Protocole d'entente pour l'établissement de la réserve de parc national à Pituamkek (île Hog et les dunes)
PROTOCOLE D’ENTENTE
ENTRE
SA MAJESTÉ LA REINE DU CANADA, REPRÉSENTÉE PAR LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, AGISSANT POUR LE COMPTE DE L’AGENCE PARCS CANADA
(« CANADA »)
ET
MI’KMAWEY KAPMNT TA’N NIKANA’TU’TIJ EPEKWITNEWAQ MI’KMAW SAQMAQ (LE GOUVERNEMENT DE LA NATION MI’KMAW DE L’ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD, REPRÉSENTÉ PAR LES CHEFS DE L’ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD)
(« MI’KMAQ EPEKWITNEWAQ » [LA NATION MI’KMAW D’EPEKWITK])
DÉSIGNÉS COLLECTIVEMENT COMME LES « PARTIES » DANS LE CADRE DU PRÉSENT PROTOCOLE D’ENTENTE
CONCERNANT
L’ÉTABLISSEMENT D’UNE RÉSERVE DE PARC NATIONAL À
Pituamkek
(RÉGION DE L’ÎLE HOG ET DES DUNES SANDHILLS DE L’ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD)
PRÉAMBULE
- ATTENDU QUE Pituamkek (« à la longue dune de sable ») contribue à la subsistance des Epekwitnewaq Mi’kmaq (Mi’kmaq de l’Île du Prince Édouard) depuis des milliers d’années et continuera de le faire;
- ATTENDU QUE les Traités de paix et d’amitié de 1725, 1749, 1752, 1760-1761 et 1779, conclus entre la Couronne et les Mi’kmaq, sont des accords solennels et contraignants qui établissent des promesses continuelles ainsi que des obligations et des avantages mutuels pour les Mi’kmaq et la Couronne, mais qui ne cèdent pas le titre ancestral Mi’kmaq sur les terres;
- ATTENDU QUE le paragraphe 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme « [l]es droits existants – ancestraux ou issus de traités – des peuples autochtones du Canada […] »;
- ATTENDU QUE les parties appuient entièrement la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et s’engagent à la mettre en œuvre dans le cadre de la Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, L.C., 2021, ch. 14;
- ATTENDU QUE les parties s’engagent à une réconciliation véritable et durable et à une relation de gouvernement à gouvernement renouvelée qui reconnaît la présence permanente et les droits inhérents des Epekwitnewaq Mi’kmaq, dont les communautés membres comprennent la Première Nation de Lennox Island et la Première Nation d’Abegweit;
- ATTENDU QUE les parties ont annoncé conjointement en 2019 le lancement d’un processus tripartite visant à déterminer les modalités d’établissement, d’aménagement et d’exploitation d’une réserve de parc national de façon à traiter la région avec le plus haut degré de respect et la protéger et à la gérer pour les générations actuelles et futures des Epekwitnewaq Mi’kmaq, des habitants de l’Île du Prince Édouard et de tous les Canadiens;
- ATTENDU QUE, après avoir examiné les résultats d’une série d’études et de consultations auprès de la communauté et des parties prenantes, le gouvernement du Canada et le Mi’kmaq Epekwitnewaq Kapmntemuow (gouvernement de la Nation Mi’kmaq de l’Île du Prince Édouard) ont conclu que la réserve de parc national proposée est faisable et ont convenu d’entreprendre les travaux nécessaires pour protéger la région de Pituamkek en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada;
- ATTENDU QUE l’établissement d’une réserve de parc national à Pituamkek contribuera aux engagements nationaux et internationaux du Canada et servira de modèle de collaboration entre la Couronne et les gouvernements autochtones;
- ATTENDU QUE la protection des espèces et des écosystèmes d’importance culturelle ainsi que des espèces et des habitats en voie de disparition est un objectif commun des parties pour préserver le lien vivant entre la terre et les personnes, entre l’eau et la terre et entre la culture et l’écologie au profit des générations actuelles et futures, et pour reconnaître la nécessité d’une gestion élargie des valeurs culturelles et écologiques dans l’ensemble d’Epekwitk (Île du Prince Édouard), alors que les parties travaillent à l’atteinte de l’objectif commun de protéger la région de Pituamkek;
- ATTENDU QUE le Mi’kmaq Epekwitknewaq Kapmntemuow a désigné Pituamkek comme un paysage patrimonial Mi’kmaq et une aire protégée et de conservation autochtone.
