Murray Gillespie
Parc national Wapusk
La première fois que Murray Gillespie a fait l’une de ses nombreuses visites à Churchill et dans les basses terres environnantes de la baie d’Hudson, c’était en 1972. Depuis, bien des choses ont changé, y compris la désignation, en 1996, d’un grand lopin de basses terres pour former le parc national Wapusk. La désignation de cette zone unique en tant que parc national a offert une nouvelle protection importante à cette terre, à sa faune et, surtout, à la culture des gens qui ont jadis évolué dans ces lieux, et à ceux qui y évoluent encore de nos jours.
Les basses terres de la baie d’Hudson sont reconnues comme une zone faunique d’importance, notamment pour les ours polaires, les caribous et la bernache du Canada. Au début des années 1970, la station de recherche sur la faune (Nester One) a été établie juste au sud du cap Churchill. Son rôle principal consistait à soutenir les travaux de recherche et de gestion de la population de bernaches canadiennes des prairies de l’Est. Pour étudier de grands nombres de bernaches nicheuses, les chercheurs devaient traverser la toundra humide et des crêtes de plage dans le but de repérer les nids et de compter les bernaches. À titre de gestionnaire des programmes provinciaux de gibier à plumes, Murray a passé beaucoup de temps à la station de recherche de Nester One ainsi que dans les zones côtières adjacentes des basses terres. Au début, la station prenait la forme d’une hutte Quonset en bois couverte de toile. Bien que ces structures étaient monnaie courante dans le Nord, elles présentaient des lacunes.
Entre autres, leur toile, bien qu’isolée, ne résistait pas à la curiosité des ours polaires errants. Même si les chercheurs prenaient soin de ne pas laisser de nourriture dans la hutte, l’odeur résiduelle des repas attirait les prédateurs, ce qui donnait lieu à de mauvaises surprises.
« Ils les déchiraient », s’esclaffe Murray, qui est allé à Nester One en 1973 pour la première fois.
La clôture électrique entourant la station, d’une hauteur d’environ 1,8 mètre (six pieds), avait une certaine utilité, mais parfois, c’était peine perdue en raison des énormes bancs de neige.
« Pendant l’hiver ou au printemps, quand on était là, le problème, c’est qu’il y avait de la poudrerie, et que cette poudrerie se heurtait contre la hutte, se souvient Murray. Comme vous pouvez vous l’imaginer, si on se trouvait à la hutte et qu’on regardait vers le nord-ouest, il n’y avait ni arbres ni protection contre le vent.
Le vent venait de cette direction, mais rien ne l’arrêtait. Le vent ramassait la neige jusqu’au camp et là, une structure bloquait son chemin. La neige s’accumulait donc derrière la hutte, jusqu’à la hauteur du toit.
C’était comme ça tous les hivers avec la hutte Quonset. Donc, quand un ours polaire passait par là au printemps ou au beau milieu de l’hiver, il pouvait facilement marcher sur la neige dure, traverser la clôture et se promener sur la hutte. »
À maintes reprises, des ours se sont ramassés sur le toit grâce aux bancs de neige, mais l’un des souvenirs les plus mémorables de Murray date du milieu des années 1970, alors qu’il était au camp avec un étudiant de l’Université du Wisconsin.
« En pleine nuit, on a entendu des craquements sur le toit du Quonset parce que la neige était à égalité de la toiture, se rappelle Murray. Quelque chose marchait sur le toit. On a ouvert la porte et tiré quelques coups de fusil en l’air.
L’ours s’est enfui vers la baie, dans la noirceur, mais on n’a pas bien dormi pendant le reste de la nuit. »
Améliorations à Nester One
Au fil des ans, Murray a joué un grand rôle dans les améliorations apportées à Nester One afin de rendre le camp plus habitable pour les chercheurs.
Le premier ajout a pris la forme d’une cuisine isolée et séparée pour faire les repas. Le transport de l’eau à l’aide de chaudières a également cédé sa place à une pompe à essence et à un grand boyau à incendie puisant de l’eau d’un lac environnant. Et plus tard, la hutte Quonset a été remplacée par un pavillon doté de chambres à coucher et même d’une salle de réunion pour les présentations.
Avec l’aide d’un ingénieur, Murray a modifié le pavillon pour qu’il soit à l’épreuve des ours. Entre autres, ils ont posé des fermes de toit plus rapprochées qu’en temps normal et du contreplaqué de ¾ de pouce d’épaisseur, en plus d’une toiture métallique.
« L’ingénieur m’avait dit que si un ours marchait dessus, la structure ne s’écroulerait pas sous son poids, raconte Murray. Des ours ont effectivement marché sur le toit, et la structure a résisté, sans s’effondrer. Nos efforts ont porté fruits. »
Vers la fin des années 1980, une nouvelle clôture de 2,4 mètres de hauteur a été érigée autour des installations, en plus de barbelés de 30 centimètres, pour une hauteur totale d’environ 2,75 mètres (neuf pieds).
