Histoire du site

Lieu historique national du Fort-Anne

Quelque 70 pionniers écossais fondèrent ici une colonie en 1629 à 1632.

 La charte de 1621

Plan rapproché de la charte de 1621 montrant le nom Nova Scotia écrit pour la première fois
Plan rapproché de la charte de 1621 montrant le nom Nova Scotia écrit pour la première fois

En 1621, pour étendre son hégémonie aux terres d'outre-mer, le roi Jacques Ier d'Angleterre et Jacques VI d'Écosse concéda à sir William Alexander, un noble écossais, la charte de la Nouvelle-Écosse, en vue de la fondation d'une colonie écossaise en Amérique du Nord.

Cette charte couvrait le territoire qui réunit aujourd'hui les provinces Maritimes et la Gaspésie. (À l'époque, la France revendiquait une partie de ce territoire, à savoir l'Acadie, tandis que les Mi'kmaqs considéraient la région entière comme leur Mi'kmaki,ou territoire ancestral.)

La charte conférait à Alexander des droits sur les minéraux et les ressources halieutiques, le pouvoir d'adopter des lois, de former un gouvernement, d'intercepter les pirates et de nouer des relations pacifiques avec les Autochtones, ainsi que la permission d'ériger un ou plusieurs forts.

Cette colonie ne vit le jour que huit ans plus tard. Malgré tout, les armoiries de la Nouvelle-Écosse furent approuvées en 1625, année où Charles Ier accéda au trône. Quelque 400 ans plus tard, dans les années 1920, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse adopta le drapeau et les armoiries de la province en s'inspirant du blason créé en 1625.

 Les colonies écossaises

En 1629, huit ans après l'obtention de la charte et quatre ans après l'approbation des armoiries, sir William Alexander fils amena un groupe de 70 hommes et femmes en Nouvelle-Écosse pour coloniser le territoire.

Un second groupe, formé de colons anglais et dirigé par sir James Stewart de Killeith, lord Ochiltree, fonda une colonie à Baleine, au Cap-Breton, à quelques kilomètres au nord de l'endroit où les Français devaient plus tard fonder Louisbourg. Ces colons y érigèrent le fort Rosemar, que les Français détruisirent deux mois plus tard.

 Le fort Charles

Entre-temps, Alexander, avec l'aide de Claude de Saint-Étienne de La Tour, établit son siège à Port-Royal (renommé Annapolis Royal par les Anglais après 1713). De cet endroit, il supervisa la construction du fort Charles, baptisé ainsi en l'honneur du roi Charles Ier.

Conçu par le capitaine Ogilvie, le fort avait la forme d'un pentagone, et les pointes étaient adaptées aussi bien à l'offensive qu'à la défense. Il renfermait huit pièces d'artillerie : quatre demi-couleuvrines et quatre moyennes. Les colons et les membres d'équipage des navires y construisirent également une résidence pour Alexander et un entrepôt.

Pendant le premier hiver, 30 des 70 colons du fort Charles périrent. D'autres colons arrivèrent en mai 1630 avec le chef mi'kmaw Segipt et sa famille, qui étaient allés rencontrer le roi en Angleterre.

 Le traité de Saint‑Germain-en-Laye

Lors de son voyage en Angleterre à l'automne de 1630, Alexander apprit que des négociations étaient en cours en vue de la restitution du territoire à la France. En 1632, cette région, de même que le reste de la Nouvelle-France (le Canada et l'Acadie), redevint une possession française en vertu du traité de Saint‑Germain-en-Laye.

En tout, 47 des colons du fort Charles retournèrent en Angleterre à bord du Saint-Jean, l'un des navires qui devait plus tard transporter des colons français à La Hève (LaHave)(3) sous les ordres du nouveau gouverneur, Isaac de Razilly. Quelques colons d'Alexander demeurèrent dans la colonie. Pour indemniser partiellement Alexander père de ses lourdes pertes financières, le roi le nomma comte de Stirling.