POUR CES MOTIFS, le gouvernement du Canada et le Mi’kmaq Epekwitnewaq Kapmntemuow conviennent de ce qui suit :
ÉTABLISSEMENT D’UNE RÉSERVE DE PARC NATIONAL
- Les parties conviennent qu’il est possible de continuer à travailler ensemble à l’établissement de la réserve de parc national dans la région de Pituamkek à l’Île du Prince Édouard en négociant l’entente nécessaire pour établir une réserve de parc national en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada, ci-après « entente d’établissement ».
- Les limites opérationnelles de la réserve de parc national proposée sont décrites à l’annexe 1.
- En négociant la protection de la région de Pituamkek, les parties veilleront à ce que la gestion sociale et économique respecte le principe Netukulimk, qui tire son origine du droit inhérent et qui est la philosophie mi’kmaq de longue date selon laquelle l’utilisation de la richesse naturelle apportée par le Créateur est destinée à l’autosuffisance et au bien-être de l’individu et de la communauté, leur permettant d’atteindre des normes adéquates de nutrition communautaire et de bien-être économique et spirituel sans compromettre l’intégrité, la diversité ou la productivité de la richesse naturelle.
- La création, l’aménagement, la gestion et l’exploitation d’une réserve à vocation de parc national à Pituamkek respecteront les droits ancestraux et issus de traités, conformément à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
- Les parties conviennent de privilégier une approche consensuelle à la prise de décisions et aux négociations dans le cadre de la mise en œuvre de l’entente d’établissement d’une réserve de parc national. Les parties auront la capacité de prendre des décisions ensemble sur la façon dont Pituamkek sera utilisé et les avantages économiques qui en découleront dans le contexte concomitant de sa conservation, de son utilisation et de sa gestion. Ces concepts seront protégés de la façon décrite dans l’entente d’établissement.
LIMITES DE LA RÉSERVE DE PARC NATIONAL PROPOSÉE
- Les limites de la réserve de parc national proposée à Pituamkek devraient essentiellement correspondre aux lignes de la carte figurant à l’annexe 1. La réserve couvrirait ainsi une superficie d’environ 3 000 hectares (30 km2).
Les parties conviennent que les limites définitives de la réserve de parc national proposée seront fondées sur les discussions en cours concernant les aires protégées existantes et proposées à Pituamkek, y compris des initiatives de protection fédérales, provinciales et du Mi’kmaq Epekwitnewaq Kapmntemuow qui pourraient mener à l’atteinte d’objectifs de conservation plus vastes et appuyer la connectivité des écosystèmes. Les parties conviennent également de faire tout leur possible pour travailler avec les propriétaires fonciers adjacents dans le but de soutenir et de protéger l’intégrité culturelle et écologique au sein de la région de Pituamkek. - Lors de la négociation de l’entente d’établissement, l’accent initial sera mis sur le transfert de l’administration et du contrôle des terres de la Couronne qui consistera en la première phase de la réserve de parc national proposée, complétée par l’achat possible, à l’intérieur des limites de Pituamkek, de terres privées par le Canada à la juste valeur marchande, dans le cadre d’une transaction conclue de gré à gré entre l’acheteur et le vendeur.
- Comme le Parlement l’a ordonné en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada, le Canada ne peut procéder ni ne procédera à l’expropriation d’une propriété privée pour établir ou agrandir un parc national ou une réserve de parc national. L’acquisition des terres privées pour les besoins de la réserve de parc national proposée sera conclue uniquement d’un commun accord entre l’acheteur et le vendeur.
- Tous les corridors de services publics et les droits de passage connexes demeureront sous l’autorité administrative de cette emprise précise.
- Les résidents n’auront pas à payer de droits pour accéder à leur domicile/propriété privée ou y recevoir des invités.
- L’établissement de la réserve de parc national proposée ne changera pas la compétence des gouvernements fédéral, provinciaux et autochtones ni des administrations locales à l’égard des terres adjacentes.
