée jusqu'en décembre ou en janvier : cela dépend vraisemblablement de l'état physique de la femelle à ce moment. Si elle souffre de malnutrition parce que la nourriture se fait rare, ou si des perturbations lui causent un stress accru, elle risque de ne pas mener sa grossesse à terme. Vers la fin de l'hiver, la femelle gravide grimpe en altitude et trouve un endroit où mettre bas, entre de gros rochers couverts de neige ou sur un tablier d'éboulis, souvent dans un cirque glaciaire, un chaos d'avalanches ou une trouée de chablis. Là, elle prend soin de sa portée, qui comptera entre un et trois petits, au cours du printemps et de l'été qui suivent. c'est à ce moment que ce prédateur réputé pour sa férocité est le plus vulnérable.
Comment identifier les pistes de carcajou
- Les pistes du carcajou sont habituellement composées de séries de trois empreintes qui ont environ la taille de celles d'un gros chien.
- Si vous regardez de plus près l'empreinte du centre, vous verrez qu'elle a en fait été laissée par deux pattes.
- Il peut également arriver que les empreintes soient disposées en groupes de quatre (comme celles du lynx ou du loup), ou en groupes de deux (comme pour le pékan ou la martre).
- On peut normalement apercevoir la trace des cinq doigts et des griffes du carcajou; si les empreintes ne comportent que quatre doigts, elles appartiennent alors à un lynx (s'il n'y a pas de traces de griffes) ou à un loup (si on peut apercevoir des griffes).
Préoccupations relatives à la conservation
En dépit de sa réputation d'animal redoutable, le carcajou est sensible à certaines perturbations. En effet, les femelles qui viennent de mettre bas doivent laisser leurs petits seuls pour trouver de la nourriture, ce qui peut parfois prendre plusieurs jours à la fin de l'hiver. Les petits sont alors sans défense et vulnérables; c'est pourquoi la mère doit s'assurer de leur trouver une tanière sûre, où ils seront à l'abri de prédateurs éventuels. Si vous faites du ski dans l'arrière-pays, vous pourriez à votre insu perturber une femelle et ses petits et la forcer à trouver une nouvelle tanière et à y transporter sa progéniture
On trouvait autrefois le carcajou dans toutes les montagnes de l'ouest de l'Amérique du Nord et aussi loin vers le sud qu'au Colorado et en Californie. Aujourd'hui, il en reste relativement peu dans les 48 États continentaux. Dans le sud de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, le carcajou habite uniquement l'arrière-pays isolé de chaînes de montagnes escarpées. L'établissement humain et'culées de l'arrière-pays ont restreint l'aire de distribution géographique du carcajou, qui n'occupe plus que la partie nord-ouest du continent.
Dans l'Ouest du Canada, y compris dans les parcs des Rocheuses, le carcajou est considéré comme une espèce préoccupante par le Comité sur la situation des espèces en péril du Canada (COSEPAC). Ce classement reflète le petit nombre d'individus que compte l'espèce et la faible capacité de rétablissement de sa population. Les gouvernements provinciaux de l'Alberta et de la Colombie-Britannique reconnaissent que le carcajou est peut-être une espèce en péril et qu'il faut porter une attention spéciale à sa gestion..
Les parcs nationaux des Rocheuses canadiennes jouent un rôle essentiel puisqu'ils offrent au carcajou un habitat précieux près de la limite sud de son aire de distribution géographique. Ils servent de refuge important et de source de peuplement. Les recherches effectuées dans la chaîne Columbia ont montré que les femelles adultes passent la majeure partie de leur vie dans les parcs nationaux des Glaciers et du Mont-Revelstoke, là où les taux de survie sont meilleurs.
Toutefois, on ne peut pas compter uniquement sur les parcs pour abriter les carcajous de la région; ils ne constituent qu'une partie du paysage et de l'effort global entrepris dans le but de conserver ce remarquable prédateur. Étant donné la grandeur de leur domaine vital, la plupart des carcajous que l'on trouve dans les parcs nationaux passent une partie de leur vie à l'extérieur des limites de ces parcs, et ils sont alors vulnérables à diverses autres menaces, comme le piégeage et la perturbation provoquée par les activités récréatives motorisées.
- Date de modification :