Géologie
Parc national du Gros-Morne
Parc national du Canada du Gros-Morne
L'histoire dans les pierres
Les roches du parc national du Gros-Morne et des zones voisines de l'ouest de Terre-Neuve sont reconnues dans le monde entier pour l'éclairage qu'elles jettent sur l'origine et l'évolution des anciennes chaînes de montagnes. La géologie du parc est une illustration concrète du phénomène de la tectonique des plaques, l'un des concepts dominants de la science moderne. Pour cette raison et pour bien d'autres, le parc national du Gros-Morne a été désigné Site du patrimoine mondial de l'UNESCO (Organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture).
Une ancienne chaîne de montagnes et un nouvel océan
Il y a environ 1,2 milliard d'années, au cours du Précambrien, le coeur de l'Amérique du Nord contemporaine entamait une lente collision avec un autre continent; cette rencontre allait soulever une longue chaîne de montagnes, dont les seuls vestiges sont aujourd'hui les granites et les gneiss fortement érodés des monts Long Range.
Vers la fin du Précambrien, ce supercontinent a commencé à se diviser. À l'endroit de cette fracture, de profondes fissures se sont ouvertes et ont été envahies par la roche en fusion remontée des profondeurs de la Terre. Ce magma refroidi forme les dykes de diabase qu'on peut observer sur les falaises des étangs Western Brook et Ten Mile.Il y a 570 millions d'années que le continent s'est scindé complètement; le bassin ainsi formé a été envahi par les eaux d'un nouvel océan, l'océan Iapetus, ancêtre de l'Atlantique actuel. Certaines des roches du parc national du Gros-Morne faisaient partie de la marge continentale occidentale de ce nouvel océan, située à l'époque au sud de l'Équateur.
Une marge continentale sous les Tropiques
Au cours des 100 millions d'années suivantes (Cambrien et Ordovicien), l'Amérique du Nord originale et la zone où se trouve aujourd'hui le parc national du Gros-Morne a commencé à dériver vers le nord. Des sédiments arrachés au continent nord-américain se sont accumulés dans l'océan Iapetus pour former en mer une vaste plate-forme continentale.
Les premiers de ces sédiments étaient du sable et du limon déposé en eau peu profonde; ils sont devenus les quartzites qui coiffent le mont Gros Morne et recouvrent immédiatement les anciens granites et gneiss. Peu à peu, ces apports de sédiments ont diminué, alors que des bancs de carbonates (débris de gastéropodes, de brachiopodes, de trilobites et de tapis d'algues) se sont accumulés dans les hauts-fonds tropicaux pour former les épais dépôts de calcaire et de dolomie du parc.À proximité de l'ancienne plate-forme tropicale, les courants ont détaché des sédiments qui ont créé des coulées de débris en eau profonde. Ces matériaux se sont retrouvés au bas du talus continental où ils ont formé un grès à grain grossier. La surcharge, les tremblements de terre et la foudre ont provoqué à l'occasion des avalanches sous-marines; des milliers de tonnes de calcaire, détachées du bord de la plate-forme continentale, se sont déposées en débris sur le talus continental. Ces débris ont fini par se cimenter pour former du conglomérat calcaire, aussi appelé brèche, et des shales.
Poursuite de la formation d'une croûte océanique
Il y a environ 500 millions d'années, l'océan Iapetus a commencé à se refermer le long d'une zone de subduction loin à l'est. À cet endroit, le bord d'une plaque océanique a commencé à s'enfoncer sous la plaque voisine. Les matériaux emprisonnés dans cette zone de subduction ont été déformés et métamorphisés.Avec la fermeture de l'océan Iapetus, une nouvelle croûte océanique s'est formée lorsque le magma du manteau terrestre a jailli vers le haut pour former de la péridotite et de la dunite, puis du gabbro. La zone de transition où ils sont entrés en contact représente la base de l'ancienne croûte océanique. L'ouest de Terre-Neuve est l'un des rares endroits au monde où cette zone, appelée discontinuité de Mohoro-vicic, et la partie supérieure du manteau peuvent être étudiée directement.Plusieurs couches de croûte océanique se sont déposées sur la limite entre la croûte et le manteau. La première était du gabbro; ceci dit, toute la roche fondue ne s'est par transformée en gabbro en se refroidissant : une partie, poussée vers le haut, s'est infiltrée dans des fissures verticales parallèles pour former des dykes lités, aussi appelées diabases, et nourrir des coulées de lave qui, refroidies au fond de l'océan, ont formé du basalte en coussins.Bien que ces dykes soient d'une composition similaire à celles qui traversent les roches du Précambrien, elles sont beaucoup plus jeunes. Réunie, cette séquence de péridotite, de gabbro, de dykes lités et de basalte en coussins est appelée ophiolite; elle représente une tranche complète du fond de l'océan Iapetus.
Mise en place d'une ophiolite
La subduction s'est poursuivie jusqu'à la fermeture de l'océan Iapetus, il y a environ 475 millions d'années. Certains des matériaux ophiolitiques ont été charriés, encore chauds, à la surface de la plaque crustale descendante, y incorporant des fragments de lave fraîche du fond marin. La plaque ophiolitique a ensuite été poussée lentement au-dessus de la marge continentale. En chemin, cette plaque aura entraînée la formation de grès vert et de mélange.Les roches les plus récentes sont les shales, formés de boue et d'autres sédiments détachés des roches océaniques charriées.
Les séquelles
Les bouleversements qui ont permis la création des divers types de substratum rocheux du parc national du Gros-Morne ne marquent pas la fin de l'histoire géologique de la région. Le choc des continents s'est poursuivi 100 millions d'années, donnant notamment naissance à la chaîne des Appalaches. Pendant le Dévonien, d'amples mouvements de la croûte terrestre ont plissé, disloqué et soulevé les roches du parc.Depuis le Dévonien, l'assemblage de roches dans le parc est demeuré relativement stable, exception faite de l'action de l'érosion, du soulèvement et des glissements le long des failles. Les glaciations et dégels répétés des deux derniers millions d'années, associés aux changements de niveau de la mer qu'ils ont causés, ont donné au parc le visage que nous lui connaissons aujourd'hui.
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