NÉGOCIATION DE L’ENTENTE D’ÉTABLISSEMENT
- Le Canada et le Mi’kmaq Epekwitnewaq Kapmntemuow négocieront une entente officielle sur la création d’une réserve de parc national qui définira les modalités de l’établissement, de l’aménagement, de la gestion et de l’exploitation d’une réserve de parc national.
- Avant d’entamer des négociations en vue d’une entente d’établissement d’une réserve à vocation de parc national, les parties organiseront un atelier à l’intention de leurs représentants afin d’examiner et de comprendre les lois et les mécanismes de gouvernance pertinents dont les parties doivent tenir compte dans la négociation d’une entente d’établissement.
- La négociation d’une entente d’établissement permettra aux parties de recommander à leurs organes décisionnels respectifs la protection des terres et des eaux actuellement sous l’administration et le contrôle du Canada ou du gouvernement de l’Île du Prince Édouard qui seront désignés dans les limites proposées en vertu de la Loi sur les parcs nationaux du Canada. Les parties tiendront également compte du droit inhérent et du Netukulimk.
- Pour plus de certitude, le pouvoir de conclure l’entente d’établissement d’un parc national nécessitera des approbations supplémentaires de chacune des parties.
- En l’absence d’une entente d’établissement conclue entre les parties en vertu de l’article 15, le ministre fédéral de l’Environnement et les Epekwitnewaq Mi’kmaw Saqmaq (chefs mi’kmaq de l’Île du Prince Édouard) ne recommanderont pas l’établissement d’une réserve de parc national.
- L’entente proposée pour la création d’une réserve de parc national comprendra des dispositions concernant :
- la finalisation des limites de la réserve de parc national proposée dans la région de Pituamkek;
- le calendrier et le processus de transfert de l’administration et du contrôle des aires protégées provinciales et des terres de la Couronne au Canada en vue de l’établissement de la réserve de parc national proposée;
- la gestion desdites terres entre la date de l’entente et la date à laquelle les terres sont inscrites en vertu de l’annexe 2 de la Loi sur les parcs nationaux du Canada;
- l’investissement fédéral dans la création, l’aménagement, la gestion et l’exploitation de la réserve de parc national;
- tout autre point sur lequel les parties s’entendent.
- L’entente d’établissement de la réserve de parc national proposée comprendra également des dispositions propres au droit inhérent des Mi’kmaq, au Netukulimk ainsi qu’à la culture et à l’histoire des Mi’kmaq en ce qui concerne :
- le régime de gestion coopérative qui définit la façon dont les parties travailleront ensemble à l’établissement, à l’aménagement et à la gestion d’une réserve de parc national, à la planification de la gestion et à l’élaboration d’un système qui inclut la gestion traditionnelle/culturelle et les méthodes occidentales;
- l’affirmation du maintien de la pêche, de la chasse, de l’accès à l’eau et de la gestion de l’eau, de la cueillette, de la nourriture et des médicaments, ainsi que des pratiques de gestion connexes, et des dispositions pour l’atténuation de toute incidence sur les Epekwitnewaq Mi’kmaq en ce qui concerne les usages et la récolte traditionnels dans la réserve de parc national proposée;
- la protection et la gestion de sites d’importance spirituelle ou culturelle et de zones spéciales de gestion (p. ex., zones de chasse) ainsi que l’utilisation de ces zones et leur accès continu, y compris les sites de campement, les lieux de pictogrammes, les sites archéologiques et les sites cérémoniels;
- l’utilisation du Mi’kmawey Kjijitaqn (savoir écologique traditionnel) dans les pratiques de protection, de gestion et de récolte, y compris la gestion des incendies et de l’eau;
- la mobilisation du Mi’kmawey Kjijitaqn (savoir écologique traditionnel) des aînés et des jeunes, et la promotion et l’utilisation de la langue mi’kmaq, des connaissances culturelles et de la gestion des ressources dans tous les aspects de la mise en œuvre de la réserve à vocation de parc national;
- les possibilités de formation visant à aider les membres de la communauté des Epekwitnewaq Mi’kmaq à décrocher un emploi dans la réserve à vocation de parc national;
- les débouchés et les possibilités économiques s’offrant aux Epekwitnewaq Mi’kmaq dans la réserve de parc national et les mesures qui seront adoptées pour les aider à profiter de ces possibilités dans la réserve de parc national;
- les mesures d’urgence et d’atténuation (p. ex., incendies, inondations, problèmes liés aux espèces envahissantes).