Cela dit, il arrivait parfois que les ours réussissent à surmonter cet obstacle, si bien qu’ils avaient installé une clôture de 5,2 mètres (17 pieds) de hauteur du côté exposé au vent afin de les empêcher de marcher sur la structure une fois pour toutes.
Dégagement du camp
Les chutes de neige constituent un autre enjeu que de grandes clôtures ou de nouvelles structures ne peuvent atténuer, soit la nécessité de dégager le camp.
Murray se souvient qu’à un moment donné, après être arrivés en motoneige, il leur a été impossible d’entrer à l’intérieur. Souvent, ils devaient pelleter pendant des heures pour enlever deux mètres de neige, seulement pour avoir accès à l’intérieur.
« Il fallait parfois enlever la neige pendant plusieurs heures juste pour atteindre le bas de la porte. La neige s’accumulait régulièrement sur la hutte, au point où on ne pouvait apercevoir que quelques pouces de la toiture sortir du banc de neige. Après avoir pelleté, on pouvait entrer et sortir de la structure.
Heureusement, les portes du Quonset ouvraient vers l’intérieur, car le matin, s’il avait venté beaucoup pendant la nuit, notre passage pouvait être complètement enneigé. Quand on ouvrait la porte, on voyait à peu près juste de la neige. Il fallait donc sortir de là en rampant et recommencer à pelleter. »
En soi, chauffer la structure présentait aussi un défi. Il fallait que les visiteurs trouvent et dégagent les fûts de carburant stockés sur une crête de plage environnante (afin de ne pas les perdre de vue). Ils les faisaient rouler sur la neige jusqu’à Nester One et s’en servaient pour alimenter la fournaise.
Temps de déplacement
Les déplacements à pied, en hélicoptère ou en petit avion pouvaient être ardus et truffés de moments terrifiants. Se rendre à Nester One en motoneige, ce n’était pas une partie de plaisir, surtout sur des machines inconfortables dans des températures à glacer le sang, sans GPS. La visibilité était régulièrement presque nulle, ce qui n’aidait en rien le déplacement des chercheurs.
« On en venait qu’à reconnaître les crêtes de plages et les diverses caractéristiques géographiques qui nous servaient de points de repère, ajoute Murray. Souvent, c’est comme ça qu’on naviguait. »
Les motoneiges gelaient régulièrement, mais l’ajout d’eau bouillante au carburateur permettait généralement de les dépanner.
De beaux souvenirs
Au début, le camp Nester One a été aménagé pour faciliter l’étude des populations de bernaches canadiennes, ce qui représentait une grande partie du travail de Murray à titre de gestionnaire des programmes provinciaux de gibier à plumes, le long de la côte de la baie d’Hudson. Murray a travaillé pour la province du Manitoba pendant plus de 36 ans. Il a pris sa retraite en 2007 et a fait partie du Conseil de gestion de Wapusk pendant plusieurs années à compter de 2009.
En tant que gestionnaire des programmes provinciaux de gibier à plumes, Murray avait la responsabilité de localiser les populations d’oiseau à la grandeur de la province pour veiller à ce que leurs nombres demeurent à des niveaux acceptables. Il a travaillé avec ses homologues du Mississippi Flyway Council, qui comprend des États touchés par les voies migratoires de l’espèce, jusqu’au golfe du Mexique.
Sa présence à Nester One lui a donné l’occasion de découvrir des aspects de recherche autres que le sien. Souvent, des chercheurs de projets différents partageaient les lieux et racontaient leurs expériences. Murray se souvient d’avoir rencontré le célèbre chercheur spécialisé dans les ours polaires, Ian Stirling. Il l’a même accompagné dans le cadre d’une expédition d’étiquetage d’ours.
Murray était un photographe accompli, et il avait l’occasion de se déplacer à pied pour chercher les oiseaux nicheurs. Pendant ces excursions, il prenait toutes sortes de clichés, de la faune, des paysages et des ressources culturelles de la région. Pour Murray, ces photos revêtent une énorme importance, tant pour lui que pour l’histoire de la région.
« Quand je regarde une photo, je ne me dis pas seulement qu’elle est belle. Je remonte dans le temps. Je vois la scène, je la comprends. Ça m’emballe, raconte-t-il. Je peux regarder la même photo plusieurs fois et elle m’emballe toujours. Je revis l’expérience. »
En plus des études de la faune, Nester One soutient aussi des programmes scolaires et fournit un hébergement sécuritaire sur le terrain à de nombreux chercheurs et membres du personnel du parc national Wapusk.Liens connexes
- Doug Clark au sujet du changement
- Doug Clark au sujet de tanières
- Doug Clark au sujet de caméras
- Evan Roberts
- Heather MacLeod parle du Camp jeunesse de Wapusk
- Matt Webb
- LeeAnn Fishback au sujet de se repérer
- LeeAnn Fishback au sujet de météo
- Nancy Spence
- Dr Robert Rockwell
- Russell Turner
- Sandra Hollender
- Wanli Wu
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