La lutte contre la neige
Parc national des Glaciers
- Le pionnier des chemins de fer
- « Les hommes ont peur »
- « Un panorama montagneux sans pareil »
- Défaite
- La route
- La lutte se poursuit
© Musée Whyte
L'histoire du col Rogers est l'histoire de la lutte continuelle de l'homme contre les éléments.
Après un siècle d' exploration, les arpenteurs du chemin de fer Canadien-Pacifique (CP) n'ont trouvé qu'un seul passage permettant de franchir les Selkirk : le col Rogers. Sans ce col, le chemin de fer et la route devraient faire une longue boucle vers le nord et contourner les montagnes en longeant le fleuve Columbia. Les hommes ont relevé le défi des Selkirk et on réuni leurs forces pour lutter contre les avalanches, les incendies, les forêts inextricables et le terrain accidenté qui protègent le col Rogers.
Dans les années 1860 et 870 et la première partie des années 1880, les arpenteurs parcoururent les montagnes de l'ouest de long en large. En 1871, la Colombie-Britannique accepta d'entrer dans la Confédération à condition que l'on construise sans tarder un chemin de fer transcontinental qui relierait l'ouest à l'Est.
En 1865, Walter Moberly découvrit dans les montagnes Monashee adjacentes un passage qu'il baptisa : "col Eagle"; il remonta ensuite la rivière Illecillewaet dans les chaînons Selkirk. L'année suivante, son assistant Albert Perry, remonta plus avant l'Illecillewaet. Même en croyant vraiement à la possibilité de découvrir un passage au bout de cette vallée, il fit demi-tour avant d'en trouver un.
Le pionnier des chemins de fer
Arpenteur pour le compte des chemins de fer, le major A.B. Rogers était un homme déterminé. En 1881, l'équipe de Rogers réussit à dépasser le point dans vallée de l'Illecillewaet où Albert Perry avait fait demi-tour ans auparavant. Il aperçut au dessus de la source de la rivière Illecillewaet un col étroit au sommet des chaînons Selkirk. Étant à court de vivres, il dut revenir rapidement à la rivière Columbia mais il savait qu'il avait trouvé le passage que l'on cherchait depuis si longtemps. L'année suiante, il termina ses recherches en partant de l'est.
« Les hommes ont peur »
© Musée Glenbow et Archives
Une nouvelle force, avec laquelle les travailleurs étaient peu familiers, vint s'ajouter à tous ces problèmes.
« Les hommes ont peur », écrivait Ross à Van Horne, directeur général du CP, le 19 février 1885. « Les avalanches dans les Selkirk sont beaucoup plus importantes que je ne le croyais, et vous ne pouvez pas vous faire une idée de leur force et du danger qu'elles représentent pour la voie ». Sept hommes avaient déjà été ensevelis sous des avalanches; deux avaient été tués.
Ross atteignit le sommet du col Rogers le 17 août 1885, après avoir lutté pendant six mois contre les avalanches, les incendies de forêts et les orages.
La construction d'une bonne voie ferrée le long de la pente de la vallée de l'Illecillewaet se trouvait compliquée par les couloirs d'avalanches et les pentes abruptes. Ross résolut le problème en construisant la voie en lacets, la prolongeant ainsi de cinq kilomètres, mais l'amenant en tout sécurité le long du versant sud de la vallée.
Du col Rogers, Ross prolongea la voie jusquà la rivière Columbia et au-delà des chaînons Selkirk. Franchissant la rivière Columbia à l'endroit appelé à devenir Revelstoke, la voie traversa les montagnes Monashee par le col Eagle. Le 7 novembre 1885, la voie ferrée de Ross rejoignait les rails d'acier venant du Pacifique. Le dernier crampon fut enfoncé à Craigellachie, 48 kilomètres à l'ouest de Revelstoke : le premier chemin de fer transcontinental du Canada était né. On avait traversé les chaînons Selkirk et vaincu le col Rogers ... C'est ce qu'on pensait!
On venait de terminer la voie ferrée, quand il fallut l'abandonner à l'hiver. La ligne se trouva ensevelie sous des mèters de neige, et des avalanches arrachèrent des sections entières de rails nouvellement posés le long de la pente. L'année suivante, on entreprit la construction de 31 tunnels pour protéger la voie ferrée aux pires couloirs d'avalanches. Ensemble, les tunnels recouvraient plus de 6.5 kilomètres de voie; ils coûtèrent une fortune tant pour la construction que pour l'entretien.