Le fort LaHave a été classé lieu historique national en 1924. Fondé en 1632, cet ouvrage de fortification abritait la première colonie française permanente de l'Acadie.

 L'emplacement du fort Charles

Photo aérienne du lieu historique national du Fort-Anne avec un cercle indiquant l’emplacement du fort Charles à la limite du fort Anne, près de la rivière Annapolis.
Emplacement du lieu historique national du Fort-Charles par apport au lieu historique national du Fort-Anne.

Le fort Charles fut construit sur l'escarpement qui domine le confluent des rivières Annapolis et Allain. Cet endroit est l'un des points les plus élevés de la rivière Annapolis, cours d'eau bordé de marais salés bas qui, à l'époque des Écossais, étaient inondés par les marées printanières de la baie de Fundy, mais qui sont protégés par des digues depuis 1640 environ. Le site offre une vue imprenable sur la rivière Annapolis et l'île Goat.

Comme il s'agit d'une hauteur entourée de terrain relativement plat, l'endroit servait de campement aux Mi'kmaqs et à d'autres tribus autochtones qui voyageaient en canot de la baie de Fundy à la côte sud de la Nouvelle-Écosse, en parcourant les cours d'eau de ce qui est aujourd'hui le parc national et le lieu historique national Kejimkujik. C'est également là que les Français, pendant la période de l'Habitation de Port-Royal (1605-1613), faisaient pousser du blé et peut-être également d'autres cultures.

Pendant bien des années, on crut que le fort Charles avait été construit du côté nord de la rivière Annapolis, sur une élévation de terrain située derrière l'Habitation de Port-Royal, poste de traite et centre névralgique des efforts de colonisation de la France de 1605 à 1613.

Une carte historique en noir et blanc dessinée à la main montrant l’endroit où le fort est situé.
La carte de 1725 qui montre les ruines de l’Habitation, l’emplacement du fort Charles et les restes du moulin

Une carte française de 1708 et une carte anglaise de 1725 y plaçaient toutes deux le fort, et la tradition orale perpétua l'idée. (La carte de 1725 faisait mention du « Scotch Fort »). Cependant, l'endroit ne concorde pas avec les détails d'un récit de première main publié en 1940, où il est écrit que Claude de Saint-Étienne de La Tour, qui avait vécu à l'Habitation et qui se trouvait à bord du navire avec Alexander, montra à ce dernier l'emplacement de l'Habitation, puis celui d'un ouvrage de fortification appelé fort La Tour. Alexander, qui n'aurait aimé ni l'un ni l'autre, remonta la rivière jusqu'à un endroit situé près d'un petit cours d'eau. Une version plus détaillée du document qui a été publiée en 1992 fait état de la présence de ruines d'un moulin français au bord du cours d'eau. Ce détail permet de confirmer qu'il s'agissait de la rivière Allain, où les Français avaient construit un moulin à provende en 1607 pour moudre le grain cultivé dans les champs de blé avoisinants.

Les preuves

Les fouilles archéologiques estivales réalisées de 1989 à 1992 à l'intérieur du lieu historique national du Fort-Anne permirent de confirmer l'emplacement du fort Charles.

Les fouilles viennent aussi corroborer les textes historiques qui indiquent que, après le départ des Écossais, les Français occupèrent le fort avant de construire un nouvel ouvrage de terre.

On sait que ces travaux de terrassement ont été effectués en 1643. Les Français avaient pris possession de Port-Royal, qui appartenait alors aux Écossais. Après la mort de Razilly en 1636, Charles de Menou d'Aulnay (2) avait réinstallé les colons de LaHave à Port-Royal pour y établir son siège. 

Le fort de 1643 fut le premier de quatre ouvrages de fortification français qui se succédèrent au même endroit. Le quatrième, qui tomba aux mains des troupes de l'Angleterre et de la Nouvelle-Angleterre en 1710 pendant la guerre de Succession d'Espagne, en est venu à s'appeler fort Anne au début du XIXe siècle. Les Anglais y maintinrent une garnison jusqu'à l'automne de 1854.

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