Des sarracénies, des rossolis et des utriculaires... OH LÀ LÀ!

Aire marine nationale de conservation du Lac-Supérieur

Par Kimberly Teager

Les plantes carnivores ont évolué dans des milieux où les nutriments comme l’azote et le phosphore, nécessaires à la croissance, sont rares. Plutôt que de dépendre du sol pour obtenir ces éléments essentiels, elles les obtiennent directement auprès des insectes et d’autres organismes au moyen de différentes stratégies prédatrices et à l’aide de feuilles et de systèmes digestifs bien particuliers.

Dans le numéro d’hiver d’au fil de L’EAU, l’article « Découvrez les plantes les plus intéressantes de la côte nord » présentait l’une de ces plantes, la grassette vulgaire (Pinguicula vulgaris), mais il y a beaucoup d’autres plantes étranges et envoûtantes dans l’aire marine nationale de conservation (AMNC) du Lac-Supérieur.

La fleur emblème de Terre-Neuve-et-Labrador, la sarracénie pourpre (Sarracenia purpurea), est l’exemple local le plus célèbre de plante carnivore. Sa grande taille, ses couleurs vives ainsi que ses fleurs et ses feuilles à la morphologie remarquable attireront sans doute votre attention aussi facilement qu’elle capture ses proies. Les insectes attirés par le nectar odorant et glissant de la plante se retrouvent piégés dans un bassin d’eau contenue dans ses feuilles tubulaires, tandis que les poils raides et pointant vers le bas qui recouvrent l’intérieur des feuilles rendent toute fuite impossible. La plante libère alors des enzymes pour dissoudre sa proie et absorbe les nutriments libérés dans l’eau. Les sarracénies peuvent également consommer des amphibiens ou de petits mammifères. Une étude réalisée en 2019 a trouvé des restes de salamandres tachetées dans l’une des cinq sarracénies pourpres étudiées dans le parc provincial Algonquin.

Les petits et délicats rossolis (Drosera spp.) passent facilement inaperçus parmi les mousses, mais ils ont fasciné Charles Darwin, qui un jour a écrit : « En ce moment, je m’intéresse plus aux Drosera qu’à l’origine de toutes les espèces dans le monde ». Trois espèces de rossolis ont été trouvées dans l’AMNC du Lac-Supérieur, notamment le rossolis à feuilles rondes (D. rotundifolia), le droséra à feuilles linéaires (D. linearis) et le rossolis d’Angleterre (D. anglica), tandis que le rossolis intermédiaire (D. intermedia) vit dans les zones humides adjacentes. Leurs petites feuilles sont couvertes de poils rouge vif, chacun portant une gouttelette de liquide collant semblable à de la rosée, prête à piéger tout insecte qui la touche. La feuille s’enroule ensuite autour de sa prise et libère son enzyme digestive, ne laissant derrière elle que l’exosquelette.

Les utriculaires (Utricularia spp.) constituent le groupe le plus diversifié de plantes carnivores avec environ 240 espèces connues dans le monde. Les espèces présentes dans l’AMNC du Lac-Supérieur, telles que l’utriculaire vulgaire (U. vulgaris), l’utriculaire mineure (U. minor) et l’utriculaire intermédiaire (U. intermedia), sont strictement aquatiques et flottent librement sur l’eau, à l’exception de l’utriculaire cornue (U. cornuta), qui est subaquatique ou terrestre. Bien qu’elles ne soient pas aussi flamboyantes que les autres plantes carnivores, les utriculaires compensent leur manque de charisme par leur rapidité. En fait, ce sont les prédateurs les plus rapides du règne végétal! Les pièges membraneux de leurs feuilles, qui ressemblent à des plumes, sont dotés de poils qui détectent les organismes aquatiques à proximité. Les proies sont alors aspirées à des forces 600 fois supérieures à la gravité, en moins d’une milliseconde!

Les plantes carnivores peuvent être particulièrement douées pour se débrouiller seules, mais des recherches laissent entendre qu’un quart de toutes les plantes carnivores dans le monde, y compris la célèbre dionée gobe-mouches, sont très vulnérables à l’extinction en raison des changements climatiques, de la perte ou de la dégradation de l’habitat, et du braconnage. Faites attention où vous mettez les pieds lorsque vous explorez l’AMNC du Lac-Supérieur, et n’hésitez pas à faire part de vos observations sur iNaturalist!

 

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