- Le Canada financera tout besoin financier supplémentaire raisonnable du Mi’kmaq Epekwitnewaq Kapmntemuow, financement qui pourrait être nécessaire pour permettre aux du Epekwitnewaq Mi’kmaq de participer efficacement à la négociation de l’entente d’établissement, à la consultation publique ainsi qu’à la mobilisation et à la consultation de la communauté.
- L’entente d’établissement de la réserve de parc national proposée peut également comprendre des dispositions propres aux intérêts de tiers en ce qui a trait aux conditions des baux, des licences et des permis existants, d’un comité consultatif local chargé de fournir des conseils sur les questions relatives aux parcs concernant les affaires communautaires locales, et d’autres autorisations au besoin.
SECTION DES COMMUNICATIONS
- Le présent protocole d’entente sera considéré comme un document public dès qu’il sera signé et sera alors mis à la disposition du public.
- Les parties s’engagent à élaborer un protocole de communication couvrant toutes les communications concernant la négociation et l’établissement d’une réserve de parc national.
- Les parties conviennent d’élaborer et de distribuer des documents de communication de façon continue afin de faire le point sur le processus d’établissement de la réserve de parc national.
EFFET DU PROTOCOLE D’ENTENTE
- Le présent protocole d’entente est l’expression des intentions mutuelles des parties. Il n’a aucun effet juridique contraignant ou exécutoire.
- Le présent protocole d’entente ne se veut pas et n’est pas un traité ou un accord sur des revendications territoriales au sens des articles 25 et 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
- Le présent protocole d’entente témoigne des intentions mutuelles et de la bonne volonté des parties et n’a nullement pour effet de créer, de léser ou de nier les droits, revendications, positions ou obligations de l’une ou l’autre des parties.
- En reconnaissance des différentes langues parlées par les parties au présent protocole d’entente et afin de respecter cette réalité, les parties ont défini les termes mi’kmaq dans le protocole d’entente en ajoutant une traduction française entre parenthèses immédiatement après chaque terme mi’kmaq.
- Le présent protocole d’entente entrera en vigueur une fois qu’il aura été signé par les parties et demeurera en vigueur jusqu’à ce qu’une entente d’établissement d’une réserve de parc national proposée soit négociée ou qu’une partie se retire du protocole d’entente.
- Le présent protocole d’entente ne peut être modifié qu’avec le consentement écrit préalable de toutes les parties.
- Une partie peut se retirer du protocole d’entente en donnant un préavis écrit de 60 jours aux autres parties.
EN FOI DE QUOI, LES PARTIES ONT SIGNÉ CE 19 JOUR DE JANVIER 2022
Pour le GOUVERNEMENT DU CANADA
L’honorable Steven Guibeault, Ministre de l’Environnement et du Changement climatique
Pour la MI’KMAWEY KAPMNT TA’N NIKANA’TU’TIJ EPEKWITNEWAQ MI’KMAW-SAQMAQ
Chief Darlene Bernard
Pour la MI’KMAWEY KAPMNT TA’N NIKANA’TU’TIJ EPEKWITNEWAQ MI’KMAW-SAQMAQ
Chief Junior Gould
Le présent accord peut être signé en un nombre quelconque d’exemplaires, et ces exemplaires peuvent être remis par courrier électronique, télécopie ou par tout autre moyen électronique. Tous ces exemplaires constituent ensemble un seul et même accord.
ANNEXE 1

Carte du projet de la réserve de parc national Pituamkek — Version texte
Cette carte montre les limites provisoires de la réserve de parc national à Pituamkek.
L’aire d’étude commence à l’est d’Alberton, s’étendant de l’île d’Oulete à l’ouest, puis jusqu’aux îles à l’est de l’île Lennox, légèrement au nord-ouest de la baie Malpeque.
Une ligne pointillée indique une zone d'intéret écologique et culturel plus large à partir de laquelle la limite de travail a été choisie.
Les zones ombragées sur la carte indiquent les terres étant considérées comme faisant partie de la réserve du parc national, identifiées comme les limites géographiques provisoires de Pituamkek.
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