« Un panorama montagneux sans pareil »
© Parcs Canada collection
Au pied du « Grand Glacier » (qui devint plus tard l'Illecillewaet), sur la ligne principale, la compagnie de chemin de fer du CP construisit Glacier House, hôtel traditionnel du Canadien Pacifique. Glacier House devint rapidement une attraction touristique très populaire et on décida de l'agrandir pour offrir 90 chambres et tous les services appropriés.
L'année où les premiers trains de voyageurs commencèrent à franchir le col, le gouvernement du Canada prit les mesures nécessaires pour préserver la région. Les sources d'eau chaude de Banff et les environs devinrent le premier parc national du Canada, en 1885. En 1886, on créait le parc national Yoho dans les Rocheuses, et le parc national Glacier, alors à ses tous débuts, dans la chaîne Columbia. Il y avait là, disait Van Horne, "un panorama montagneux sans pareil".
Défaite
La nuite du 4 mars 1910 commença comme beaucoup d'autres pour les hommes qui travaillaient au col Rogers. Léquipe se trouvait au sommet, en train d'enlever la neige qui sétait accumulée sur la voie à la suite d'un glissement important sur le mont Chéops, sur le versant ouest du col.
A 23 h 30, quelques hommes qui se trouvaient non loin de là entendirent un grondement sourd et le bruit d'arbres qui craquent. Une avalanche imprévue dévalait le mont Avalanche, sur le versant opposé à celui où la première avalanche s'était produite. Prisonniers du tunnel de neige dans lequel ils se trouvaient, la majorité des hommes n'entendirent même pas l'avalanche approcher. Cinquante-huit hommes périrent.
De 1885 à 1911, les avalanches firent plus de 200 morts. Face au danger, tant pour les employés que pour les voyageurs, aux frais disproportionnés et aux pentes abruptes, le CP s'avoua vaincu et décida d'abandonner le sommet du col.
Si les trains ne pouvaient passer par le col en toute sûreté, il faudrait qu'ils le traversent par un tunnel de huit kilomètres percé dans le mont Macdonald. Le tunnel Connaught, qui mesurait huit kilomètres, entra en service le 13 décembre 1916, et on cessa de passer par le col Rogers.
La route
© Parcs Canada
Les automobilistes qui traversent le col Rogers doivent emprunter plusieurs tunnels qui protègent la route des avalanches aux endroits particulièrement dangereux.
En outre, des barrages de terre, des levées, des tertres et des bassins de réception construits dans les couloirs d'avalanches retiennent la neige et régularisent le glissements. Ces moyens de protection ressemblent beaucoup à ceux qu'avait utilisés le CP à l'origine pour protéger la voie ferrée.
La route est également protégée par un système mobile de défense. Des employés étudient les conditions atmosphériques à l'année longue y compris en hiver et l'épaisseur de la neige. Des dispositifs de lectures à distance placés dans des zones spéciales d'étude, très haut dans la montagne au-dessus du col, transmettent sans arrêt des informations météorologiques au centre de prévision. Dans certains cas le prévisionniste peut fermer la route et donner les instructions nécessaires pour que l'artillerie déclenche les avalanches aux endroits où la neige n'est pas stable.
On a prévu le long de la route des endroits où l'on peut amener le canon howitzer de 105 millimètres dont des membres du Royal Canadian Horse Artillery se servent pour déclencher des avalanches lorsque le prévisionniste décide que les conditions de neige s'y prêtent le mieux. Les routes étant fermées, les avalanches ne risquent pas de faire des victimes.
La Transcanadienne a entraîné des changements importants dans le parc national Glacier. D'une part. la présence de l'homme modifie le milieu naturel le long de la route mais d'autre part, des millions de visiteurs ont chaque année l'occasion d'admirer une des régions montagneuses les plus sauvages au monde.
La lutte se poursuit
Il serait faux de croire que le col Rogers a été asservi. L'hiver, des hommes et des machines doivent être de service nuit et jour pour que la route reste ouverte. Ça coute trées cher en argent et en efforts humains. Chaque hiver, les chutes de neige et les avalanches, ces forces éternelles, reprennent leur lutte incessante.
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