Milieux humides
Parc national des Îles-de-la-Baie-Georgienne
© Parks Canada
Les marécages, les tourbières et les marais sont trois genres distincts de milieux humides de la zone des Trente Mille Îles. Leurs caractéristiques fondamentales sont les suivantes.
Marais
Les marais se forment généralement le long des littoraux protégés ou encore dans des lacs ou dans des étangs peu profonds. La flore et la faune y sont extrêmement abondantes, les quenouilles étant le type dominant de végétation.
Tourbières
Les tourbières se forment dans des mares profondes aux parois escarpées, qui sont mal drainées. Elles font généralement partie du paysage septentrional, mais existent aussi dans des régions plus méridionales comme celle de la baie Georgienne où les glaciers ont sculpté des cuvettes. Au premier stade de leur formation, les tourbières sont relativement dénuées de vie, si ce n'est de quelques espèces particulières de plantes - comme la sphaigne - qui réussissent à vivre dans des conditions d'acidité élevée et de pénurie d'oxygène.
Marécages
Un marécage est essentiellement une forêt ombrophile. Dans notre région, un marécage abrite le frêne noir, le saule, le cornouiller et le bouleau jaune. À mesure que le marécage vieillit, le sol s'accumule, ce qui assèche le milieu et favorise la croissance de nouvelles espèces d'arbres. Les marais, les tourbières et les marécages subissent tous un processus de succession, mais chacun possède une communauté culminante de plantes et d'animaux qui lui est propre.
Marécages et forêts ombrophiles
En raison d'un mauvais drainage, beaucoup de cuvettes des îles contiennent des peuplements de végétation de forêts ombrophiles ou marécageuses. Il y pousse des arbres résistants à l'eau comme le thuya occidental, le bouleau jaune, le frêne noir et le saule. Les grandes touffes de prêles et de fougères abondent dans les milieux humides, ce qui crée un environnement ressemblant à une jungle. Les troncs qui pourrissent sont des lits fertiles pour les tapis de mousses et pour les jeunes plants. La cédrière, dans le sud de l'île Beausoleil, est un exemple de ce type d'habitat. L'eau résurgente qui s'écoule de la colline centrale de l'île est piégée dans la série de cordons littoraux qui sont restés en place après le retrait du lac glaciaire Algonquin, il y a très longtemps. Le jeune marécage d'autrefois a pris de l'âge et est devenu un milieu qui n'est ni tout à fait un marécage ni tout à fait une forêt de conifères plus humide que la normale.
Beaucoup de marécages contiennent aussi de petits étangs qui s'apparentent à des tourbières. Des massifs de végétation palustre poussent ici et là où l'eau est plus abondante, nous rappelant que beaucoup de marécages ont d'abord été des marais.
La forme de vie sans doute la plus visible est le maringouin, particulièrement en juin lorsque ces aires marécageuses sont encore gorgées d'eau. Les rainettes versicolores, les grenouilles des bois, les salamandres et les canards branchus y vivent très bien.
Littoraux marécageux
Les marais de la baie Georgienne sont de nature éphémère. Les niveaux d'eau de la baie semblent suivre un cycle de 10 ans qui comporte de hautes eaux et de basses eaux. Les marais se développent sur la côte est des îles lorsque les eaux sont basses. On peut apercevoir des restes de ces marais même par hautes eaux, comme c'est actuellement le cas.
Les quenouilles, les carex et la glycérie géante (mesurant de deux à trois mètres de haut, l'une des plus hautes herbes indigènes du Canada) servent d'abri aux oiseaux nicheurs comme le butor d'Amérique ou le râle de Virginie. Grâce à sa poitrine rayée et à son habitude de demeurer immobile lorsqu'il pressent un danger, le butor est remarquablement bien adapté à son environnement.
Les carouges à épaulettes gardent bruyamment leur territoire de nidification. Tout comme les nids " de service " des troglodytes des marais, les leurs sont tissés à même les tiges des quenouilles.
Sous la surface, dans la vase, les nectures tachetés agitent leurs branchies sans arrêt pour extraire l'oxygène de l'eau. Ils se nourrissent d'insectes et d'escargots ainsi que d'écrevisses qui abondent dans ce milieu. Les tortues musquées (aussi appelées marmites puantes à cause de leur odeur), les tortues peintes du Midland, les chélydres serpentines, les ouaouarons, les grenouilles vertes et les serpents d'eau sont quelques-uns des reptiles et amphibiens que l'on trouve en ces lieux.
Les poissons qui vivent ici - comme le crapet-soleil, le crapet arlequin, la perchaude et la carpe - doivent être aptes à tolérer des eaux tièdes, peu profondes et souvent boueuses. Le rat musqué est un autre habitant qui survit à l'hiver en se nourrissant des racines des plantes aquatiques comme les quenouilles, les sagittaires, les nénuphars et les calla des marais.
Parmi les autres plantes qui vivent dans les marais, il y a la renouée amphibie (mets favori des canards sauvages) et la pontédérie cordée qui sert de cachette au brochet qui se glisse entre ses tiges et ses feuilles sous l'eau pour se protéger.
Il est intéressant de souligner que si les marais des prairies se forment principalement dans les mares vaseuses et dans les étangs, celles des Grands Lacs se trouvent surtout le long des rivages de ces immenses étendues d'eau.
Tourbières et étangs de castors
Les petites tourbières sont caractéristiques de la région de la baie Georgienne; elles sont dispersés dans toute la région. Beaucoup se sont formées dans les cuvettes et les dépressions laissées par les glaciers. D'autres ont été formées plus récemment par des digues de castors.
Ces étangs souvent profonds sont remplis d'eau stagnante, faute de drainage efficace. À cause du niveau d'acidité élevé de l'eau, ils sont habités par une communauté particulière de plantes et d'animaux. Une jeune tourbière est relativement stérile, et seules certaines plantes peuvent survivre à ses conditions rigoureuses. En outre, la nature acide de l'eau et la pénurie d'oxygène dissous ralentissent la décomposition. Par conséquent, le recyclage des substances nutritives est minime, et la nécromasse s'accumule au lieu de se décomposer rapidement. Vous utilisez peut-être d'ailleurs dans votre parterre cette matière qu'on appelle mousse de tourbe.
La sphaigne est une forme de vie clé dans une tourbière. Elle pousse sur le pourtour et forme, dans certains cas, des mattes qui flottent sur l'eau. Lorsque les tourbières vieillissent, la matte peut étouffer entièrement l'étang. Les mattes servent de base à la pogonie langue-de-serpent et au calopogon gracieux, deux orchidées dont la floraison illumine les tourbières au mois de juin. Le cassandre caliculé, le thé du Labrador, le myrique baumier et l'airelle canneberge sont des plantes aux feuilles très épaisses et coriaces qui poussent aussi sur ce " matelas " flottant. Bien que cela puisse sembler étrange, il est difficile pour une plante d'aller chercher de l'eau dans une tourbière. C'est pourquoi les plantes à feuilles charnues, comme le cassandre caliculé, y poussent. On retrouve ce type d'adaptation chez les plantes des habitats chauds et secs.
À mesure que la tourbière grossit, la variété de la faune et de la flore s'accroît. Sur les bords de l'étang, les carex et diverses plantes de terrains marécageux poussent en abondance. À mesure que ces plantes se décomposent, l'eau est de plus en plus pauvre en oxygène, et les poissons ne peuvent plus y vivre.
Il est fréquent de voir des tortues peintes bien alignées, " en rang d'oignons ". De temps à autre, les chélydres serpentines s'étendent sur les mattes de sphaigne flottant pour prendre du soleil. Des tortues plus discrètes, comme la tortue mouchetée ou la tortue ponctuée, se fraient un chemin dans les lentilles d'eau flottantes ou restent cachées dans les petits étangs isolés aux bords herbeux. Ces deux tortues, que l'on aperçoit rarement, sont des espèces menacées.
Aussi menacé d'extinction, le timide massassauga se tient à proximité d'un étang ou se chauffe au soleil sur une digue de castors où abonde sa nourriture préférée : grenouilles et autres petits amphibiens et mammifères.
Les grenouilles léopard et les grenouilles vertes utilisent leur camouflage pour se protéger des serpents d'eau en chasse. Tôt au printemps, pendant la saison de la reproduction, la rainette crucifère " piaille " et les ouaouarons poussent des cris rappelant les cornes de brume. Les tritons verts pondent leurs oeufs dans les eaux peu profondes.
Les insectes aquatiques, comme les scorpions d'eau et les punaises d'eau géantes, ainsi que leurs proies, les nymphes de libellule et de perle, les larves de phrygane et les dytiques, sont très nombreux. Les larves de phrygane sont tout à fait particulières en ce qu'elles construisent des " maisons " ou huttes avec de minuscules cailloux ou avec des miettes de végétation pour se protéger.
Les rives de ces tourbières reçoivent régulièrement la visite de cerfs, de rats musqués, de ratons laveurs et de visons qui laissent des pistes bien visibles dans la boue molle. Bien entendu, chaque étang possède son couple de castors qui y a construit sa hutte. Comme ce sont des animaux nocturnes, vous ne verrez peut-être pas les castors au travail, mais ils laissent des indices indubitables de leur présence : des arbres tombés et des digues. Au début de l'hiver, vous pouvez assister aux glissades de la loutre de rivière sur la neige.
Il est possible d'apercevoir, à l'occasion, les sternes et les grands hérons s'approvisionnant sur la matte de sphaigne. Une grande variété de canards ainsi que des huards nichent sur les rives ou s'abritent en ce lieu pendant les migrations. Les étangs sont fréquemment bordés de squelettes rigides d'arbres que les castors ont fait mourir en construisant leurs digues qui élèvent le niveau de l'étang. Ces arbres sont des lieux de nidification privilégiés pour les hirondelles bicolores et les tyrans tritris, mais ils donnent une ambiance sinistre aux tourbières et aux étangs.
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